jeudi 1 octobre 2009

Copie non conforme

Avec la décolonisation, l’Algérie, bien que fatiguée par 7 ans de guerre et 132 ans d’affrontement, a récupéré une formidable force d’inertie et s’est engagée dans une dynamique de progrès. Si elle a gardé un complexe vis-à-vis du colonisateur, Franz Fanon, avertisseur public de futur, s’est bien chargé d’en délimiter les teneurs, dès l’indépendance, l’Algérie gardait toutes les structures françaises pour faire semblant d’être moderne, et peut-être qu’à ce moment-là, elle l’était vraiment.

Le temps aidant et les appétits de pouvoir augmentant, elle a commencé à s’éloigner du modèle, pour ne garder que ce qui aux yeux de son régime était important. 47 ans après, on peut se rendre compte qu’elle n’a finalement gardé de la France des années 1960 que l’outil répressif.

Les CNS algériens, compagnie nationale de sécurité, équivalent des CRS français, compagnie républicaine de sécurité, premier front antiémeute, la DGSN, l’équivalent orthographique de la DGSE, et la Gendarmerie nationale, photocopie de la gendarmerie française.

Pour le reste, l’Algérie construit mal et il n’y a qu’à comparer les immeubles français et algériens pour s’en rendre compte. Elle soigne mal, et il n’y a qu’à voir où le président Bouteflika va se soigner quand il est malade. Elle éduque mal et il n’y a qu’à voir le niveau de l’enseignement algérien et français pour le réaliser. Pourquoi l’Algérie n’a pas tout copié ? Parce que ça ne l’arrange pas.

L’Algérie a été livrée aux mains de la tradition et de la conservation, ces deux forces qui n’ont pas participé, ou très peu, à la libération du pays. Le paradoxe est là, sur quelle base leur a-t-on donné ce pays alors que les libérateurs étaient tous des modernistes ? La culpabilité. Le personnel politique étant illégitime et truqueur de légitimité, il va traiter avec l’ennemi, intérieur ou extérieur. Le reste se voit tous les jours.

Par Chawki Amari

La fin de l’impunité pour Israël?

Le rapport très critique du juge sud-africain, Richard Goldstone, va-t-il, enfin, sonner le glas pour Israël? Tout le laisse croire, encore qu’il y a lieu d’être prudent en l’occurrence tant l’Etat hébreu a su, ces dernières décennies, tirer jusqu’à l’usure sur la corde de l’antisémitisme, parade qui le mit à l’abri de toute condamnation et le sortit, indemne, des pires massacres commis dans les territoires palestiniens occupés. Crimes qui tous pouvaient être assimilés à des crimes de guerre et de crime contre l’humanité.

C’est exactement la conclusion à laquelle arrive le rapport Goldstone. Le juge sud-africain espère que le dossier sera déposé par le Conseil de sécurité auprès de la Cour pénale internationale (CPI) pour que l’affaire de l’agression contre la bande de Ghaza suive son cours. Fort de l’impunité que lui ont assurée les grandes puissances occidentales, Israël a fait peu cas de la vie des Palestiniens massacrés sans état d’âme tout au long des quarante dernières années.

Dans une déclaration expliquant le rapport de la commission d’enquête de l’ONU, le juge Richard Goldstone a ainsi dénoncé le fait qu’«une culture de l’impunité prévaut dans la région (du Proche-Orient, Ndlr) depuis trop longtemps» et ajoute: «L’impunité pour crimes de guerre et de possibles crimes contre l’humanité a atteint un point critique»

Le juge estime, d’autre part, que «l’absence actuelle de justice mine tout espoir d’un processus de paix et renforce un environnement qui favorise la violence». Sans qu’Israël soit cité nommément, il est patent que le juge onusien faisait référence à l’Etat hébreu, le seul pays au monde qui jouit d’une curieuse mansuétude de la part des grands qui se sont autoproclamés «gendarmes» du monde. Des «gendarmes» qui ne se sont jamais intéressés aux exactions d’Israël, exactions partout ailleurs condamnées.

