jeudi 25 août 2011

Diplomatie et dérive “systémique”

Pour réagir aux commentaires suscités par sa conduite et ses silences au long des évènements de Libye, l’Algérie a eu recours à “une source au ministère des Affaires étrangères”, si l’on en croit les organes de presse qui se sont fait les échos de cette “source”.

L’usage de l’anonymat ne peut s’expliquer que par deux possibles raisons : ou “les Affaires étrangères” n’ont pas le courage d’assumer leur propre vision de l’action (ou l’inaction) diplomatique que leur inspire la situation libyenne ; ou alors la voix masquée n’est pas une voix des Affaires étrangères, mais la voix qui parle à la place des Affaires étrangères et qui, en réalité, leur dicte leur démarche.

Dans le premier cas, cela voudrait dire que tout un département de souveraineté, avec son armée de plénipotentiaires, ses porte-parole et son réseau planétaire d’ambassades, n’ose pas dire tout haut l’analyse officielle de l’État algérien et les résolutions qu’il en tire pour encadrer son action. Cela voudrait dire aussi que les commentateurs de tout poil doivent, malgré l’anonymat, lire, dans l’intervention de la “source”, l’éclairage officiel de la République algérienne démocratique et populaire représentée, pour la circonstance, par une “gorge profonde”.

Dans le second cas, où le tuteur des Affaires étrangères ne veut pas, non plus, s’identifier, cela voudrait dire que les Affaires étrangères ignorent les raisons de leur approche, s’il y en a une, et des positions qui en découlent. Dans ce cas, la “source” n’est plus une “source” d’information proche ou issue des Affaires étrangères mais la source… d’inspiration de son action. Normal alors qu’elle vole au secours d’une institution qui ne maîtrise pas sa propre activité et qui ne sait pourquoi. De derrière le rideau, les arguments de la diplomatie nationale sont ainsi jetés à la figure de ses détracteurs et, accessoirement, transmis à l’opinion publique.

La troisième possibilité, celle où l’intervention de la “source” ne serait qu’un canular, n’est pas prise en compte. Même si l’on peut noter alors l’absence de réaction, de démenti, des Affaires étrangères qui accepteraient donc d’être représentées, dans un débat, par une “source” anonyme. Est-ce alors que les AE confirment s’être exprimées par “source” interposée ? Ou est-ce parce qu’elles prêtent, sur la foi d’une presse complaisante, une autorité à une “source” dont elles ignorent l’identité.

La presse, qui, par ailleurs, se dit en quête de sa dignité, se fait le complice d’une communication officielle clandestine et va recueillir une position d’État chez une “source” qui la donne en cachette ! Elle inflige ainsi à ses lecteurs le mépris d’être informés par une voix source qui, pour on ne sait quelle raison, refuse de se présenter à visage découvert. On ne peut reprocher sa dérive à la diplomatie nationale et participer à cette même dérive en entrant avec elle — ou avec un imposteur — dans une sorte de communication subliminale.

Une régression nationale d’une telle ampleur nécessite une convergence des effets de dérives conjuguées.
En fait, ce n’est pas la diplomatie qui est en cause. C’est seulement son tour de se révéler. Comme un autre moment d’une dérive “systémique”.

Par : Mustapha Hammouche

La blague stupide du retour impossible du FIS !

Par Hakim Laâlam
Email : laalamh@yahoo.fr Quel profil devra avoir le successeur de Kadhafi ?

Moins de cheveux et
des lunettes plus classes !

On les entendrait presque ! Qui ça ? Mais les «ouf» de soulagement. Des voix amies, des sources cousines, des «off» fraternels et des bouches à oreilles reconnus par l’AAOA, l’Agence Algérienne des ORL Associés, se sont chargés ces dernières heures de nous rassurer : non ! Contrairement à ce qui a circulé dans les couloirs mal ventilés du pays, le FIS ne sera pas ré-agréé et les anciens dirigeants du Front hirsute ne pourront plus faire de politique sous la bannière frontiste. A peine ces campagnes de «rassurage» mises en circulation, vendues en packs colorés et chatoyants, que nous nous sommes pris et surpris à souffler un peu mieux, à moins sentir une boule dans l’estomac et à différer nos promesses de prendre les armes pour défendre la république ou de tout simplement prendre la poudre d’escampette. Sauf que le bruit assourdissant de tous ces «ouf» n’arrive pas à masquer ce qui semble aussi évident que le nez rouge de Bozo le clown au milieu du visage : les islamistes ont-ils un besoin vital du retour du FIS pour exister politiquement, socialement, culturellement et économiquement ? Avec ou sans les trois lettres, FIS, l’intégrisme est au boulot en Algérie, tous les jours, inlassablement, décapant les dernières couches d’une république grabataire et incontinente. Le FIS est là, les mecs ! La devanture a changé. Les couleurs ont changé. Les sigles ont changé. Mais ça reste du Canada Dry barbu ! Lorsque Hassan Hattab oblige des juges à mentir, leur faisant dire devant témoins qu’ils ne savent pas où il se trouve, c’est l’islamisme à l’œuvre. Lorsque Madani Mezrag presse le châtelain d’El Mouradia de tenir ses promesses et son calendrier de déculottée, c’est l’islamisme à l’œuvre. Lorsque le vendeur d’épices, Benhadjar, évoque avec une précision étonnante et bientôt détonante ses contacts réguliers avec Abassi Madani et Ali Benhadj, c’est l’islamisme à l’œuvre. Lorsqu’une polyclinique est attaquée de nuit à Sour El Ghozlane, que les tangos y volent une ambulance et des cartons de médicaments, c’est l’islamisme à l’œuvre. Jamais peut-être depuis qu’il a été «dissous» le FIS n’a été aussi présent et actif qu’en cet été 2011. Alors, libre aux pousseurs de «ouf» de se soulager la poitrine et d’évacuer à petit prix leurs angoisses. Moi, le FIS, je le vois tous les jours, je le côtois à chaque instant et il me pourrit la vie en permanence. Tellement d’ailleurs que je fume du thé pour rester éveillé à ce cauchemar qui continue.

Tripoli, le jour d’après !

Le défi du CNT est de recoller les morceaux sur le mode moderne cadrant avec les vœux des accompagnateurs de la “révolution” qui ont déjà rédigé les premières factures de leur participation à l’expédition.

