lundi 16 novembre 2009

Le foot, oui ! Les profs, non !



Par Hakim Laâlam  
Email : laalamh@yahoo.fr

Le match d’appui contre les Pharaons aura lieu mercredi à Khartoum. C’est pas juste ! Jouer l’Egypte deux fois de suite… 

… chez elle !

Ma fenêtre étant ouverte pour cause de canicule hivernale, j’entends d’ici les klaxons et les cris de joie des supporters algériens qui viennent d’apprendre la nouvelle. L’Etat généreux vient de leur offrir des billets quasiment gratuits pour le Soudan afin qu’ils aillent «afwadjan ! afwadjan !» supporter leur équipe lors du match d’appui contre les méchants et vilains Egyptiens. C’est touchant de les voir déborder soudain de tendresse reconnaissante pour leurs dirigeants subitement bien-aimés. C’est bien. C’est même très bien. Mais tout de même ! Je ne voudrais pas gâcher une si belle ambiance, étant moi-même fou de foot, seulement force est de relever ce fait vachement troublant. Dehors, peut-être même mêlés à la foule, il y a des enseignants en grève, des profs qui gueulent leur rage depuis des lustres pour que leur statut d’éducateur- mendiant soit amélioré. Et à chaque fois qu’ils rouspètent, à chaque fois qu’ils sortent manifester et qu’ils font grève, ils sont tabassés et n’ont droit qu’à une explication qui se veut économiquement censée et politiquement raisonnable : «Vous savez, on ne peut pas d’un coup de baguette magique, comme ça, en un claquement de doigts, sur simple injonction, augmenter vos salaires pour les faire tendre vers un peu de dignité, ni vous donner un statut plus conforme à votre rôle dans la société. La moindre des augmentations doit obéir à des règles très strictes, tenir compte des équilibres micro et macro-économiques. Nous devons éviter de prendre des décisions démagogiques. La gestion d’un pays, c’est autrement plus sérieux, vous savez !» Oui ! Je croyais le savoir. Jusqu’au moment présent où je découvre que les règles micro-macro-machin chose qui sont censées régenter de manière intelligente notre économie volent en éclats sur un simple coup de fil et deux ou trois injonctions. Plus de restrictions, plus de scellés sur les caisses bourrées de l’Etat. On ouvre, on y puise à pleines pelletées et allez ! Quiiiiiiiiiiii veut prendre l’avion pour Khartoum ? T’hassebkoum ! Wallah que c’est de bon cœur ! Allez ! Allez ! Tous à l’aéroport. Il vous faut juste votre passeport et une gorge prête à l’emploi. Grimpez dans l’arche de Noé. Ou plutôt dans celle d’Abdekka. Et tant pis pour les profs et pour l’école ! Je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue.

H. L. 

La mort s’habille en vert

Après une phase de déprime naturelle et une vague envie de suicide collectif suite à la défaite cairote, les Algériens se sont vite ressaisis le matin, dès l’annonce d’une offre de billets gratuits ou à tarif réduit pour le Soudan. Etant entendu qu’une victoire à Khartoum ouvre la voie à l’Afrique du Sud, toute la journée, des milliers d’Algériens ont défilé dans les rues en brandissant leur passeport vert et c’est la première fois qu’ils les brandissent autrement que pour signifier un départ définitif, la harga sans retour.

C’est la première fois que les Algériens exhibent ouvertement leur titre de voyage avec la ferme intention de revenir dans leur pays, juste après avoir tué quelques Egyptiens à Khartoum. Il faut pourtant arrêter ici toutes les tentatives de récupération patriotique de ce qui est en train de se passer.

Car ce qui est arrivé au Caire, avec la mort d’Algériens sous le regard passif de la police et de l’Etat, renvoie à l’Algérie l’image de l’Egypte, ennemie par le peuple et le football mais amie de circonstance par le régime.

Celui d’un pays autoritaire où les forces de l’ordre jouissent de l’impunité, ce qui leur a permis de laisser tuer et blesser tant d’Algériens. A ce niveau, l’Etat algérien, tout aussi antidémocratique, ne peut que pleurer les pertes humaines sans contester la nature du régime égyptien puisqu’il a le même à domicile.

Et sur son terrain, l’Algérie dépassée, l’Etat algérien n’a rien dit et son contraire, condamnant sans le faire, passant de billets gratuits à la rumeur de billets à 20 000 DA, et pour ne citer qu’Alger, ouvert une agence de 20 m2 pour accueillir une foule de milliers de personnes prêtes à aller jouer la bataille de Khartoum.

Pourquoi aller à Khartoum ? Pour mourir et venger la mort des siens, dans la grande tradition nationale. Pourquoi pas ? Cela fait déjà un mois que ce n’est déjà plus du football.

Par Chawki Amari

De quelle fraternité parle-t-on ?

Les rumeurs les plus folles ont circulé, hier, à travers toute l’Algérie. Tout le monde parle d’un scénario catastrophe. Mais une chose est certaine : il y a eu violence et le sang algérien a coulé au Caire. Et c’est dans la capitale d’un pays, que les autorités du pays continuent à qualifier de «frère», que les Algériens, venus normalement en invités, sont agressés. Les supporters qui ne cherchaient en fait que de la joie ont eu comme seule réponse des jets de pierres et des coups de poing.

Quel désastre !! Quel gâchis ! En fait, cela n’est absolument pas nouveau, même si le propos peut paraître un peu dur ou parfois déplacé. Car, à y regarder de près, cette violence ne peut jamais être le fait de groupuscules isolés, déchaînés. Jamais cela ne peut être un acte spontané. Jamais cela ne serait survenu s’il n’y avait pas la bénédiction des autorités égyptiennes. Et la preuve de cela est simple à vérifier : le président de la Fédération égyptienne de football, Samir Zaher, a franchi le Rubicon jusqu’à affirmer que ce sont les joueurs algériens qui ont orchestré l’attaque éhontée de jeudi soir contre le bus qui les transportait de l’aéroport du Caire à l’hôtel.