Ainsi, la vie de 1400 Palestiniens tués entre le 27 décembre 2008 et le 18 janvier 2009, lors de l’agression contre la bande de Ghaza, n’a pas pesé lourd et n’a pas fait réagir la «communauté internationale» de la même manière qu’elle le fait promptement pour d’autres conflits dans le monde. Ces dernières années, toutes les tentatives de présenter Israël et/ou ses dirigeants, devant une juridiction internationale, pour les crimes commis contre le peuple palestinien ont échoué, singulièrement du fait des pressions qui ont pesé sur la Belgique et l’Espagne, notamment, dont les cours étaient compétentes pour connaître des crimes de guerre.

Mais aujourd’hui, l’étau semble se resserrer autour d’Israël mis sur la sellette, tant par le récent rapport de la commission de l’ONU que par les rapports d’ONG internationales des droits de l’Homme. En fait, si la CPI pouvait lancer un mandat international contre un dirigeant en exercice (cf; le président soudanais Omar El-Bechir), pouvait-il en être autrement pour des dirigeants israéliens coupables d’avoir ordonné des représailles contre les Palestiniens? Exactions assimilées ou qualifiées de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité par les ONG et M.Goldstone.

Si Israël est un Etat comme les autres, la justice internationale doit s’appliquer à ses dirigeants avec la même sévérité qu’à l’encontre d’autres pays ou dirigeants dans le monde. Mais, il y a comme un retour de bâton. C’est ainsi que le ministre israélien de la Défense, Ehud Barak, directement impliqué dans les crimes commis contre les Palestiniens de Ghaza, a été menacé d’arrestation, hier à Londres, à la suite d’une requête d’un groupe d’avocats représentant des Palestiniens, devant le tribunal de Westminster à Londres.

La requête a été rejetée. C’est là un avertissement à Israël et à ses dirigeants, lesquels risquent de ne plus être en sécurité dans le monde après avoir, durant des décennies, bénéficié de l’impunité et s’être placés au-dessus des lois et du droit international.

Karim MOHSEN

Des cartons rouges… à blanc !

Dieu merci, le rôle de l'Union européenne ne se résume pas en un comptage approchant des millions de litres de lait que les agriculteurs déversent à perte dans les champs. 

Il arrive à l'UE d'enquêter aussi. Histoire de savoir qui de la Russie ou de la Géorgie a été derrière le déclenchement des hostilités au début de la guerre des cinq jours. En attendant que le vrai coupable soit débusqué, un rapport des vingt-sept blâme les deux pays ennemis pour «mauvaise conduite».

Les guerres contemporaines sont-elles plus ou moins acceptables quand elles font preuve d'une soi-disant propreté ? Il ne peut y avoir plus blanc que le phosphore et pourtant la guerre de Ghaza a été des plus sales.

Si les victimes du massacre de Jénine sont mortes «pour rien» - il n'a manqué à Ariel Sharon que de crachouiller sur le rapport de l'Onu -, le juge Richard Goldstone a pris la ferme décision que ce scénario ne se reproduira pas. Il ne peut y avoir de paix sans la fin de la «culture de l'impunité».

Les crimes de guerre et possibles crimes contre l'humanité, dont l'armée israélienne est accusée d'avoir commis sous commandement d'Ehud Barak, méritent un sévère châtiment.

Tout comme les tireurs de missiles artisanaux du Hamas palestinien. Le rapport onusien tombe plutôt mal pour les deux parties incriminées, la médiation allemande est sur le point de conclure un accord sur l'échange d'otages contre informations entre Tel-Aviv et la direction politique du Hamas.

Comble du paradoxe, s'il venait à avoir lieu, les deux acteurs continueront-ils de protester «ensemble» les quelque 600 pages que compte le rapport du juge Goldstone ?

Ehud Barak, la vieille colombe qui s'est fait «plomber» les ailes le jour de sa désertion du parti des travaillistes, est le moins bien placé pour pouvoir contester les conclusions du rapport onusien. Invité en Grande-Bretagne par le Labour, auquel Gordon Brown n'est pas près de remettre sa démission, le transfuge Barak s'est rendu dans le Royaume-Uni avec une crampe à l'estomac.