Tripoli tombé, une grosse incertitude sur son avenir flotte dans son ciel. Dans un sursaut de conscience, le monde planifie un scénario à l’anti-irakienne pour lui éviter le chaos. Ban Ki-moon, de sa tribune onusienne, a appelé les nouveaux maîtres de la Libye à “l’unité nationale, à la réconciliation de toutes les parties” dans ce pays qui n’a jamais été un État au sens classique du terme. Même si la coalition à l’origine de la chute de Tripoli s’active à réduire les dépenses de guerre en appelant au dégel des avoirs libyens, elle conjugue l’avenir de ce pays à un temps incertain : le CNT est trop marqué par l’ancien régime. à Obama qui voit mal Abdeljalil gérer la période transitoire, le CNT offre la garantie d’une “déclaration constitutionnelle” et, depuis, hier un calendrier électoral. Hasardeux pari que celui d’organiser des législatives et la présidentielle en moins d’une année dans ce pays a la composante sociologique hétéroclite et qui à fonctionné selon un schéma de gouvernance unique au monde.
Le défi du CNT est de recoller les morceaux sur le mode moderne cadrant avec les vœux des accompagnateurs de la “révolution” qui ont déjà rédigé les premières factures de leur participation à l’expédition.
De la réussite de cette période délicate dépend le plan global dont les contours ont été dessinés “par le président français qui se découvre une nouvelle mission divine” de libération des peuples de la dictature. Et accessoirement, à défaut de vendre son “Rafale”, Sarkozy aura le loisir de l’utiliser contre des pays inscrits dans la colonne des “à civiliser”.
Reste la donne islamiste qui semble dominer profondément l’idéologie du CNT qui a annoncé la couleur dans sa déclaration de principe. Islam religion de l’État, la charia… et “le respect des autres religions et rites” comme caution. Le CNT a contracté et assumé une alliance avec les jihadistes qui étaient la seule véritable opposition au régime de Kadhafi. Contrat qui n’est pas dénué de risque et de potentielles velléités déstabilisatrices inhérentes à la raison d’être de cette mouvance. Aqmi, qui a amplement profité du chaos libyen, peut créer une “intime” proximité pour étendre son champ d’influence et d’activité.

Par : Djilali Benyoub

Ces terres à problème

A Bir Ghbalou, les paysans se disputent l'occupation des terres d'une surface ahurissante...

Deux grandes familles de la région de Bir Ghbalou (wilaya de Bouira) se disputent un miniterritoire agricole de excusez du peu-cent quatre-vingt-cinq hectares. Une véritable fortune qui reste un énorme souci pour la justice locale.


Trois inculpés et trois victimes sont debout face à Mohammed Bezhoud, le président de la section correctionnelle du tribunal de Tablat qui a, à sa droite, bien assis sur -et dans - le siège du ministère public, le jeune et attentif Abdelhamid Yettou qui devait se morfondre depuis le temps où les adversaires dans ce dossier s'affrontent. Une tonne de documents -arrêts-jugements-procès verbaux-convocations-attestations-correspondances émanant des ministères de l'Agriculture, de l'Intérieur, de l'Urbanisme, de la Justice sans compter les policiers, les gendarmes, les huissiers, les notaires et même des coupures de canards sur ce problème qui remonte au moins à 1999 et c'est peu dire.


Etant au parfum de la guéguerre que se livrent ces voisins, cousins, inculpés, victimes et même témoins, le président avance lentement grâce au précieux concours de trois conseils: Maître Hassan Brahimi, Maître Touati et Maître Rachid Brahimi. Les trois défenseurs poseront beaucoup de questions aux antagonistes qui dominent leur sujet, sauf peut-être les jeunes héritiers qui ont pris place juste après le décès du papa. Et ce mercredi, il s'agit d'atteinte à la propriété. D'emblée, l'un après l'autre, les trois inculpés nient le délit.


«Nous sommes chez nous, sur nos terres» a affirmé le premier alors que le deuxième, le plus âgé, a déclaré que les pseudo-victimes n'ont rien à gratter: «Ils ont été depuis longtemps, délogés, renvoyés, car ils n'avaient rien à voir avec ces cent-quatre vingt-cinq hectares»


Le troisième et dernier inculpé, chevaleresque et avec beaucoup de sang-froid, va longtemps s'accrocher au procès-verbal d'installation évoqué durant l'interrogatoire par leur avocat Maître Touati, qui semble, tout comme les Brahimi, avoir appris par coeur le contentieux depuis le début des hostilités.


Saâd F., Lakhdar F., et Mohamed.L, les trois victimes vont déclarer exactement les mêmes propos mais à l'envers. Elles s'expriment en victimes spoliées mais pas en victimes expiratoires. Et comme pour effectuer une pause, ce bon ancien juge du siège va profiter d'une feinte que la loi a prévue, va faire un peu d'humour, histoire de dégeler des débats qui montaient, montaient, montaient...


Par la suite, nous aurons un autre festival de questions-réponses, bien orchestré par le juge, nullement pressé d'en finir car il devait être fixé sur le sort de ce dossier qui a connu le civil, le référé et le pénal et ce, à plusieurs reprises. C'est donc dire que la vigilance est de rigueur, on demande à prendre acte. Côté Maître Touati autour de la réponse de Lakhdar.F, à propos du fameux procès-verbal d'installation. Et Maître Touati poussera la coquetterie jusqu'à aider Bezhoud lors de la dictée de la prise d'acte. Le juge joue le fair-play. Il laisse faire tant que ces paysans restent respectueux des us et coutumes, car avec ces trois renards d'avocats, comment donc cela ne marcherait pas comme sur des roulettes? Et là, nous aurions aimé voir une autre Brahimi, Fatiha, la présidente de chambre correctionnelle de Blida, présider ces débats où son propre paternel, Maître Hassan Brahimi, tient la vedette avec le bonus de défendre des victimes d'atteinte à la propriété et tout le chapelet d'articles de loi...


D'ailleurs, les deux défenseurs des victimes décideront de ne pas trop agacer le tribunal qui connaît ce dossier sur le bout des doigts et même des orteils. Les deux conseils sortiront de leurs gibecières toutes les cartouches en vue de descendre l'oiseau en plein champ en ce début mai 2011.Quant à Maître Touati, il a plaidé comme s'il n'avait pas retenu le «son et lumière» de ses deux aînés qui avaient, rappelons-le, réclamé 100 millions de centimes à tire de dommages et intérêts. En face, on gonfle ses joues...