Quelle hérésie ! Quelle insolence !! Cela est simplement stupide, et il n’y a qu’à voir la tête bandée de Lemouchia, celle de Rafik Halliche ou la main blessée de Rafik Saïfi pour démentir le délire du dirigeant égyptien. Honteuse est encore cette image de policiers cairotes qui, au lieu de protéger les supporters et les joueurs, ont agressé des journalistes algériens après la fin de la rencontre. La seule conclusion qu’il faut tirer de ces jours de tension extrême est donc que le traquenard de jeudi et l’agression de samedi soir ont été tout simplement prémédités. Pas par les supporters, dont l’émotion peut, certes, conduire à des escarmouches, mais par des responsables d’un pays en mal dans leur peau.

Des dirigeants qui n’ont rien à vendre à leur peuple que la victoire d’un match de football, qui ne doit pas, en principe, dépasser le cadre d’une simple rencontre sportive. Sans plus. Et le sang des Algériens est apparemment la voie la plus facile pour Moubarek pour placer sans fils sur les rails de la présidence égyptienne qui s’approche.Face à cela, les jeunes Algériens ont montré, hier, leur sportivité en scandant des slogans de soutien à leur équipe malgré la défaite de samedi soir. Ces supporters, jeunes dans leur grande majorité, ne sont pas des va-t-en-guerre. Bien au contraire. Même si, il faut l’avouer, ils ont le droit de s’interroger, toujours dans le calme, sur les raisons de la frilosité des autorités de leur pays.

Que diront, en fait, les autorités égyptiennes si leurs concitoyens étaient agressés chez nous ? Ils vont certainement monter au créneau, pour ne pas dire plus. Pendant que des Algériens se font massacrer au Caire, les responsables de l’Etat, dans l’incapacité de se mettre au diapason de cette jeunesse en soif de joie, font preuve d’un mutisme pour le moins étonnant. S’il est vrai que la diplomatie a ses voies et son langage, il n’en demeure pas moins que de tels comportements appellent une position et une réaction fermes.

Une attitude que n’a pas su, malheureusement encore, afficher la Fédération internationale de football qui, malgré l’agression caractérisée à l’encontre du onze national, n’a pris aucune décision, si ce n’est le timide avertissement de jeudi dernier. Mais, en attendant, les Fennecs auront largement le temps de montrer autre chose sur le terrain à Khartoum mercredi prochain. Mais cela est une autre histoire.

Par Ali Boukhlef

Entre minbar et banc de touche

Je m'imagine la déception des millions d'Algériens après la défaite inattendue de l'EN au Caire. Si l'Algérie a perdu, ce n'est pas parce que Dieu a fait la passe décisive à l'équipe égyptienne, championne de la prosternation tous azimuts. Sur le plan de la dévotion, nous faisons désormais jeu égal avec nos adversaires, au point de semer la confusion dans la comptabilité céleste. Seulement, nous ne sommes pas de force à lutter contre les Egyptiens sur ce terrain-là.

Voyez le succès du «flyer» représentant le joueur vedette Zidane, mains tendues et implorantes vers le ciel, avec cette invocation «ya Rab», qui n'a pas nécessairement la même signification chez nous. C'est ainsi que l'on met la providence et les prieurs de son côté. Franchement, les enfants, n'essayez pas de rivaliser avec les «sadjidines» sur le plan de la prosternation. «Forts alikoum bezzef», trop forts pour vous, même si votre piété surpasse, au fond, la leur et qu'elle résiste mieux aux tentations qui les taraudent dans leurs hôtels. Et puis, vous avez cet entraîneur, malencontreusement appelé «Cheikh». Il oublie souvent qu'il a été appelé pour mener nos joueurs à la victoire et non pas pour diriger les prières du haut de son minbar.

Combien Saâdane a-t-il reçu d'avertissements pour s'être hasardé trop près du terrain de jeu ? Je vais vous le dire, aucun. Parce que l'entraîneur national est littéralement rivé à son banc, ne bougeant même pas pour se dégourdir les jambes. Shehata, l'Egyptien, se démenait comme un beau diable, dans les derniers moments du match, pour haranguer ses joueurs. Il a peut-être moins de sens tactique, moins de roublardise que Saâdane, aux dires de nos commentateurs sportifs, mais il a de la présence. Et c'est ce qui a payé ce samedi au stade du Caire, alors que les Egyptiens y croyaient encore et que certains joueurs algériens avaient déjà un pied en dehors du terrain. Il y a des moments comme celui-là où les échafaudages élaborés en laboratoire et à l'entraînement ne suffisent pas.

On s'en aperçoit aisément en revoyant ces temps morts, généreusement accordés par l'arbitre sud-africain, désormais surnommé «Monsieur six minutes». Il fallait, il faut donc tenir compte de ces impondérables et, surtout, comprendre pourquoi nos joueurs si doués et si talentueux s'effondrent souvent en fin de match. Récapitulons une fois : les Egyptiens savent solliciter le ciel mieux que nous, et ils proclament ouvertement que leurs joueurs et leur peuple sont des monuments de piété.

Ce qui n'est pas notre cas, a contrario, même s'ils rappellent in fine que nous sommes «frères par le sang et par le religion». Car dans ce cas, faut-il le rappeler, les Coptes d'Egypte et les trente-cinq protestants d'Assi-Youssef comptent pour du beurre. Sur le terrain, l'entraîneur de l'Egypte, Shehata , communique mieux et a plus de contact avec ses joueurs. Ce que ne fait pas le «Cheikh» Saâdane, à notre connaissance, à moins que ses joueurs soient nantis d'oreillettes ultras discrètes. Il est certain, toutefois, que les Algériens sont individuellement plus forts que leurs adversaires égyptiens, mais si on reconduit le schéma du Caire, ce ne sera pas facile à Khartoum.

On peut se demander, au demeurant, pourquoi la Fifa a choisi Khartoum comme «terrain neutre». Il faudra compter avec l'improbable neutralité du public, géographiquement et historiquement plus proche de l'Egypte que de l'Algérie. Car même si Omar Al-Béchir, président du Soudan, est l'ami de Bouteflika, aux dires des fervents supporters de la tyrannie, il est encore plus l'ami de Hosni Moubarek. Or, ce dernier a beaucoup plus à perdre en cas d'élimination de l'Egypte. Au passage, j'ai particulièrement apprécié samedi soir le trait d'ironie de l'ancien international Chabane Merezkane à propos du Soudan. «Oui, je sais que le Soudan est un pays frère, a-t-il dit, mais à force de jouer dans les pays frères, l'équipe nationale va être décimée».