Un collectif de familles palestiniennes ayant déposé plainte contre sa personne devant la cour de justice de Londres qui doit décider si ses juges sont compétents ou non pour instruire l'affaire. Cependant, l'actuel ministre de la Défense israélien n'a aucun souci à se faire quant à son hypothétique arrestation.

Il s'appelle Ehud Barak et non pas Omar El Bachir que son parti, au pouvoir, vient de désigner comme candidat à la prochaine présidentielle.

Le négociateur en chef à Camp David rentrera à Tel-Aviv avec les honneurs militaires, le juge sud-africain a donné à l'Etat hébreu et aux «autorités de Ghaza» six mois pour mener leurs propres enquêtes. Si d'ici-là rien n'est fait, le Conseil de sécurité aura obligation de s'en référer au procureur de la CPI. A ce point, les accusés de crimes de guerre à Ghaza sont proches d'un procès à la Nuremberg ?

Les divisions au sein même du conseil des droits de l'homme de l'Onu sont si profondes que le siège de la cour internationale semble avoir été rayé de la carte. L'Amérique d'Obama, éprise elle aussi de la perpétuelle règle de deux poids deux mesures, n'a pu se tenir à l'écart de ce débat. En son âme et conscience, le secrétaire d'Etat adjoint US aux droits de l'homme,

Michael Posner, s'est refusé à mettre sur le même plan moral Israël, un Etat démocratique qui a le droit de se défendre et le Hamas qui a répondu au retrait israélien de Ghaza en terrorisant les civils israéliens. Qu'il s'agisse du premier ou du second, les cartons rouges qui leur ont été distribués risquent bien de ressembler à des tirs à blanc. A se demander encore où en est l'enquête internationale sur l'assassinat du milliardaire Rafik El Hariri.

Par Anis Djaad

Le dernier pour la route

Moment télé très fort mardi sur France 2. Le thème «comment se débarrasser de l'alcool ?» aurait pu tomber dans le lieu commun, puisqu'il s'est installé dans le débat public depuis assez longtemps pour revenir avec quelques clichés indéboulonnables mais toujours utiles.

Et il y en a eu des clichés, tout au long des deux heures d'émission. Les sentiers battus n'ont pas pour autant été envahissants et il n'était pas aisé de décrocher de l'écran parce que tous les ingrédients qui pouvaient entretenir l'attention étaient là.

A commencer par l'émotion. Débarrassé de tout complexe, un jeune homme physiquement et moralement ravagé par la bouteille tentait de raconter, sans toujours y parvenir, son cauchemar quotidien, une longue canette de bière collée à la main et à la bouche.

Plus loin, ses parents tentaient de retenir des larmes coupables de n'avoir pas vu venir le monstre qui a transformé leur beau garçon en loque humaine. Sur le plateau, des invités, un comédien qui s'en est sorti grâce à son ambition artistique pense à «ceux qui n'ont pas cette chance» et les conseille, sans une once de morale dans le propos, de trouver des raisons de renaître. Un autre, journaliste de son état, se remémore tout le calvaire qu'il a fait subir à ceux qui l'aiment, avant d'«arrêter ça» avec détermination.

Une femme disait comment l'alcool a failli détruire son couple et à quel prix elle a aidé son mari à s'en sortir grâce à un amour auquel elle n'a pas pu renoncer.

Dans un centre de cure réputé de Marseille, les caméras de France 2 ont accompagné les va-et-vient d'un homme alcoolique qui veut bien se soigner et qui y trouve des difficultés en raison de sa précarité sociale. Entre le centre de désintoxication et le foyer d'hébergement pour SDF, les séjours se ressemblent trop pour provoquer la rupture, mais il y croit et s'accroche à sa… guitare, manifestement seul objet à l'arracher un moment à ses déboires.