L'avocat des inculpés brandit avec le verbe fort, l'article 386 et ses termes secs affirmant «qu'on n'est pas devant un délit proportionnel car dans ce cas d'espèce, il n'y a pas de délit du tout».
Puis entrant dans le jargon du «civil», Maître Touati ne manque pas de rendre hommage au président qui a su conduire des débats et donc a laissé au «piquet» du procès-verbal d'installations cette pièce-maîtresse de l'affaire, les trois pseudo-victimes qui croient encore que la partie est jouée et gagnée:«Dans cette affaire, cessez de rêver», conclut-il avant que Maître Rachid Brahimi ne réplique sportivement autour de la jurisprudence évoquée par son confrère. «Nous ne sommes pas dans le cas de gens expulsés qui reviennent se réinstaller sur les terres. Non!», articule le vieil avocat dont le sourire illuminera toute la face marquée par la chaleur de cet après-midi...estival! Le dossier est mis en examen sous huitaine. Suspense...

Par

Copié-collé temporel

Certes, le monde est ainsi fait que, le cycle des saisons aidant, se reproduisent au fil des ans les mêmes phénomènes publics et collectifs, ici des bouchons de départ en vacances, là les ravages produits par la canicule ou les inondations, là encore les incendies ou les effets induits par les flux d’estivants ou de vacanciers d’hiver. Ces entorses à la routine et à la monotonie causent des dé-sagréments plus ou moins graves, plus ou moins bloquants, mais sachant que leur survenue est inéluctable, les sociétés s’y préparent et leurs gouvernants prennent des dispositions pour que la gêne ou le ravage soit réduit à sa portion congrue. Et chaque année, une fois l’orage passé, il s’établit un bilan, un débriefing pour voir si le dispositif mis en place a bien fonctionné, y relever et sérier les failles éventuelles et apporter les correctifs pour la saison suivante. Ces précautions et cette culture de veille sont des attitudes de gestion de la cité tout à fait normales, puisque ces problèmes sont prévisibles et la riposte à leurs dé-sagréments programmée. Il en est ainsi partout dans le monde. Mais dans leur irrépressible propension à cultiver le désir de se distinguer et de ne bien se mouvoir que dans l’exception, nos responsables font que chez nous, cela se passe autrement. D’une année à l’autre, on assiste aux mêmes phénomènes, petits tracas ou grands désastres, reproduits à l’exacte fidélité, comme dans une photocopie, à la nuance près si c’étaient des couleurs, à la virgule près si c’étaient des textes. Depuis non pas une ou deux années, mais des décennies, par exemple, tous les ramadhans pointent sur le calendrier avec leur provision inchangée de flambée des prix, ainsi que leur immuable fin chaotique à l’annonce de l’Aïd. Face à cette réédition de la même anarchie, les pouvoirs publics redoublent d’ingéniosité pour trouver la parade, mais elle ne reste valable que dans les confins de leurs communiqués. Si les citoyens, faisant contre mauvaise fortune bon cœur et prenant leur mal en patience, se sont acclimatés à l’anarchie dans les transports les jours de fête, les responsables des secteurs concernés semblent également s’être habitués aux mêmes désagréments, alors que leur rôle est justement d’éviter que cette anarchie se manifeste. Nul besoin d’être grand clerc pour imaginer des solutions les plus simples, comme celle de multiplier les moyens matériels, en y mettant le prix, évidemment, pour absorber le surcroît d’affluence et de pression les jours de l’Aïd. Par contre, l’énigme reste sans conteste les bousculades devant les bureaux de poste, le citoyen n’arrivant pas à comprendre comment et pourquoi l’Etat ne lui donne pas son propre argent. Des commerces qui ferment carrément pendant les jours de fête, les postes submergées, le chaos dans les gares et stations routières, ce copié-collé à travers les années n’a lieu qu’à la faveur de l’impunité. De là à dire que nous avons affaire à un Etat laxiste, il y a un pas que seule l’extrême complaisance empêche de franchir.

N.S.

Cécité politique

Le conflit libyen a aiguisé bien des appétits de la part de nombreux pays qui tentent de se placer au mieux de leurs intérêts dans la perspective des nouvelles institutions post-régime El Gueddafi. A mesure que le parfum de la victoire, parti de Benghazi, se répand dans l’ensemble du pays pour gagner et encenser la capitale tombée entre les mains des rebelles du CNT, les manifestations de soutien au Conseil national de transition affluent de toutes parts. Des pays qui avaient observé une attitude attentiste ou qui ont louvoyé au début du conflit en apportant un soutien discret mais actif à El Gueddafi, compte tenu de leurs relations avec le «guide» libyen et de leurs intérêts économiques dans le pays, à l’instar de la Chine et de la Russie, sont en train de recadrer leurs positions en reconnaissant à mots à peine couverts la légitimité du CNT et de son combat pour renverser le régime dictatorial d’El Gueddafi.

La course au trésor est engagée. Les Etats ayant reconnu le CNT se comptaient sur les doigts d’une main au début de la révolution, ils sont aujourd’hui une quarantaine de pays et le chiffre est sans nul doute éligible à la hausse. Il faudra s’attendre, en effet, dans les prochains jours à une cascade de reconnaissances confortées par la tournure des événements de ces dernières heures avec la déconfiture totale du régime d’El Gueddafi symbolisée par le contrôle de la capitale par les insurgés. Dans le monde arabe, hormis les monarchies du Golfe qui avaient reconnu, dès le début, le CNT, car elles avaient un compte à régler avec El Gueddafi qui ne prenait pas de gants lorsqu’il était l’homme fort de Tripoli pour prédire aux souverains arabes le même sort funeste que Saddam Hussein, les positions des autres pays arabes sont à l’avenant.

Pour d’autres considérations, géopolitiques, économiques, humaines et historiques et après s’être accommodé de l’encombrant et ombrageux personnage ménagé par les régimes en place qui ont entretenu avec El Gueddafi des relations en dents de scie au gré des humeurs du «guide», les pays du Maghreb ont pris le train presque à l’arrivée pour ceux qui ont osé franchir le pas. L’Egypte a ouvert le bal en reconnaissant le CNT il y a quelques jours, suivie de la Tunisie ; deux pays qui ont tracé la voie du printemps démocratique arabe et qui ne pouvaient pas, par conséquent, investis de cette responsabilité historique, rester en marge d’une autre révolution populaire qui est en marche à leurs frontières.

Le Maroc vient à son tour de franchir le pas en reconnaissant le CNT, se permettant même le luxe politique de doubler la mise avec la visite du ministre marocain des Affaires étrangères à Benghazi. Bien servi par la position embarrassée de l’Algérie dans le conflit libyen et le climat délétère existant entre le CNT et les autorités algériennes, Rabat se positionne et place ses billes en Libye en espérant empocher, demain, les dividendes politiques et économiques de son soutien. A cause de leur cécité politique, les responsables algériens, qui n’ont pas su s’élever à la hauteur du mouvement de l’histoire des peuples de la région, risquent de perdre un partenaire et un allié qui compte. Au plan de l’équilibre géostratégique dans la région, par rapport à l’affaire du Sahara occidental, et sur d’autres dossiers liés à la stabilité régionale et la coopération bilatérale.