Dans le climat d'euphorie qui suivrait une éventuelle qualification de son pays au Mondial, Moubarek pourrait faire passer plus facilement son projet de hisser son fils Djamel sur le trône d'Egypte. Ce qui n'est pas le cas de notre président qui ne pense, lui, qu'à bien finir son mandat actuel et à se préparer pour un cinquième si tout va bien. En attendant, une participation algérienne à une phase finale de Coupe du monde, ça vous redore le blason et ça coupe, pour un moment, l'envie de déclencher des émeutes. Car, après les harraga, l'engeance que craignent le plus nos gouvernants, c'est celle des émeutiers. Cette variété qui n'a pas le pied marin se manifeste trop souvent dans les grands centres urbains et sous les projecteurs des télévisions étrangères.

Cela dit, la Fifa a eu tort de faire jouer quand même le match, en dépit des graves incidents de jeudi dernier. Il faut noter aussi que les protestations du gouvernement algérien ont été un peu faiblardes et n'ont pas donné l'impression d'un pays désireux d'aller jusqu'au bout. Ce qu'ils auraient dû faire, au moins pour la forme, à partir du moment où la duplicité des autorités égyptiennes a été démontrée. Quelques rappels : jeudi, en début de soirée, le quotidien Al- Ahramet l'hebdomadaire Alyawm Essabaamettent en doute la réalité de l'agression dans leurs éditions électroniques.

Ils affirment, citant des sources non identifiées, que ce sont les joueurs algériens eux-mêmes qui ont saccagé le bus qui les transportait. L'hebdomadaire met en ligne plusieurs articles dénonçant le "complot" algérien. Dès le lendemain matin, la thèse prend forme et elle est officialisée par les autorités policières. Selon cette thèse, alors que l'autobus se dirigeait tranquillement vers l'hôtel, les joueurs algériens se sont mis à briser les vitres et le pare-brise du bus avec des extincteurs. C'est en tentant de saccager le véhicule que quelques joueurs se sont blessés. Témoin providentiel et héros improvisé, le chauffeur du bus, Egyptien bien sûr, a réagi en bon patriote soucieux de protéger les bus de son pays. Le conducteur a donc lâché son volant pour aller se colleter avec les joueurs algériens et les empêcher de continuer à saccager le bus qui continuait à rouler. Car ce bus est muni, semble-t-il, d'un système de pilotage automatique comme les avions.

C'est du moins la conclusion des journalistes présents à la suite de ce récit rocambolesque. La télévision égyptienne va s'emparer, évidemment, de cette thèse et elle diffusera même un montage vidéo, dans lequel elle reprend sans vergogne des images filmées à l'intérieur du bus par Rafik Saïfi lui-même. Heureusement que cette vidéo, qui prouve la réalité de l'agression, avait été diffusée déjà sur la Toile bien avant son exploitation honteuse par la télévision égyptienne. On peut relever que le Festival international du cinéma du Caire se tenait à quelques encablures de là, ce qui a peut-être inspiré les affabulations égyptiennes. Arrive, enfin, le témoignage incontestable et incontesté du délégué de la Fifa qui met à terre L'invraisemblable scénario élaboré par la police, fignolé par les médias, et accepté par toute l'Egypte comme vérité d'Evangile, pardon du Coran.

En dépit de tout ceci, les aveux implicites des Egyptiens euxm-êmes et le rapport accablant de son délégué, la Fifa a maintenu la rencontre. Sur les sites Internet, pendant ce temps, les supporters égyptiens ont continué à accuser les Algériens d'avoir simulé l'agression. Emporté par son patriotisme, un Egyptien a lancé : «Arrêtez de parler de pays frères, nous sommes l'Egypte des Pharaons et eux, c'est l'Algérie des Amazighs». Si seulement on avait su ça auparavant, on se serait sûrement épargné toutes ces émotions et toutes ces rancœurs, mes bien chers frères.

Par Ahmed HALLI

Système, performance et mérite

L’équipe nationale de football ayant décidé de prolonger le suspense, c’est dans le noir que les enseignants devront continuer leur mouvement de protestation. Avec juste la lueur du discours du président à Sétif promettant une réhabilitation de l’enseignement universitaire et de la recherche. Une réhabilitation strictement salariale, en attendant la réhabilitation politique.

La bonne nouvelle est quelque peu altérée par ceci : le Président trouve que l’Université algérienne va bien et ne mérite pas son mauvais classement international. La preuve en serait que des universités américaines recrutent des étudiants nationaux. L’envol de quelques hirondelles serait une preuve de la qualité de notre production universitaire, pas la production elle-même, mesurable à la contribution de l’université au développement scientifique, économique, technique, culturel et humain de la société.

Le Président s’étant engagé à aligner les salaires des chercheurs sur ceux de leurs homologues étrangers, l’université, ainsi déclarée performante, n’a plus qu’à attendre la récompense sociale qu’elle mérite. Si l’effort et le mérite venaient à s’imposer comme valeurs nationales, ils inaugureraient une véritable révolution philosophique dans le système algérien. Car pourquoi son application s’arrêterait en si bon chemin, là où elle va commencer, à l’université ? On ne pourra plus acheter un siège de sénateur, par exemple ; il faudrait le gagner.

Car, enfin, d’où vient le mal national si ce n’est de la primauté de l’allégeance sur le mérite ?

C’est là que le piège se referme sur la volonté politique, même quand elle serait sincère : un système politique basé sur le pouvoir de cooptation peut-il mettre en pratique une gouvernance qui privilégie l’aptitude et la vertu ?

Non, car cela reviendrait à se faire hara-kiri. Car la promotion de la compétence et de l’engagement implique la mise en place de conditions de libre compétition des aptitudes nationales. Autrement, pourquoi un ministre ou un député qui n’a pas de dispositions particulières à faire valoir se transformerait en défenseur du mérite dans son secteur ou sa circonscription ? On ne connaît pas encore de meilleur mode de sélection que de mettre les protagonistes en compétition, selon des critères objectifs et dans des conditions de transparence.