Entre un témoignage extérieur et une intervention sur le plateau, sont diffusés des séquences du film Le dernier verre pour la route, dialogue plein d'émotion et d'espoir entre un père accro et un fils qui croit naïvement que, pour arrêter de boire, il suffisait de ne plus boire. Les médecins invités expliquaient tout simplement la «maladie», sans culpabiliser quiconque, sans faire la leçon.

L'un avouait que le plus grand danger du whisky est que «c'est si bon», tandis qu'un autre confiait que l'alcool lui avait ouvert beaucoup de portes sociales et professionnelles. Grand moment télé, mais c'était quand même sur France 2. Peut-on rêver d'un moment pareil sur l'ENTV ?

Il faudrait peut-être commencer par parler de l'alcoolisme comme une maladie, pas comme un vice dont il faut vouer les sujets aux gémonies. Existe-t-il des centres de cure, des associations des médecins spécialisés et des malades guéris capables de témoigner sans masque et des hommes susceptibles de regarder leur femme dans les yeux pour lui dire «pardon pour le mal que je t'ai fait» et reconnaître qu'ils s'en sont sortis grâce à elle ? On pourrait commencer par en parler.

Slimane Laouari

Polanski rejoint Mami en prison

Une star mondiale de la chanson croupit dans une prison française, une autre star du cinéma hollywoodien vient d’être arrêtée en Suisse. Pour l’un, c’est le silence, pour l’autre c’est un vrai tsunami...

Qu’ils étaient sages nos ancêtres! «Il faut tourner sept fois la langue dans la bouche avant de parler» entendait-on, tout petits, nos aînés nous répéter ce conseil pour ne pas prononcer des mots déplacés, transmis de génération en génération. Certains en Occident font encore mieux, ils «tournent leur langue 30 ans durant» pour trouver les mots qu’il faut.

C’est que les mots ont leur importance et qu’ils peuvent faire et défaire une situation. Prenons l’affaire qui a déclenché un vrai tsunami médiatico-politique cette semaine. Il s’agit de l’arrestation en Suisse de ce réalisateur de renommée mondiale qu’est Roman Polanski, poursuivi par la justice américaine pour pédophilie (les médias occidentaux disent «penchant sexuel» dans son cas). Cela s’est passé il y a trente années. Cela fait trente ans aussi que l’accusé a fui les Etats-Unis et leur justice. Il n’y a plus remis les pieds, vivant principalement à Paris dont il a pris la nationalité. Son arrestation a créé un tollé indescriptible dans certains médias occidentaux.

Des Etats aussi se sont élevés contre l’exécution du mandat d’arrêt américain. L’affaire a fait grand bruit en début de semaine pour se tasser et se voir carrément retirée du menu des rédactions en fin de semaine. Pour ne pas gêner les tractations qui ont commencé entre les «amis» du réalisateur et l’administration américaine. Mais qui est Polanski et qu’a-t-il commis? L’homme est né à Paris en 1933 d’un père juif polonais et d’une mère russe. Il a connu une enfance malheureuse de vagabond, gagnant sa subsistance dans le marché noir.

Ce qui ne lui laisse guère le temps d’aller à l’école. Mais la chance va lui sourire grâce au cinéma. Qu’il découvre à l’âge de 13 ans. Deux ans après, il décroche le rôle principal dans une pièce intitulée Le fils du régiment mis en scène par Joseph Karbowski. En 1962, à l’âge de 29 ans, il réalise son premier long métrage auquel il donne le titre Le couteau dans l’eau. Cela suffit pour sa consécration en obtenant l’Oscar du meilleur film à New York. En 1968, il épouse la célèbre comédienne américaine Sharon Tate qui se fera assassiner avec quatre de ses amis en Californie par des membres d’une secte dont le tristement célèbre gourou était Charles Manson. En 1977, au summum de sa gloire, Polanski est poursuivi par la justice américaine pour «viol sur une mineure de 13 ans». Libéré sous caution après 47 jours passés en détention, il en profite pour fuir et rejoindre la France dont il possède la nationalité.