Omar Berbiche

The candidate (20)

Enorme révélation au bureau carré, tous les historiques, les présidents et généraux sont en réalité morts depuis longtemps, et c’est le colonel Mu qui fait tourner la machine, avec des sosies parfaits.
- Une réalité en cache toujours une autre, c’est comme les trains, conclut le délégué aux opérations ultimes.
En réalité, la machine tourne quand même et à part cette question d’éthique, il n’y a pas de problème puisque personne, à l’exception les décideurs réunis dans le bureau carré, n’est au courant de cette gigantesque opération de doublage.
- Donc tout va bien, général ?
Le général E., qui vient de révéler n’être qu’un sosie du général E., a relevé la tête, après avoir plongé dans une réflexion en apnée :
- Oui, sauf que je ne savais pas que le président était un faux, comme moi.
Puis il a eu un doute et s’est retourné vers l’assistance :
- Qui d’entre vous est un sosie ?
Après un petit silence gêné, chacun a dû avouer qu’il était aussi un sosie. A part le colonel Mu, gérant de l’entreprise, qui annonce un peu fièrement :
- Je suis un vrai. Un vrai de vrai.
- Ça fait pas assez, trop de sosies, s’inquiète le général. Il nous faut un président vrai. Au moins le président.
Le colonel s’est retourné vers la jolie assistante du docteur Mouse :
- Sarah, tu es vraie ?
- Une vraie, oui, pas la peine de toucher, répond-elle en prenant un air faussement offusqué.
- Donc il n’y a que deux candidats à la succession, explique le général. Le colonel Mu et Sarah, ce sont les deux seuls vrais. Et comme il n’est pas question de mettre un militaire à la tête officielle du pays, ne reste que Sarah.
- Vous n’y pensez pas, s’est indigné le faux patron du Front.
C’est ainsi que Sarah a été proposée à la présidence de la République. Sauf qu’il y a déjà un président, même si c’est un sosie du président mort.
- Il faut donc tuer le sosie du président ?
- Oui. On n’a pas le choix. … A suivre

Chawki Amari

Libye, «c’était il y a longtemps et ça n’est jamais arrivé»

Par Hassane Zerrouky
Les images montrant Seif Al-Islam dans la nuit de lundi à mardi en train de démentir son arrestation et qui ont fait le tour du monde rappellent curieusement celles de Saddam Hussein saluant ses partisans le jour même où les forces américaines prenaient Bagdad. On sait ce qu’il en est advenu : Saddam n’a pu empêcher la chute de son régime. Il va de même pour Kadhafi et les siens retranchés dans le complexe fortifié de Bab Al Azizia, tombé mardi en fin d’après-midi aux mains des insurgés. Le régime de Kadhafi a donc vécu.
Celui de Abdellah Saleh au Yémen est aux abois ; quant à Bachar Al Assad, s’il continue dans la même direction, il subira tôt ou tard le même sort. Une chose est sûre : la fin politique de Kadhafi — en dépit de son appel à se battre jusqu’à la mort – marque une nouvelle étape dans les révoltes arabes et maghrébines. Mouammar Kadhafi, le plus ancien autocrate arabe, 42 ans au pouvoir, a perdu le sens des réalités à partir du moment où les capitales occidentales ont commencé à lui dérouler le tapis rouge à chacune de ses visites, tout en fermant les yeux sur son côté fantasque et les frasques de ses enfants, lui donnant ainsi l’illusion d’être un homme puissant, indéboulonnable et au-dessus des lois. Une illusion confortée de surcroît par ces félicitations et remerciements que Washington et ses alliés ne manquaient pas de lui adresser pour sa coopération contre le terrorisme islamiste et l’ouverture du marché libyen aux compagnies pétrolières occidentales. Seif Al Islam, par exemple, était reçu avec tous les égards, sa Fondation remerciée pour son rôle d’intermédiaire dans les délicates opérations de libération d’otages occidentaux. Mais Kadhafi et les siens ne savaient-ils pas qu’à la moindre occasion ces mêmes capitales l’abattraient sans coup férir ? Et c’est bien ce qu’elles ont fait au nom de la «protection » du peuple libyen ! Et c’est ce qu’elles feront demain avec ceux qui, parmi les chefs d’Etat arabes, s’accrochent à leur «koursi», manœuvrant et réprimant comme jamais pour étouffer les aspirations démocratiques de leurs peuples. Alors comment comprendre qu’en Algérie, après la vague qui a emporté Ben Ali, Moubarak, Kadhafi, et prochainement Abdellah Saleh, Bachar Al Assad, on élabore un code de l’information où sur les 15 articles le composant, dix prévoient des peines de prison pour les journalistes ! Selon El Khabar, Ahmed Ouyahia s’y serait opposé et aurait demandé la suppression de tels articles. Tant mieux si c’est vrai. La fin de Kadhafi va changer la donne politique au Maghreb et dans le monde arabe. L’Algérie est objectivement isolée. Le chaos tant souhaité en Tunisie, par certains chez nous, avec à l’arrière plan cet espoir d’un retour inespéré de Ben Ali, n’a pas eu lieu. Un retournement de situation militaire en Libye en faveur de Kadhafi, voire une solution politique qui aurait permis au guide libyen de se maintenir au pouvoir et à laquelle a œuvré l’Algérie dans le cadre de l’Union africaine, n’ont pas eu lieu. Les inquiétudes exprimées à grand renfort de publicité en Algérie sur le vol d’armes libyennes au profit de l’AQMI dans le but de discréditer les opposants à Kadhafi, n’ont eu aucun écho. Qui, en Occident, pourrait y donner du crédit alors que sur le plan interne, les autorités algériennes laissent le salafisme se propager et occuper les espaces y compris institutionnels (la TV par exemple), et ne font absolument rien pour mobiliser la population contre le terrorisme islamiste de crainte que les Algériens ne fassent le lien entre islamisme salafiste et terrorisme ! Et quand, par ailleurs, elles interdisent aux forces de progrès (quand elles ne les répriment pas) d’occuper les espaces publics et de s’exprimer sur les sujets qui préoccupent les Algériens ! Moubarak, Ben Ali, Kadhafi, Abdellah Saleh, Assad… Des despotes. Dira-t-on un jour chez nous «C’était il y a longtemps et ça n’est jamais arrivé» (Evguenia Guinzbourg, écrivaine soviétique ayant passé 21 ans dans le goulag). Aïd moubarak à tous.