Or, il n’en est pas encore question. Sauf à vouloir transformer une élite universitaire en une espèce d’équipe nationale de la recherche, bien payée pour représenter le pays dans le système universel d’émulation scientifique ou culturel. Une équipe nationale de chirurgiens, une autre de physiciens, etc. qui animerait les occasions solennelles, comme le feraient de bon chanteurs à l’occasion des festivals institutionnels, et comme le feraient de bons écrivains de salon.

Le mérite, ce serait la fin des monopoles du pouvoir : celui du contrôle des élections qui décident des dirigeants à élire, celui de communication qui décide de qui doit parler, celui de l’allocation des ressources qui décide de celui et de ce qui doit être financé, de celui de la publicité qui décide des journaux qui doivent survivre. Le problème est là : l’autoritarisme est nécessairement promoteur de médiocrité ; au mieux, il peut monter des troupes d’élite gavées pour la représentation. La liberté seule est productrice de performance.

Par : Mustapha Hammouche

Si près du Caire, si loin de son enfer

Le pays entier se relève difficilement d'une gueule de bois dont il aurait aimé d'autres arômes et d'autres couleurs, mais bon. Les Algériens auraient aimé la belle sérénité des lendemains de victoires fêtées dans l'agitation et dans l'excès, mais ils savent aimer ce qu'ils ont quand ils n'ont pas ce qu'ils aiment.

A commencer par cet espoir – tout le monde vous dira qu'il est intact – de se qualifier en Coupe du monde en allant chercher une victoire à Khartoum, la capitale soudanaise. Les Algériens savent aussi qu'il y a autant de leçons à tirer dans la liesse partagée que dans les élans de solidarité éphémère que procure la détresse commune.

Hier, les visages étaient blêmes de désillusion et de manque de sommeil, mais paradoxalement, le teint blafard et les regards absents renvoyaient plus de détermination que de résignation. Non, ce n'est pas l'éternel recommencement. Le rêve est encore là. S'y mêlent encore une multitude de regrets tenaces et quelques remises en cause apaisées, se profilent à l'horizon d'autres façons d'envisager la passion du foot et d'autres regards sur l'adversaire, mais le fait est que toutes les raisons d'encore rêver sont là.

Peut-être encore un peu trop proche du Cairo Stadium mais tout de même à distance respectable de son enfer. Timidement, mais avec beaucoup de promesses, les rues d'Alger ont esquissé l'ultime mi-temps sur les sentiers sud-africains pour un avertissement solennel : le ventre de la passion est encore fertile de générosité dans l'effort.

Et pour l'une des rares fois sans doute, les voix entonnent le refrain de l'essentiel : gagner pour aller en Coupe du monde et, cerise sur le gâteau, laver dans l'apaisement sportif l'affront vécu sur un terrain qui ne l'a pas été. Hier, dans les mines défaites et les regards hagards, il n'y avait pas de haine, seulement l'assurance de femmes et d'hommes convaincus d'avoir été injustement privés d'une victoire par des chemins détournés.

Déçus mais presque heureux d'aller récupérer «ça» au bout d'un parcours qui aurait pu être moins lu et surtout moins violent. L'«essentiel» a commencé hier très tôt. Le voyage pour Khartoum, ses visas, ses billets d'avion et ses tickets de stade. Le reste inchangé.
Les cortèges se font de plus en plus nombreux et de plus en plus bruyants. Plus que deux jours.

C'est trop court et trop long, mais la bande à Saâdane est déjà confortablement installée pour récupérer de sa généreuse débauche d'énergie et de son enfer, si près de la capitale soudanaise. Mercredi, sur la pelouse, à l'abri des pierres et des vociférations haineuses, sera un autre jour.

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Slimane Laouari

Revenons à nos moutons

Notre bonne vieille cité, que je déteste (entre nous soit dit, de bon coeur) pour plusieurs raisons, avait commencé à changer de visage, comme chaque année à l’approche de l’Aïd El Adha: les carrés d’espaces verts imaginés par les urbanistes du dimanche et coûteusement entretenus par une municipalité invisible, étaient envahis par des troupeaux de moutons.

Les bêtes destinées au Sacrifice prochain avaient, en quelques heures, tondu l’herbe rare qui avait eu la mauvaise idée de pousser après les maigres pluies tombées dernièrement. Et c’est sur une terre battue, jonchée de sachets et de bouteilles en plastique, que les moutons se pressaient les uns contre les autres pour échapper aux harcèlements des nombreux gamins qui montraient leur curiosité avec la vivacité propre aux enfants.

De loin, les vieux retraités, le regard éteint, se lamentaient du prix exorbitant, affiché cette année, de la gent encornée et ils déploraient un peu plus l’absence de mesures gouvernementales pour freiner le prix de la viande qui, à la veille de chaque Ramadhan ou au lendemain de chaque Aïd, se propulsait un peu plus aux cimes de la mercuriale, entraînant avec elle tous les légumes qui lui sont associés.

Mais le fatalisme habituel a vite pris le dessus chez les vieux qui savaient que cet Aïd pouvait être le dernier pour certains d’entre eux et que de toute façon, il fallait se plier à l’exigence dictatoriale des petits-enfants qui demandaient à choisir eux-mêmes le jouet vivant pour meubler la monotonie des jours.

Les enfants se pressaient de plus en plus nombreux, formant un carré autour des bêtes. Il faut dire que la grève des enseignants les avait libérés. Ils pouvaient ainsi donner libre cours à leurs penchants.
Les plus hardis d’entre eux s’approchaient des béliers les mieux encornés, leur flattaient le flanc ou le museau ou les excitaient pour les voir s’affronter dans les duels sonores où le choc sourd des cornes était répercuté par des vivats d’encouragement.

Des ménagères hardies étaient même venues avec des enfants en bas âge pour sentir l’odeur de la laine qui est un avant-goût des fumets de l’Aïd. Elles s’enhardissaient, mues par une tradition séculaire, à pousser leurs mioches vers les clôtures affaissées derrière lesquelles le troupeau languissait. Et tout cela sous l’oeil vigilant de la vieille grand-mère qui menait elle aussi, à sa manière, sa petite tribu.