Il ne nie pas les faits mais refuse l’accusation de «viol» car selon lui, la victime «était consentante» (rappel non inutile que la fillette en question n’avait que 13 ans). Il accepte à la place, le chef d’accusation de «détournement de mineure». Une reconnaissance du crime ineffaçable. Depuis sa fuite, Polanski vivait librement. Voyageait en Europe le plus normalement du monde malgré le mandat d’arrêt lancé contre lui. Jusqu’à cette semaine où il s’est fait arrêter par les policiers suisses à sa descente d’avion. Voilà l’affaire brièvement exposée. Mais qu’avons-nous entendu dire les ténors des médias et de la politique de certaines capitales européennes? Pas une seule fois le mot «pédophile» n’a été utilisé. L’enfant victime est devenue «une jeune femme consentante».

De plus, elle lui aurait «pardonné». On a entendu parler de «prescriptibilité» pour des faits remontant à 30 ans alors que cela n’existe pas aux Etats-Unis. On a presque entendu que les Etats-Unis n’étaient plus un Etat de droit puisque «la peine de mort» y a été toujours appliquée. On a entendu la Suisse se faire traiter de tous les noms d’oiseaux pour avoir exécuté le mandat d’arrêt. Le nouveau ministre français de la Culture, Frédéric Mitterrand, n’a pas hésité à joindre sa voix à celles des «offusqués» qui défendent la culture en général et les artistes en particulier. Personne n’a dû dire à Mitterrand que, dans une prison française, croupit depuis un certain temps une autre star mondiale de la culture. Cette star s’appelle Mami. Ce n’est pas un pédophile. Certes, il a fui un moment la justice française mais il s’est ressaisi et est revenu se présenter de lui-même à son procès. Il n’a eu droit à aucune solidarité des hommes et femmes de culture.

Peut-être que vous, M.Mitterrand, qui venez à peine d’arriver, allez-vous montrer la même solidarité pour Cheb Mami que pour Polanski et vous dresser contre ces attitudes de deux poids, deux mesures? Osons y croire!

Zouhir MEBARKI

Impressions de route

Il n’ y a pas à dire! Il faut contrôler tout de visu et ne pas se fier au travail de propagande entrepris depuis des années et qui nous force à prendre des vessies pour des lanternes. Tous les jours, des communiqués triomphants font part de grandes réalisations, de projets mirobolants, d’inaugurations répétées: tout semble au mieux dans le meilleur des mondes. Un avenir radieux semble se dessiner pour la génération montante, même si, en face de chez vous, cela fait des mois qu’un chantier pour l’établissement d’une passerelle, piétine: après la poussière de l’été, c’est la boue de l’hiver qui entoure les premières fondations.

Pourvu qu’il ne dure pas autant que le chantier du tramway ou du métro... Tiens! Celui-ci, on commence vraiment à l’oublier! Mais il ne faut pas faire les difficiles: si la cherté de la vie met par terre tous vos ambitieux projets, il faut reconnaître, quand même, que des progrès ont été faits et que l’eau coule sans cesse des robinets qui ont connu des sécheresses mémorables. Si la moindre pluie provoque toujours les mêmes désagréments, si les avaloirs ont toujours de la peine à absorber les généreuses précipitations, si de nouvelles voies de communication permettent dorénavant une circulation plus fluide sur la bande verte qui constitue la partie «utile» du territoire, il faut penser un peu aux villages perdus dans la steppe.

Ceux-ci n’ont pas connu les investissements industriels esquissés au nord et les découpages administratifs décidés sur le papier, donnant des titres ronflants à des agglomérations dont les noms semblent surgir de romans historiques, n’ont pas encore impulsé l’essor attendu. Sitôt que vous sortez de la majestueuse voie express qu’on ose affubler du nom d’autoroute pour aller affronter les contreforts de la barrière montagneuse, si le premier village témoigne d’une bonne organisation, où un ramassage scolaire providentiel aide les enfants dont les domiciles sont éparpillés au gré des exploitations agricoles, les villages suivants aux noms pompeux, tranchent avec leur indigence.