DSK et ses avocats soulagés



Israël occupe la Libye

Aujourd'hui on colonise par supplétifs interposés. Comme le CNT libyen qui est en fait à la botte d'Israël via l'Elysée. Nous n'avons pas le droit de baisser notre vigilance. Le feu est à nos frontières.

C'est le dernier week-end du Ramadhan. On prépare la fête. Habits neufs, gâteaux, joie des enfants et des plus grands. Tout de suite après, ce sera la rentrée. Avec ses bons et ses mauvais côtés. Sur le plan intérieur, ce sont les réformes politiques qui seront au centre de l'actualité. Sur le plan extérieur, c'est la situation dans les pays voisins et particulièrement en Libye qui retiendra notre attention. A la fin du mois prochain est prévue la réunion de la tripartite. Comme cela paraît loin! Et peut-être sans grande importance comparé à la présence d'Israël sur nos frontières avec la Libye. Il ne faut pas se faire d'illusions. Le CNT (qui a été convoqué d'ailleurs à l'Elysée hier), c'est Sarko qui en réfère à BHL qui prend ses ordres chez Netanyahu. On en reste là pour le moment. Après les fêtes on poussera plus loin. Histoire de ne pas les gâcher. Mais il faut bien en parler tout de même. Cette année et compte tenu des événements exceptionnels qui ont touché la région Nord de l'Afrique, les revendications traditionnelles de la rentrée comme la gestion des oeuvres sociales des écoles, ou la couleur des tabliers paraissent bien dérisoires. Ce qui se passe en Libye ne peut nous laisser indifférents. Le sort de nos frères libyens, qui vivent une tragédie de plus en plus violente depuis plusieurs mois, nous interpelle. Ils ont passé un mois de Ramadhan dont ils se rappelleront toujours. Ils auront une fête de l'Aïd au goût amer. Des forces étrangères ont réussi à dresser les Libyens les uns contre les autres. A les pousser vers la guerre civile. Comme nous l'avions vécue nous-mêmes dans les années 90 avec les bombardements de l'Otan en moins. Des forces étrangères, qui s'acharnent sur notre région depuis des décennies, cela a forcément une ou des causes. Des forces étrangères qui ont tout fait pour entraver la construction de l'Union du Maghreb arabe. Des forces étrangères qui ont tout fait pour nous fourguer à la place une Union pour la Méditerranée. Un Occident qui est en butte à une grave crise économique et financière et qui cherche des moyens de s'en sortir quitte à marcher sur les cadavres des autres pays. Les reconstructions envisagées de la Tunisie et de la Libye font partie des possibles sorties de crise. Le contrôle du pétrole libyen aussi. Un peu plus bas, au Sahel, il y a également l'uranium du Niger qui fait l'objet de beaucoup de convoitises. Comme cela l'a été pour le cacao ivoirien tout récemment. Dans cet environnement, l'Algérie est encore plus convoitée que les autres. Avec son immense territoire. Ses richesses du sous-sol (minerais, hydrocarbures, or, etc.), ses richesses du sol (meilleures terres agricoles de la région), ses richesses dans l'atmosphère (énergie solaire, éolienne, etc.). Avec sa position géopolitique stratégique. Autant d'attraits pour attiser les convoitises de puissances en déclin pouvant trouver là, le ou les moyens de se refaire une santé. De relancer leur économie. De calmer les révoltes sociales dues à l'austérité imposée. Comme au bon vieux temps des empires coloniaux. A cette différence qu'aujourd'hui, on colonise différemment. Par supplétifs interposés. Comme le CNT libyen qui est en fait à la botte d'Israël via l'Elysée. Allez! on ne va pas gâcher la fête. On reparlera de tout cela juste après! Mais en attendant, nous n'avons pas le droit de baisser notre vigilance. Le feu est à nos frontières. En espérant que tous les Algériens auront le sens des responsabilités nécessaires pour hiérarchiser leurs besoins à la rentrée. Surtout pour ne pas prêter le flanc aux prédateurs qui n'attendent que la moindre occasion. Nous ne sommes pas dupes et savons que nous avons, nous aussi, nos supplétifs. C'est l'occasion de les voir «monter» à la surface. C'est l'occasion de savoir qui est qui! En attendant, bonne fête de l'Aïd à toutes et à tous!

Par

DJOHER AMHIS-OUKSEL (INSPECTRICE DE L'ÉDUCATION NATIONALE, ÉCRIVAINE) Pour une pratique de la lecture

On constate souvent que les enfants ne lisent pas. Il est temps de sortir du discours explicatif pour poser les vrais problèmes, tenter d'approfondir les causes pour mieux agir sur le terrain et ainsi initier des pratiques de la lecture. Un état des lieux au plan linguistique s'impose. La difficulté d'accéder à la lecture courante tient souvent à la non-maîtrise de la langue. Les acquis et les compétences de la lecture peuvent lever ce barrage. Il est nécessaire d'envisager une enquête globale pour déterminer les attentes des nouvelles générations. Il est indispensable de susciter l'intérêt pour les oeuvres authentiquement algériennes, ce qui n'exclut nullement la connaissance de productions universelles qui ont nourri de nombreuses générations et ont favorisé le développement de la pensée. L'école a un rôle primordial à jouer en s'inscrivant dans la connaissance d'ouvrages littéraires. C'est aux pédagogues qu'il revient de faire la promotion de la lecture et de provoquer le plaisir de lire. Le reste suivra: écriture, édition, créant ainsi une dynamique.
Un credo: faire lire, faire lire. La priorité: agir sur le terrain, ce qui suppose pour une génération d'enseignants une ouverture culturelle capable de saisir les enjeux immédiats de la classe et de la lecture comme vecteurs d'enrichissement de la pensée. Ainsi, la lecture ouvrira de nombreuses perspectives et aidera à forger la personnalité de l'enfant et de l'adolescent.
La lecture ne doit pas être une contrainte.
Elle est d'abord un plaisir. Dans une première étape, intégrer la bibliothèque dans les activités de classe afin d'échapper aux contraintes bureaucratiques.
Une armoire dans une classe qui sera enrichie par des dons de parents ou d'institutions et mise à la disposition des élèves maintenant ainsi un espace de liberté.
La lecture est d'abord un acte individuel non structuré qui pourra déboucher sur des activités encadrées et le moins possible contraignant. Il revient à l'enseignant d'innover pour créer une émulation au sein de la classe: un lecteur fait partager son expérience, son enthousiasme et suscite le désir, la curiosité d'aller à la découverte de l'oeuvre. Il faut habituer les élèves à percevoir le sens des mots en contexte: c'est la fonction de la lecture suivie et dirigée de développer la maîtrise de la langue et d'aider à une meilleure compréhension des textes. Cette première étape est importante: familiarité avec l'objet livre, curiosité pour le contenu, désir de varier la thématique; ainsi le livre aura une fonction incitative, ne sera plus un objet matériel mais deviendra un vecteur essentiel de réflexion critique, de culture et d'ouverture sur l'autre. La deuxième étape permet d'aborder la fonction didactique de la lecture. A ce stade, la fiche de lecture aidera à organiser les connaissances, à structurer la pensée. Ce travail est personnel: il engage l'intelligence, la réflexion, la capacité d'analyse et de synthèse. Le rôle de l'enseignant est d'orienter l'élève en lui suggérant des pistes de recherche et de provoquer un questionnement. Il faut beaucoup de passion, d'engagement, d'enthousiasme pour faire la promotion de la lecture et saisir les motivations des uns et des autres.
Ainsi, dans une démarche pédagogique, il faut éviter le dirigisme et laisser s'exprimer la créativité, mais on ne peut aller à l'aventure: apprendre à ne pas accepter pour argent comptant ce que dit le texte; apprendre à observer, à vérifier, à contrôler, à interpréter.
Les nouvelles approches de textes font une large place à l'interprétation selon les points de vue. Les activités de groupes, le brainstorming élargissent les perspectives de lecture, développent le sens de la communication: lire une oeuvre, en parler, échanger, faire preuve d'esprit critique, c'est tout cela le sens de la lecture.