Un enfant avait eu même la brillante idée de poser un drapeau sur le dos du plus imposant bélier, celui qui avait imposé sa loi au reste du troupeau.

Et cela avait provoqué un regain d’enthousiasme chez les jeunes écoliers ravis, pendant leur école buissonnière, forcés à suivre les péripéties des ovins sur les pâturages improvisés de la cité et de répéter à l’envi les échos relatifs à l’Equipe nationale en Italie ou en Egypte.
Seuls les pères de famille, tirés par la manche par leur dernier rejeton, se montraient rétifs à s’approcher: le mouton était devenu trop cher et la tripartite arriverait de toute façon trop tard.

Il vaut mieux attendre la veille de l’Aïd pour se décider à acheter. Peut-être qu’il y aurait un peu plus de rahma chez les maquignons. Qui sait?

Selim M’SILI

Dream TV, Modern Sport et Hayat TV, créent un front contre l’Algérie

«Puisque la haine ne cessera jamais avec la haine, la haine cessera avec l’amour.»
Bouddha "Extrait de Suttapitaka Dighanikaya"

Alors que le monde entier découvrait la barbarie des supporters égyptiens, un front des télévisions égyptiennes s’est constitué, regroupant les extrémistes du monde audiovisuel égyptien: Dream TV, Modern sport et Hayat TV. Toutes les vedettes et animateurs de ces trois télévisions étaient rassemblés sur le même plateau de télévision orné des couleurs noir et rouge. Ainsi, on pouvait retrouver Mustapha Abdou de Dream TV qui n’a pas cessé, durant deux semaines, à insulter l’Algérie et tous ses symboles, Medhat Chalabi de Modern Sport, mais aussi Ahmed Choubaïr, le soi-disant ami des Algériens et présentateur vedette de Hayat TV, nouvelle chaîne égyptienne également.

Ce front des télévisions égyptiennes, nouvellement créé depuis 2003 et visiblement en panne de sensation, ne s’est pas rassemblé pour une campagne contre la violence dans les stades, contre le sida dans les pays arabes, ni contre la faim et la misère en Egypte, mais bien pour insulter encore et toujours l’Algérie. La soirée fut festive, puisque l’Egypte a gagné et avait droit à la fête, mais à travers les nombreuses interventions des joueurs et des artistes, notamment le comédien Ahmed Saka, des insultes fusaient contre la délégation algérienne et ses joueurs.

Alors qu’au même moment sur Nile Sport et la chaîne publique Al Masrya, on se contentait de commenter les faits et saluer sportivement la victoire des Pharaons sans pyramides. Cette attitude belliqueuse de ce trio de télévisions égyptiennes a fait réagir les autorités audiovisuelle arabes par le bais de l’Union des télévisions arabes, qui a demandé l’arrêt de la diffusion de ces trois chaînes égyptiennes qui alimentent la haine et la discrimination entre les Arabes et plus particulièrement contre l’Algérie. Alors que la soirée se poursuivait avec une haine et des moqueries contre la délégation nationale, l’EN est bloquée au stade et les supporters algériens sont attaqués jusque dans leur bus.

Les Egyptiens, qui ont pourtant remporté le match, ne se sont pas contentés de défiler seulement, mais de poursuivre les Algériens dans les rues et sur les plateaux des télévisions. Au même moment, les techniciens algériens et les anciens joueurs, invités sur les plateaux sobres de l’Entv et de Canal Algérie, se sont contentés de commenter les erreurs techniques de Saâdane. Il faut dire que les joueurs qui ont vécu l’enfer du Caire n’étaient pas conviés à cette soirée. Ainsi, Belloumi le symbole de la haine des Egyptiens contre les joueurs algériens n’a pas été invité sur les plateaux de la Télévision algérienne.

Et c’est une petite chaîne maghrébine, Nesma TV, qui l’a accueilli avec faste à Tunis et a annoncé l’émission à coups de placards publicitaires durant plusieurs jours dans la presse algérienne. Mais l’émission qui a été enregistrée mercredi, soit 24h avant les incidents du Caire, était déconnectée du sujet avec sa triste réalité et la tension qui était perceptible avant le match.

Quoi qu’il en soit, cet épisode du Caire a démontré une nouvelle fois le retard de notre pays dans le domaine de l’audiovisuel et de la communication. Même si on ne doit pas allumer la mèche, on devait néanmoins, préparer les explosifs pour répondre image par image aux provocations et insultes des Pharaons sans pyramides

Amira SOLTANE

Redéfinir n'est pas gagner

Il n'y a pas que les filles Obama qui attendent avec impatience le retour de leur père d'Asie. Ses adversaires républicains vont eux aussi se bousculer à sa descente d'avion. S'empresseront-ils de lui reprocher le fait d'avoir élargi une réunion au sommet de l'Apec aux dirigeants birmans, la nouvelle doctrine de l'«engagement pragmatique» US envers la junte militaire ne peut être la bonne approche aux yeux de ses contradicteurs ? 

Ceux-là tâcheront de le lui rappeler. Mais pas avant d’avoir tiré au clair l'affaire afghane, des semaines qu'ils attendent la nouvelle option stratégique des démocrates. Le président Obama peut continuer d'inspirer les artistes et les commerçants chinois chez eux, à Washington, l'heure n'est plus au badigeonnage à l'huile. En clair, il ne suffit pas d'annoncer qu'une décision sur l'Afghanistan est toute proche pour calmer les ardeurs des républicains qui veulent pas moins que de la clarté dans les propos du président.

Et surtout des actions rapides, signifier aux Afghans qui doivent se défendre eux-mêmes est trop vague comme concept sécuritaire pour être pris au sérieux par les éléphants du parti républicain. A se demander s'il existe une seule et bonne qualité chez Barak Obama ?
Il arrive à ses ennemis politiques d'en détecter.