Les écoliers affichent leur dénuement: des enfants, sous la pluie battante font des kilomètres à pied pour rejoindre une école qui ne se distingue pas parmi les masures aux toits bas qui s’accrochent à la montagne. Dès que les pitons rocheux où des conifères rabougris tentent de survivre sont dépassés, les tons pastels cèdent le pas à la symphonie verte et ocre du maquis.

Sur la route au tracé sinueux qui ressemble plus à une piste d’aérodrome au vu de l’absence d’arbres, des groupes de deux ou trois vieux paysans vêtus de kachabia et de turban font de l’auto-stop. Tous les cinq cents mètres, des bras ou des cannes se lèvent pour implorer la pitié de l’automobiliste imperturbable qui a les yeux fixés sur la route trompeuse. Une chose est sûre, dans ce coin perdu le transport public est une chose rare et on peut prévoir, sans l’ombre d’un doute, que les requins du transport, qui se disputent la Mitidja, ne viendront pas se perdre dans ce recoin.

Selim M’SILI

Efficacité et dépendance

De nombreuses voix officielles n’ont cessé d’appeler, depuis l’Occident, les pays du Maghreb et du Sahel à unir leurs forces pour venir à bout du terrorisme. Pas plus loin qu’hier, la recommandation – assortie de plusieurs autres suggestions d’ordre politique – a été réitérée depuis Washington, la capitale fédérale américaine. Après plusieurs années d’hésitation, les pays de la région ont fini par prendre le conseil très au sérieux. Depuis l’été dernier, les gouvernements algérien, malien et nigérien ont pris l’initiative louable, en effet, de mener dès qu’ils seront prêts une importante offensive commune contre Al Qaîda au Maghreb.

Nous ne sommes pas dans les secrets des dieux, mais ceci dit il est peu probable que l’attaque programmée contre les groupes islamistes armés intervienne à très court terme. Nul besoin en effet d’être un stratège militaire pour deviner qu’un tel projet a besoin d’un minimum de préparation. Au-delà des exigences que peut imposer ce genre de mission, il n’est nul besoin de dire que les armées concernées doivent d’abord et avant tout apprendre à travailler entre elles. C’est ce qui est appelé dans le jargon miliaire l’interopérabilité.

Et ce n’est pas faux de dire qu’il s’agit déjà là de tout un programme à mettre en œuvre avant de parler de quoi que ce soit d’autre. Ceci dit, la remarque ne diminue en rien du mérite des pays qui ont décidé de prendre le taureau par les cornes et de dépasser leurs divergences pour donner un grand coup de pied dans la fourmilière du terrorisme.

Un grand mérite parce qu’il était impensable il y a une année encore, au vu surtout des enjeux et des intérêts divergents qui minent la région du Sahel, de voir ces pays collaborer dans un domaine aussi sensible que celui de la lutte contre le terrorisme.

Est-ce que maintenant l’offensive contre les bases d’Al Qaîda au Maghreb et des narcotrafiquants portera ses fruits ? Les experts sont de plus en plus nombreux à dire qu’une coopération classique et conjoncturelle ne saurait suffire pour venir à bout militairement d’Al Qaîda.

La constitution d’un état-major permanent regroupant l’ANP et les forces armées des pays du Sahel se pose aujourd’hui, selon eux, comme une nécessité vu la forte amplitude de la menace terroriste. Compte tenu de l’expérience passée, la bataille ne peut se gagner aussi que grâce au renseignement et à la collaboration des Touareg, grands connaisseurs du terrain.

Cela suppose, bien évidemment, un règlement définitif du problème de la rébellion touareg. Pour minimiser l’intervention de puissances extra-africaines (celles-ci pourraient avoir des visées autres que purement sécuritaires), il devient plus qu’indispensable pour l’Algérie de disposer d’un satellite militaire capable de balayer le moindre coin et recoin d’une région actuellement dépourvue, en grande partie, d’une couverture radar digne de ce nom.

C’est à cette seule condition que la bataille contre le terrorisme pourra être véritablement gagnée et que les pays du Sahel pourront acquérir une autonomie véritable en matière de sécurité. Sans cela, ils resteront limités dans leurs actions et exposés à toutes les manipulations.