Absurdité

«En politique, une absurdité n'est pas un obstacle.» Napoléon Bonaparte

Il n'y avait qu'une chose qui le gênait dans cette gare routière: c'étaient les nombreux chauffeurs de taxis clandestins qui harcelaient les passants à l'entrée principale, faisant cliqueter leurs cleés au bout de leurs doigts. «Taxi! Taxi!» criaient-ils toute la sainte journée. Le bureaucrate pensa tout de même que l'existence de ces taxis clandestins révélait la dichotomie de la société algérienne: la société légale et une société parallèle qui prenait de plus en plus d'espace devenant un énorme et injuste fait accompli que les autorités de demain, d'après-demain ou d'une autre époque dans un lointain futur, auront du mal à supprimer. Il faudrait inviter les auteurs de science-fiction à plancher sur le sujet. C'était tout de même absurde qu'il existât deux formes de rapports avec la loi: deux mondes parallèles et perpendiculaires à la fois qui coexistent au vu et au su de tout le monde. Il avait conclu que c'était une conséquence fatale de l'impéritie économique qui régnait: le chômage et la bureaucratie avaient fini par créer cette espèce de société hybride à deux faces. Et la face cachée où la corruption est plus criante gagnait du terrain. Tout ce qui était anormal la veille, devenait naturel le lendemain. Justement, tout au début du Ramadhan, il avait assisté à une scène grotesque et absurde sur l'un des trottoirs de la cité envahis par les marchands de l'informel. Un inspecteur des impôts plein d'assurance s'était présenté chez un revendeur de pain et de lait dont les casiers avaient envahi le trottoir, créant la cohue sur l'étroit passage dévolu aux chalands. Il faut décrire la scène pour se faire une idée précise de la scène: la boutique du marchand est située au carrefour des allées où fleurissait le marché informel. Des centaines de revendeurs forment deux rangées qui réduisent considérablement l'accès au marché couvert. On y vend de tout: babioles, fruits et légumes, ustensiles de cuisine, détergents. Le carrefour était toujours très animé. Un vendeur de pastèques et de melons s'était même installé sur la chaussée créant une gêne évidente aux véhicules qui formaient toujours à cet endroit un embouteillage. Donc, l'inspecteur des impôts, toujours plein d'assurance, déclinant sa profession, demanda au marchand son registre du commerce. Celui-ci le lui tendit sans façon, conscient qu'il exerçait son activité dans une complète légalité même si les conditions d'hygiène étaient loin d'être réunies: sous d'autres cieux, il lui serait interdit de vendre des produits alimentaires posés à même le sol et exposés aux poussières dans un lieu ouvert à tous vents. Il faut tout de suite rappeler que cette cité avait été construite au début des années 1980 et de ce fait, avait souffert des lacunes propres à nos urbanistes: les pénuries de pain et de lait avaient poussé certains à créer des dépôts de revente qui avaient une utilité évidente, même dans les conditions de totale absence d'hygiène. Mais, me direz-vous, c'est le dernier souci des planificateurs qui voulaient juguler à tout prix le fléau de la crise du logement. Et, certains revendeurs de pain n'avaient même pas de registre du commerce: leurs paniers étaient installés sur le trottoir, à côté de ceux qui vendaient des pâtisseries orientales dans les mêmes lamentables conditions... Mais le revendeur interpellé par le fonctionnaire des impôts disposait du document officiel qui lui permettait de pratiquer son négoce dans la plus parfaite légalité. Le jeune inspecteur parcourut le document et, avec un certain aplomb demanda au commerçant: «Combien vendez-vous de pains et de sachets de lait par jour?» Le marchand crut un instant qu'il rêvait: depuis vingt ans qu'il exerce cette activité et qu'il emploie deux jeunes, victimes de l'échec scolaire, personne ne lui avait posé cette question. Il la reçut comme une provocation, lui qui n'avait jamais songé à tenir une comptabilité et à s'embarrasser de factures dont les fournisseurs s'en passaient volontiers. Tous les rapports étaient bâtis sur la confiance qui s'exprimait oralement. Prenant tous les clients à témoin, il s'écria: «Non, je ne vous dirai pas le nombre de pains que je vends! Contentez-vous de mes déclarations annuelles! Ya aâdjaba! Vous ne voyez pas tous les trabendistes que vous avez là, sous vos yeux, et vous vous en prenez à moi... -Pour moi, ils n'existent pas. Vous, vous existez, vous avez une adresse et un numéro!», répondit froidement et calmement l'inspecteur qui remit une convocation au commerçant. Comme dit le poète, tous les deux ont raison dans ce monde absurde.

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Quel jour va «tomber» l'Aïd ?

