A la radio, Réda Hamiani a déploré que les opérateurs économiques, dont le patronat, n’aient pas été associés à l’élaboration du projet de loi de finances 2010, un document qui, a-t-il ajouté, a tendance à sortir de son cadre traditionnel d’affectation annuelle des ressources budgétaires pour s’imposer comme l’outil principal de stratégie économique. Le président du FCE a parlé d’exercice solitaire du pouvoir.
Alors qu’ils sont censés refléter le consensus national du fait qu’ils engagent l’avenir de la nation, les grands choix économiques sont laissés à la seule appréciation des administrations publiques. Le résultat est souvent catastrophique, comme l’a été celui de la loi de finances complémentaire de juillet dernier qui a déstabilisé le fragile appareil économique par des mesures édictées sans concertation avec les entreprises.
L’Etat a été contraint, en cours de chemin, d’apporter quelques rectificatifs par voie réglementaire mais sans céder sur l’essentiel. Les compétences que recèlent la sphère privée et la société civile n’ont pas la possibilité de s’exprimer et de se faire entendre en haut lieu. Même les parlementaires ne sont pas épargnés : pourtant globalement acquis au pouvoir, ils ne sont sollicités que pour lever la main en signe d’approbation des textes conçus par l’Executif.
Cette culture du monologue est porteuse de germes destructeurs. Comme les grèves, les marches, les sit-in, les pétitions, etc. ne reçoivent qu’exceptionnellement des échos en haut lieu, le passage à l’émeute devient la réponse jugée la plus appropriée. La toute dernière vient de frapper durement le quartier de Diar Echems, à Alger, avec son lot de victimes chez les manifestants et les forces de l’ordre.
Pour le sociologue Ali El Kenz, l’émeute est une réponse à des pratiques telles que l’arrogance, le double langage, l’inertie bureaucratique, les passe-droits. « Quand le lien politique est rompu, la violence remplace l’expression », écrit-il. De l’avis de l’historien Daho Djerbal, « les émeutes ne sont pas seulement des éruptions de colère , c’est une volonté de négocier avec ceux qui détiennent le pouvoir ; or ceux-ci ne veulent pas de changement et donc poussent les jeunes à s’insurger de manière de plus en plus violente ».
A force de s’exercer dans la solitude et le mépris, le pouvoir finit pas s’effilocher. Le président de la République a quasiment déserté l’espace public, mais sans pour autant se délester de ses pouvoirs. Comme il est extrêmement sourcilleux sur ses prérogatives, il a paralysé une bonne partie de l’Etat : les grands commis que sont les ministres ne peuvent rien décider sans son aval.
Le chef de l’Etat est suivi, pour des raisons différentes, par son Premier ministre qui, depuis six mois, ne communique presque plus avec les grands acteurs de la vie économique et politique Pour combler cette grave fracture entre la politique et la société, le remède classique prescrit en haut lieu est l’argent du pétrole. La loi de finances 2010 va accentuer le niveau des dépenses publiques, cette fois en aggravant les déséquilibres budgétaires. On puisera dans la cagnotte stockée dans le fonds de régulation, mais que se passera-t-il lorsque le bas de laine sera désespérément vide ?
Par Ali Bahmane
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