Par Zine Cherfaoui

Septembre, l’exquise saison de «Toche»…

Il pleut des étoiles
Dans les cieux délavés
Voguent les voiles
Sur les mers oubliées
Toche ma plage
Tu ne vieillis jamais
La colline enrage
D’être la mal-aimée
Toche des dépités
Des pauvres des aisés
Des bonheurs décapités
Des illusions rasées
Tu brilles dans ma tête
Comme un feu d’antan
Et fait la fête
Dans les Santons
C’était un ami et la guitare
Moustaki chantait
Sous le phare
Qui nous hantait
C’était la jeunesse
Le cœur en diagonale
Nous chassions la tristesse
A l’horizontale
Vingt ans à la pendule
Morsure de l’été
Sur nos chairs incrédules
De passions allaitées
Toche de l'apparence
Mère des faussetés
Tu tournes tu danses
Dans les vies époussetées
Toche l’incomprise
Je nage dans tes humeurs
Ton regard méprise
Et attise la fureur
Je t’aime en automne
Quand part l’été
Quand revient le cyclone
Des amours à satiété
Je t’aime en septembre
Sans la foule
Je t’aime dans la pénombre
Sans la houle
Je t’aime tranquille
Posée comme un parasol
Loin de ta ville
Et des folies en farandole
Je t’aime sous l’orage
A midi pile
Quand ferme la plage
Et somnole la ville
Je t’aime la nuit
Pluies de perles
Sur ton cou ébloui
Quand l’extase déferle
Toche mon ivresse
Camarade retraitée
J’adore tes caresses
Dans les nuits agitées
Il pleut
Je suis à l’Escale
Les yeux dans le bleu
Le cœur en cavale
Vient
Le soir, obscur
Mon cœur, le tien
Le doux murmure
Elle vit
La mer sauvage
Et me ravit
De son ramage
Elle frémit
Dans son sommeil
Et gémit
A son réveil
Posé
Le soleil d’hiver
Tendrement arrosé
De nos verres
Entêtés
Les miroirs en face
La mer répétée
Sur toutes les glaces
Il pleut
La ville tombe
Dans le creux
De l’hécatombe
Orages
Le torrent ravage
Ton rivage
Tes coquillages
Abîmée
Ma ville avalée
Brimée
De pluie ravalée
Noyée
De boue maquillée
Broyée
Dans ses allées
Ton présent
Ton passé ton futur
Machine sans raison
Sans culture
Où sont
Tes palais, tes danseurs
Tes chansons
Tes chœurs
Accablée
Comme un cheval
Ville affublée
Pour les carnavals
Dans le silence et le noir
Des jeunes, j’ai vu partir
Les yeux garnis d’espoir
Malgré l’approche du pire
Toche port d’infortune
Ici les bourses saignent
Pour une virée en
Sardaigne
Chargée de rancune
Toche de là-bas
Près du sable d’or
Toche d’en bas
Des faibles des forts
Toche des clopes
Vendues par le manchot
L’espoir fait flope
Sous le gravier chaud
Au Palmier, pas de mer
Juste un bout de liberté
Et des filles mères
Sans puberté
Le pêcheur est mort
D’avoir chassé la peur
Et traqué le mauvais sort
Dans les nuits de frayeur
Toche des aurores
Pâles comme une insomnie
Comme un soleil mort
Une barmaid dans un taxi
Les filles s’en vont
Les bonniches viennent
L’amour dorénavant
Sera sans étrennes
Bamako, on t’a fermé
A cause du Général
Nuits fermentées
Le cimetière est pâle
Toche adieu
Je repars vers mon village
Le cœur radieux
La tête pleine d’images
Et dans le frimas des plaines
Et le silence de Madaure
La mer n’aura aucune peine
A serrer mon cœur très fort
Je reviendrai c’est sûr
Pour larguer des vers
Verts ou mûrs
Au-dessus de la mer
Le temps guérira
De toutes les maladies
Le temps périra
D’avoir trop dit.
(Toche, 28 septembre 2009)

M. F.

N.B. : La suite de «La Grande harba» dans l’édition de jeudi prochain.