L'attente de l'Aïd est toujours aussi stressante pour le ventre et le porte-feuille, mais, piètre consolation, il paraît que cette année, elle nous épargnera la douloureuse nuit du doute qui ne sera de ce fait qu'une formalité. On ne connaît pas les performances de cette association d'astronomie au nom aussi mystérieux que le secret de l'univers

, ni ses états de service scientifiques, mais elle aura certainement servi à quelque chose si sa certitude annoncée que l'Aïd «tombera» le mercredi 31 août est retenue, ce qui semble être une évidence pour tout le monde.

Ce n'est pas vraiment sa vocation, mais si l'association «Cirius» pouvait dans la foulée nous expliquer par quel glissement – en fait c'est de dérapage qu'il est question en l'occurrence – sémantique disent que l'Aïd va «tomber», alors qu'en fait elle arrive, puisque c'est le Ramadhan qui tombe en tirant une révérence saluée bien bas. Toujours au sujet des explications, c'est notre mère nourricière Sonatrach qui nous en doit une.

Pourquoi les responsables de notre compagnie pétrolière ont-ils fait appel à autant de «cabinets d'audit et conseils» pour seulement les «assister» dans le contrôle interne de ses structures et de celles de ses filiales ? Combien y en avait-il avant ? A partir de quel nombre de cabinets peut-on espérer réduire le nombre de scandales et à partir de quel seuil peut-on espérer en finir ?

Au registre des piètres consolations, on peut compter celle de la signature de Hassan Yebda au FC Grenade, un sombre club espagnol qui vient d'accéder en première division. C'est déjà mieux qu'Oum Salal, Lakhouia et El Djeich, les clubs émiratis qui se sont payé les «cadres» de l'équipe nationale en nous révélant que ces derniers se payaient nos têtes.

Yebda ne fait pas moins en déclarant avoir «opté» pour «un club qui me respecte», sachant que c'est la seule offre qu'il a eue, et qu'il a acceptée au pied levé, en faisant une monumentale concession salariale. Mais on n'a jamais attendu des footballeurs qu'ils nous disent tout. On n'attend d'ailleurs plus grand-chose, en dehors de l'Aïd. Et l'Aïd n'a pas vraiment besoin d'être attendu, puisqu'il arrive de toute façon. Même si on continue à dire qu'il va «tomber».

Laouari Slimane

Les talk-shows islamistes s'emparent de la politique du Printemps arabe

«Certains pensent que l'Islam n'a rien à voir avec la politique. Je défends le contraire, car l'Islam intègre la politique dans son fonctionnement.»
Talaat Romeih, rédacteur en chef du journal Al-Fateh.

Depuis le début de la révolution arabe en Égypte, plusieurs programmes ont vu le jour, d'autres se sont adaptés à la réalité de la situation politique. Et durant le Ramadhan des chaînes satellites religieuses diffusent pour la première fois des talk-shows islamiques au contenu politique. Un moyen de répondre aux laïcs et de participer à l'effervescence politique. Masr Al-Guédida sur Al-Nas, Masr Al-Horra (l'Egypte libre) sur Al-Hikma (la Sagesse), Al-Malaf (le Dossier) sur Al-Rahma (la Miséricorde), et Mizan Al-Coran (la Balance du Coran) sur Al-Hafez (le Gardien) sont autant de talk-shows diffusés pour la première fois sur les chaînes satellites religieuses.

Ces programmes sont animés par des cheikhs télégéniques, qui débattent, en présence d'invités, de l'actualité politique, économique et sociale du pays, tout en s'appuyant sur les valeurs d'un Islam modéré et tolérant. Ses talk-shows islamistes, tentent de concurrencer certaines chaînes laïques en visant un public jeune. Le premier à avoir inventé ce type de prêche télévisé est le prédicateur vedette Amr Khaled, à travers son talk-show islamique «Paroles du coeur», premier programme du genre, où il utilise les mêmes ficelles que les évangélistes américains.

Même si ses nouveaux talk-shows ne rivalisent pas avec Amr Khaled ou Qaradhaoui, ils visent tout de même à changer le paysage audiovisuel jusque-là dominé par les grandes chaînes. Dans une Égypte de l'après-Moubarak, la lutte contre le courant islamo-conservateur ne cesse de s'accentuer. Les laïcs et les libéraux ont récupéré tous les médias, y compris la presse et les talk-shows, essayant par tous les moyens de contrer le mouvement politico-religieux des Frères musulmans et des salafistes. Wessam Abdel-Warès, directeur de la chaîne salafiste Al-Hikma et animateur de l'émission Masr Al-Horra, le premier talk-show du genre diffusé après la révolution, indique que l'initiative de ses talk-shows islamiques vise d'abord, à contrecarrer l'influence des chaînes laïques, lesquelles donnent l'image d'un Islam archaïque.

Un avis partagé par le prédicateur Safwat Hégazi qui tient à rappeler aussi les appels à un État islamique, les banderoles et les slogans religieux lors du «Vendredi de l'unité» qui a témoigné de la présence d'islamistes de différentes tendances. Outre les émissions religieuses quotidiennes et les leçons sur la sunna, on diffuse des talk-shows présentés sous forme de journal hebdomadaire, où l'on évoque des sujets politico-religieux et de société qui intéressent les téléspectateurs. Durant deux heures, les sujets abordés sont commentés par des intervenants dans un studio au nouveau décor original.

Ces émissions ont toutefois suscité de vives critiques de la part d'acteurs politiques et médiatiques, qui considèrent qu'elles banalisent un courant de propagande politique sous couvert de religion. Avant le 25 janvier, le phénomène était impensable, car les chaînes satellites religieuses restaient fondamentalement apolitiques. Aujourd'hui, les islamistes profitent de la liberté pour essayer de s'emparer non seulement des tribunes des mosquées, mais aussi de celles des chaînes satellites. La plus regardée reste la chaîne Al-Hikma, laquelle avait diffusé une émission à propos du procès de la fille musulmane qui aurait été violée par un médecin chrétien.

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LE PHÉNOMÈNE BAÂZIZ EST DE RETOUR : Il remet les pendules à l'heure

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Le Cherchellois toujours en forme Le Cherchellois toujours en forme

«Je n'encourage pas les jeunes à partir car nous avons besoin d'eux ici», a affirmé Baâziz.