Quand, par exemple, il n'hésite pas une seconde à reconduire les sanctions américaines contre la République islamique d'Iran et à adresser à partir de Singapour un avertissement clair aux mollahs, en compagnie du président russe, Dmitri Medvedev. Sauf qu'une pareille qualité de «franc-parleur», selon la grille de notation des républicains, peut être revue à la baisse quand le locataire du bureau ovale s'amuse à brandir le bâton et la carotte devant le régime de Khartoum. Face au non-respect des droits de l'homme au Darfour et la famine qui revient au Sud-Soudan, il n'y aurait même plus de place pour que le président d'Obama puisse glisser sa main tendue.

C'est cette même attitude radicale que les républicains espèrent voir se renforcer chez lui. Une sorte de chemin initiatique vers une «fauconisation» qu'ils cherchent à imposer au démocrate en chef. Mais aucune des campagnes d'acharnement contre sa personne n'ont eu jusque-là raison de sa constance.

Très attendue, la redéfinition de la stratégie militaire US en Afghanistan se présente ainsi comme la meilleure occasion pour mettre le président Obama en réelle difficulté. D'autant que les pressions exercées sur le gouvernement Karzaï, l'envoi de troupes en renfort et l'acheminement de meilleurs équipements ne permettraient pas à la coalition de remporter une victoire nette sur le mouvement taliban.

Manquera toujours l'adhésion de l'opinion publique afghane qui peine à se défaire de l'idée de l'occupation et à accepter celle de la libération.

Moins encore celle de la démocratisation qui a été malmenée par les fraudes massives lors du premier tour de l'élection présidentielle afghane. Ce qui n'a pas empêché Hamid Karzaï de rester le roi de Kaboul. Et si avec toutes ces prises en compte, la nouvelle stratégie de sortie de crise en Afghanistan venait à échouer ? Se retournera-t-il volontiers vers les républicains pour leur rafraîchir la mémoire : si l'Amérique continue de s'enfoncer dans le bourbier afghan c'est tout de même à cause d'eux ? A défaut de crier victoire, ils crieront au loup qui se dérobe derrière la bergerie.

Par Anis Djaad

Hagrouna !

Devant les soldats marocains qui franchirent belliqueusement en 1963 la frontière algérienne, Ben Bella, le premier président de la République, eut ce cri chargé d’une forte intensité patriotique : hagrouna ! (On nous a agressés). Il n’en fallut pas plus aux Algériens qui venaient à peine de sortir de la nuit coloniale pour se rendre, par milliers, aux frontières défendre, mains nues, leur sol convoité.

Aujourd’hui, une hogra d’un autre type est venue d’un pays présenté comme ami depuis toujours par l’idéologie baâssiste, l’Egypte, où un odieux guet-apens a été tendu à l’équipe algérienne de football. Manigancé en haut lieu, au Caire, le plan machiavélique visait à fragiliser et faire perdre le match aux joueurs algériens, et c’est ce qui arriva. Ne s’arrêtant pas en si bon chemin, les Egyptiens s’en prirent aux supporters algériens, à la sortie du stade, faisant des blessés graves.

Un véritable massacre au vu et au su des autorités officielles qui renièrent l’engagement pris devant la FIFA d’assurer la sécurité de la compétition – cette même FIFA qui n’a pas assumé toutes ses responsabilités –, ce fut fait avec la complicité des énormes et redoutables médias égyptiens.

Le pouvoir du Caire ne recula pas devant le sang versé pour assouvir un dessein politique : détourner l’attention de sa population des hallucinants problèmes qu’elle rencontre en matière d’emploi, de niveau de vie, de logements, etc.

Hier, le président de la République a bien réagi en mettant à disposition des supporters les moyens d’aller à Khartoum soutenir leur équipe. Mais force est de constater que devant cette douloureuse épreuve, la riposte des autorités algériennes n’a pas été du niveau des attentes.

Au moment de l’agression du bus de l’équipe nationale, le discours sur « la fraternité arabe », dans le pur style langue de bois du parti unique, a été mis en avant par certains responsables. La réelle fraternité ne peut venir que de gens du même drapeau. En parlant « d’acte isolé » à la suite de l’attaque des joueurs, un ministre emboîta le pas à son ex-confrère d’il y a vingt ans qui compara la révolte d’Octobre 1988 à un « chahut de gamins ».

Et puis il y eut ce monumental ratage de l’ENTV qui, une nouvelle fois, a failli à son devoir d’informer en ne diffusant que bien après les images des footballeurs blessés, une fois achevé le discours du chef de l’Etat tenu à l’université de Sétif. Cette épreuve a révélé le vrai visage du pouvoir égyptien qui a tendance à mépriser tous les autres pays arabes, mais qui se fait fort de s’incliner avec la plus vile obséquiosité devant Israël.

Elle a mis à nu en Algérie la frilosité de ses hommes politiques, bloqués par un certain complexe d’infériorité vis-à-vis de l’Egypte et surtout tétanisés par le discours panarabiste en vogue depuis des décennies. Cette épreuve a enfin révélé, une nouvelle fois, tous les dangers que comporte le sous-développement médiatique algérien, notamment au niveau de l’audiovisuel maintenu sous forte dépendance politique.

Il faudra s’en occuper un jour, une fois revenu le calme, car le pouvoir algérien ne peut pas toujours se dérober aux débats fondamentaux. Du sang algérien a coulé et puis n’importe quel autre pays pourrait être tenté de suivre l’exemple égyptien pour humilier ou agresser l’Algérie, mettant à profit les faiblesses du pouvoir politique et le désarroi de la société.

Par Ali Bahmane

Le défaitisme ? Ce n'est pas algérien !

Partis disputer un match de football contre l'équipe d'un pays qualifié de "frère", les Fennecs se sont fait caillasser avant et après la rencontre. Au Caire, on était peut-être parti de l'adage "qui aime bien châtie bien" ? Sauf que dans notre glorieuse Algérie, les gens exècrent la hogra.

Surtout lorsqu'elle provient d'un pays qui perd lamentablement la notion de l'aman et va jusqu'à violenter froidement ses hôtes dans des traquenards traîtreusement préparés alors qu'il se coupe en quatre pour garantir une sécurité totale à Israël, son partenaire tueur d'enfants palestiniens. En réalité, Le Caire se trouve désormais plus proche d'Israël que des masses arabes.