«Ils ont tué Matoub et Hasni mais Baâziz chante toujours». Cette petite phrase, qui continue à défier le terrorisme, est réitérée comme un hymne dans chacun des spectacles donnés par l'enfant de Cherchell, Baâziz. Ce dernier est plus que décidé à se maintenir dans le chemin qu'il s'est tracé dès le début de sa carrière, celui de la chanson engagée et défendre pleinement la patrie en usant d'un verbe cru. «C'est le style avec lequel je chante qui m'a choisi», a-t-il affirmé lors de son passage, dernièrement, dans la deuxième capitale du pays, Oran.
De son vrai nom, Bekhti Abdelaziz, Baâziz est né en 1963 à Cherchell dans la wilaya de Tipasa. Il représente actuellement, un des rares chanteurs qui continuent à composer les complaintes de liberté, s'attaquant, avec véhémence, au système de gouvernance, dénonçant toute forme d'intégrisme.
Chez Baâziz, la chanson engagée est basée sur l'usage du verbe satirique et humoristique sans toutefois verser dans un quelconque extrémisme. Sa voix, telle que reconnue par le chanteur lui-même, n'est pas trop fameuse. Baâziz n'a cessé, depuis l'entame de sa carrière, de bercer, à fortes posologies, les jeunes par son verbe passionné mais loin de toute affabulation tendancieuse ou encore violente. C'est fort probablement ce qui lui a valu une célébrité qui a dépassé les frontières de l'Algérie.
Autant de paramètres ont motivé le chanteur à passer à la défense des causes sociales, à la fois justes et nobles. «C'est une maladie héréditaire», nous a confié un de ses proches intimes. Tel père tel fils, cette maxime semble s'appliquer mot à mot au chanteur qui reconnaît avoir hérité de sa famille l'esprit revendicatif agrémenté par la réprobation des injustices d'où qu'elles viennent.
En effet, son environnement familial a été pour beaucoup dans l'inspiration contestatrice du chanteur. «Je suis issu d'une famille militante, mon père était militant du PPA (Parti du peuple algérien de Messali El Hadj devenu Mtid après la Seconde Guerre mondiale, Ndlr) tandis que ma soeur était de la gauche», a-t-il expliqué. «En décidant de prendre ma guitare, j'ai décidé de servir pacifiquement l'Algérie», a-t-il affirmé. Ses oeuvres sont toutes de revendication cassant les tabous, dénonçant la malvie, bousculant les esprits, abordant les sujets qui fâchent, revendiquant le bien-être des hommes et des femmes et même surprenant parfois. D'aucuns ne peuvent oublier de sitôt son coup d'éclat lors de l'émission Mesk Ellil transmise en direct par la télévision algérienne, et ce, en chantant le célèbre tube intitulé Waïli Waïli. En contrepartie de ses «coups de gueule, Baâziz a eu droit à tant d'interdits et de privations. Ainsi, il a été interdit de prendre part à la tournée Jil Music Live prévue du 5 au 21 juillet 2000. Mais l'artiste demeure à la fois inflexible et intransigeant dans ses positions.
«Je n'ai jamais eu peur d'interpréter la chanson engagée à Oran ou ailleurs. d'ailleurs, je n'ai jamais arrêté de le faire», a-t-il répliqué à une question relative à son show, trop chaud, qu'il a donné tout récemment à Oran dans lequel son verbe a été très aiguisé. «Seul le public me fait peur; une fois que je sens que celui-ci est satisfait, je m'en fous du reste», a-t-il affirmé d'un temps humoristique.
L'enfant de Cherchell est plus que déterminé à exprimer tout haut ce que ses concitoyens pensent tout bas. La reddition et le renoncement ne font pas partie de son dictionnaire. «Ce n'est pas à mon âge que je vais arrêter d'interpréter la chanson engagée», a-t-il indiqué. Et d'ajouter: «Je ne lâche aucune occasion de chanter pour les jeunes et mon public». Une telle déclaration renseigne sur le fait que Baâziz n'est pas près de prendre sa retraite. Mais ce qui semble peiner le plus Baâziz, est la situation précaire des artistes et les mesures prises par le département de Khalida Toumi. «Malheureusement, la politique du ministère de la Culture a presque corrompu les chanteurs en leur consacrant des salaires», a-t-il regretté. Et de là est né le renoncement de l'artiste quant à la voix et la voie contestatrices. Baâziz le dit sans ambages. «Cela ampute les libertés des artistes», a t-il déploré. «Je demande à l'artiste d'être libre», a-t-il préconisé. Sa dernière chanson intitulée Ya Babord est très controversée étant donné que celle-ci, dit-on, encourage les jeunes à braver les dents de la mer.
Baâziz se défend, bec et ongles, en prouvant le contraire. «Ça me fait mal au coeur d'apprendre que 900 cadavres algériens sont stationnés en Italie», a-t-il déploré. Et d'ajouter: «Je n'encourage pas les jeunes à partir, nous avons besoin d'eux ici».
Dans ce déluge d'audace sans frontières, le chanteur ne cache jamais son algérianité. D'ailleurs, il le démontre fièrement et fermement là ou il se produit. «Nous resterons-là, cette Algérie, qui est la nôtre, restera toujours à nous», ne cessait de répéter Baâziz du haut des grandes scènes artistiques. Baâziz est-il phénoménal? Cette prophétie, Baâziz l'a bien prédite lorsqu'il a subi les deux expulsions décidées par le régime du président tunisien déchu, Ben Ali. «Il paraît que je devenais un phénomène là-bas et cela gênait leur démocratie», a-t-il écrit dans un blog (Centerblog, diffusé le 4 décembre 2008).

«Le chanteur tunisien n'a pas été expulsé d'Algérie»
Formel et ferme dans ses déclarations, Baâziz a démenti toutes les assertions faites dernièrement par le chanteur tunisien, Bendir Man, appelé en Tunisie le Petit Baâziz. «Il ne s'est rien passé en Algérie, le chanteur tunisien, que j'ai aidé en Tunisie n'a pas été expulsé d'Algérie», a expliqué Baâziz, ajoutant: «heureusement que j'ai 20 musiciens qui sont témoins de la tournée tandis que la personne qu'il a accompagnée jusqu'à l'aéroport est là». Sur sa lancée il dira que «le chanteur n'a pas été interpellé par les officiers mais j'ignore ce qui lui est arrivé après qu'il eut quitté l'aéroport». Baâziz, met tout le monde dans le même sac et hausse le ton lorsque l'odeur du mensonge se fait sentir. «Je me suis interrogé sur les raisons de ce mensonge», s'est-il exclamé avant d'ajouter qu'«il se peut que le chanteur, qui est encore jeune, soit en quête d'une célébrité rapide, ce qui est légitime».
«De toute façon, j'ai expliqué tout ça via la radio tunisienne», a affirmé Baâziz, expliquant: «le chanteur, qui était mon invité, était sous ma protection.»