Quatre bus de supporters algériens s'étaient fait attaquer à la fin du match, à hauteur d'un barrage… abandonné, alors que les brigades antiémeutes se trouvaient à peine à quelques dizaines de mètres de là. Des lâchetés qui, loin d'atteindre le moral algérien, le galvanisent plutôt.

Au point que des chaînes humaines interminables se formaient hier devant les agences de voyages, chacun espérant décrocher le billet pour Khartoum. Une mobilisation massive, tout à fait spontanée qui rappelle celle qui eut lieu en 1963 lors de l'ignoble agression marocaine de Tindouf. Une mobilisation qui a tendance à s'éloigner, malheureusement, du cadre strictement sportif.

Comment pourrait-il en être autrement alors qu'il y a eu au moins une vingtaine de blessés - dont trois se trouvaient encore hospitalisés hier après-midi - parmi les Algériens partis au Caire, non pas pour faire la guerre, mais juste pour supporter leur équipe ? Ils s'étaient fait lâchement attaquer sur les grandes artères du Caire où pratiquement rien ne bouge d'habitude sous la loupe des services de sécurité.

Plus grave, une information de source aéronautique non confirmée officiellement faisait hier état du rapatriement de plusieurs cercueils du Caire alors que, pour leur part, les médias publics n'avaient encore fait état ni des blessés, ni de leur nombre, encore moins de morts éventuels. Quoi qu'il en soit, la sauvagerie cairote ne semble pas intimider les Algériens qui iront confiants chez Omar El-Bachir, sachant que les Soudanais savent apprécier chacun à sa… juste valeur.

Par Mohamed Zaâf

Manque de pot, Farouk!

Voilà un dégourdi de commerçant ambulant qui se fait avoir en achetant (sans avoir payé) une marchandise que les "propriétaires" avaient pris soin de laisser à ses côtés...

L’article 387 du Code pénal évoque le recel en tant que délit réprimé, or les magistrats du siège ont pour devise: «Sans les receleurs, les voleurs ne peuvent écouler leurs butins mal acquis.»

Il est vrai aussi qu’une peine de un an au moins et cinq ans au plus, et une amende de cinq cents à vingt mille dinars sont infligées à quiconque, sciemment, recèle, tout ou partie des choses enlevées, détournées ou obtenues à l’aide d’un crime ou d’un délit.
Le même article prévoit que l’amende peut être élevée au-delà des vingt mille dinars, jusqu’à la moitié de la valeur des objets recelés.

Le troisième alinéa prévoit que le coupable, peut, en outre, être frappé «pour un an au moins et cinq ans au plus, de l’interdiction d’un ou de plusieurs des droits mentionnés à l’article 14 du présent Code». Le dernier alinéa de l’article 387 va dans le sens du «tout sans préjudice de plus fortes peines, s’il y échet, en cas de complicité de crime, conformément aux articles 42, 43, et 44».

Devant son avocat Maître M’hamed Chemlel, Farouk trente-sept ans explique difficilement face à Hadj Barik, le juge de Koléa de la cour de Blida, que ses achats, se sont fait, en droite ligne d’un vrai commerçant habitué aux transactions: «J’ai acquis ces objets et petites machines auprès de revendeurs dont j’ai eu l’occasion d’apprécier leur sens du commerce et de leur honnêteté.

Le comble, je n’avais même pas payé cette marchandise car ils m’ont demandé de surveiller leur marchandise le temps qu’ils reviennent.

J’ai alors commencé à me poser des questions. J’étais troublé. Si j’avais deviné le piège, j’aurais tout laissé tomber...», a-t-il dit. La police arrive et au moment où ce Farouk était en plein questionnement, la catastrophe tombe. «Ladite marchandise était volée, moi, le crédule, n’avais pas deviné la...fuite des revendeurs voleurs.»

«Ok, dit le président, vous ne vous êtes pas posé de questions autour des prix proposés?» «Non, pas du tout. Et c’est là où j’ai commis l’erreur. Les prix proposés allaient dans le sens de la qualité de la marchandise. J’avais certes, donné mes prix pour tenter de gagner un peu, mais rien ne laissait prévoir le délit.»

Et comme pour gagner plus de...temps, Hadj Barik invite Samir Hamel le procureur à requérir. Ce que va faire le représentant du ministère public en demandant une peine de prison ferme de six mois et une amende de dix mille dinars.

Prenant à coeur sa tâche, Maître Chemlel entre de front dans le mur de la réalité. «Nous n’allons pas faire un dessin. Si effectivement Farouk avait l’intention de jouer au receleur, il aurait loué un fourgon et aurait quitté le plus vite possible les lieux du délit.

La vérité est que les voleurs avaient senti le vent contraire souffler. Ils ont préféré prendre le large, laissant l’inculpé se débattre comme il l’a fait ce dimanche», a balancé Maître Chemlel qui sera heureux du verdict qui aura été: la relaxe au bénéfice du doute.

Abdellatif TOUALBIA

Chers «frères» arabes d’Égypte

Maintenant que les masques sont tombés, chers «frères» arabes d’Egypte, les oripeaux de l’arabité ne suffisent plus pour couvrir votre haine, votre opprobre. Nous vous disons «Bravo âalikoum» pour l’accueil que vous avez daigné réserver à nos joueurs et à nos supporters chez vous au Caire. Bravo pour la sauvagerie et le lynchage avec lesquels vous vous en êtes pris à vos hôtes.

Merci de nous avoir surtout donné l’opportunité de nous attarder un peu plus sur cette «fraternité» arabe. Sur ce qu’elle nous a apporté, de faire le bilan de cette collaboration avec vous, chers «frères». Il est inutile de vous rappeler que le sang des Algériens s’est mêlé à la terre d’Egypte quand nos jeunes soldats de l’ANP ont défendu, en 1973, avec bravoure, le désert du Sinaï face à Israël, votre ennemi d’hier.

Oui, votre ennemi d’hier, car aujourd’hui, c’est à partir du Caire que l’armée israélienne a eu le feu vert pour massacrer les enfants de Ghaza. Il est inutile de vous rappeler la fameuse 8e BB (Brigade Blindée) algérienne qui a été dépêchée sans condition afin de concrétiser «le devoir de solidarité agissante envers les causes justes et plus particulièrement vis-à-vis de la cause arabe».

3000 militaires se sont rendus, par voie terrestre, en Égypte en plus du matériel militaire. Vous nous l’avez bien rendu chers «frères» arabes. Que des jeunes chauffés à blanc s’attaquent à un bus d’une équipe adverse n’est pas un fait extraordinaire en soi. On peut lui trouver toutes les explications et les excuses possibles puisque les Egyptiens n’ont pas inventé le hooliganisme. En revanche, ce que les journalistes égyptiens ont inventé, c’est la malhonnêteté et la boulimie du mensonge médiatique.

De la malhonnêteté parce que ces mêmes journalistes qui ont été reçus, il y a à peine dix jours, avec un méchoui et des cadeaux à Djenan El Mithaq, n’ont pas respecté un contrat moral passé entre les deux parties. Pourtant, jamais une délégation de journalistes étrangers n’a eu autant d’égards de la part des Algériens.

Ils ont inventé la boulimie du mensonge médiatique car, une fois retournés en Égypte, c’est de la haine qu’ils ont éructé et étalé dans les colonnes de leurs journaux et les plateaux de leurs télévisions. On savait depuis longtemps que les tares et les déboires de la presse sportive égyptienne sont légendaires mais pas avec autant de haine.

Une rencontre de football entre deux nations n’est jamais la dernière, car la noria du sport continuera tant qu’il y aura des compétitions internationales. Nous vous donnons donc rendez-vous même après le match du Soudan. En attendant, vous avez surfé là où il ne fallait pas. Mais, merci d’avoir permis aux Algériens de se réconcilier avec eux-mêmes. Vous avez surfé sur la mauvaise vague. Vous avez ouvert la boîte de Pandore, chers «frères» arabes d’Egypte.

Brahim TAKHEROUBT

Affaire d’État

On a caillassé nos joueurs, tabassé nos supporters et sifflé notre hymne national devant des ministres de la République algérienne impassibles. On ne pouvait rester les bras croisés devant tant d’humiliations.

Soudan : On arrive. Les supporters des Verts vont déferler sur Khartoum comme des criquets avec un esprit de revanche non dissimulé. La faute à la haine égyptienne qui a provoqué des morts. Inadmissible.

L’affaire tourne au vinaigre. Non contents d’avoir gagné un match, les égyptiens ont lynché les supporters algériens présents au stade. On dénombre des morts et des blessés. Pour ceux qui en doutaient, ils ont eu un aperçu de la signification de “l’amitié arabe”. Elle est faite d’assassinats, de trahison, de bastonnade et de cruauté sans égale. Les algériens ont eu droit à un traitement inqualifiable de la part d’égyptiens qui, d’habitude, servent le thé aux touristes israéliens sur les plages de Sharm el-Sheikh. Il y a eu mort d’homme. C’est devenu une affaire d’état.

Cet “accueil” était pourtant prévisible. Combien fallait-il de morts pour que le gouvernement algérien se réveille ? On a caillassé nos joueurs, tabassé nos supporters et sifflé notre hymne national devant des ministres de la République algérienne impassibles. On ne pouvait rester les bras croisés devant tant d’humiliations.

Depuis hier, l’état semble, heureusement, sortir de sa torpeur pour se mettre au diapason de l’indignation nationale. Billets d’avion à prix cassés, accord avec le Soudan pour supprimer le visa et billets de stade gratuits sont parmi les mesures déployées afin de répondre aux attentes citoyennes. Car les algériens viennent, une fois encore, de faire la magistrale démonstration de leur amour du drapeau. De leur pays.

Certes, certains vont dire qu’on s’emballe trop pour un match de football. Mais rien, absolument rien ne commande ce sentiment national d’appartenance à une Algérie qui veut exister. C’est un devoir de solidarité que de soutenir les Verts, qu’on gagne ou pas, car cela paraît maintenant bien dérisoire face au nombre de morts. Ceux qui ont perdu la vie au Caire ou ceux dont le cœur a cessé de battre devant leur écran. Pour les Verts. Pour l’emblème national.

En attendant, cette colère légitime est également alimentée par l’indolence de la Fifa. Où sont passés les engagements écrits demandés aux égyptiens, allègrement violés ? Va-t-on encore parler football, alors qu’on nous a tué des supporters ?

Tout cela en espérant que les joueurs de l’EN sentiront, depuis Khartoum, ce vent de folie souffler sur leur visage. Cette ferveur populaire salutaire.

Par : Mounir Boudjema

Le Caire, après le match

Courage, calmons- nous

Au lieu d’une atmosphère de deuil suite à la douche écossaise du match contre l’Egypte c’est, à l’Algérienne, une réaction de sursaut imprégnée du sentiment qu’on a perdu une bataille et pas la guerre, qui a prévalu. Au lieu de les décourager et de mettre en berne leur ardeur enthousiaste, le résultat a au contraire galvaudé les Algériens, qui ont afflué en masse vers l’ambassade soudanaise et les agences d’Air Algérie.

Le siège de cette compagnie a été littéralement assiégé, mais dans le calme et dans l’esprit festif, par les centaines de supporters qui, se trompant en réalité d’adresse, ne voulaient en aucun cas rater leur billet pour Khartoum. Les bruits les plus inquiétants et les rumeurs les plus folles ont circulé, rivalisant de nombre de morts et de blessés en Egypte, alimentant un sentiment de rancœur et son corollaire, l’appel à la vengeance.

Nous sommes dans le domaine sportif, où il ne faut jamais perdre de vue qu’il faut calmer le jeu. Hier, c’était une atmosphère bizarre, faite de joie, d’inévitables klaxons, de cris, d’acrobaties même, mêlant déception et espoir, impressions clamées par une foule en délire, jouissif certes, mais délire quand même.

Ce climat va baisser en cours de route et le soir du mercredi, en bien ou en mal, cet épisode sera déjà enregistré dans l’histoire. En tout cas, ce sont des moments de vie intense, qu’il faut savoir entretenir dans la sérénité.

N.S.