On ne vous demande pas la lune, vous seriez capables de l’éteindre !


Par Hakim Laâlam  
Email : laalamh@yahoo.fr Comment faire pour avoir une voiture neuve sans crédit ?
 

La tombola !

Un égout. Juste un égout. Egout, bark ! Egout, hachakoum ! Apprendre comment et de quoi est fait un égout. Décrypter le mode de fonctionnement d’un égout. Faire et refaire jusqu’à n’en plus pouvoir des croquis d’égout. Dessiner un égout dans le moindre de ses détails. Chercher à comprendre comment est venue l’idée de l’égout à l’homme. Remonter jusqu’au premier égout conçu et fabriqué par la civilisation humaine. Répertorier les différentes sortes d’égouts. Cartographier les égouts de nos cités. Rédiger, distribuer et enseigner aux concernés un manuel traitant de l’entretien des égouts. Avant que de lancer en grande pompe dans le ciel Alsat 1, le premier satellite algérien. Avant d’annoncer triomphalement le choix révolutionnaire pour les toutes prochaines années de l’énergie solaire. Avant d’affirmer que les voitures seront bientôt construites ici même. Avant de promettre l’interconnexion CIB de tous nos commerçants et l’usage généralisé du paiement par carte de tous nos achats avant la fin 2011. Avant de vanter notre savoir-faire en matière de construction de trémies. Avant de bomber le torse devant les avancées de notre nucléaire civil. Avant de brandir comme des performances inouïes le clonage de l’ENTV en une myriade de petites sœurs aussi hideuses que l’aînée. Avant de prétendre câbler tous les immeubles du pays en connexion téléphone, Internet et satellite avant la fin 2010. Avant de rouler des mécaniques parce qu’on a remplacé le traditionnel billet d’avion par une version électronique. Avant de vouloir tous nous doter de passeports et de cartes d’identité biométriques. Avant de transformer le pays en vaste distributeur automatique de normes bidons ISO machin chose et label machin chouette. Avant tout cela, avant touuuuuuuuuuuuuut cela, juste maîtriser un égout. Ne pas vous faire déborder par un misérable petit égout. Ne pas nous laisser nous faire engloutir par un minable égout. Juste ça, Allah yarham babakoum ! Je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue.

H. L.

Près de 4000 morts à cause de la grippe porcine

Venez, venez tous…

Nos amis de Marseille s’inquiètent et comptent venir se rassurer par eux-mêmes sur notre cas. Un cas désespéré, selon des diagnostics tricolores. Sur place on dégotera peut-être un bon herz (amulette) qui éviterait au port de Marseille d’être contaminé par le mauvais sort qui frappe Oujda. Chez nous, l’été s’achève, il fait frisquet et il y a des orages avec dégâts.

Ce qui fait qu’on a rangé les éventails, des instruments aux conséquences surprenantes dans les dialogues algéro-français. D’autant qu’il y a longtemps qu’il n’y a plus de mouches à Alger comme dans le temps, ni de provocation à craindre non plus du côté de la zaouïa el-alawia, déjà pacifiée durablement du temps des… mouches.

Pour les Algériens, Marseille n’est pas n’importe quelle ville. Chez nous, on lui voue une sympathie particulière depuis que feu Gaston Defferre invita en 1962 la secte des Delta, alors en fin d’exercice chez nous, d’«aller se faire réadapter ailleurs». Mais cela suffit-il pour décider les autorités d’un Etat à retenir des choix contraires à ses intérêts nationaux ?

En s’invitant à El-Mouradia, les Marseillais ne donnent pas l’impression de vouloir forcer la main à l’Algérie mais de venir juste défendre leur croute. Légitime ! On ne peut que déplorer l’absence de telles initiatives chez les nôtres ! Marseille ne veut pas suivre la piste incertaine des relations algéro-françaises et sait que «qui part à la chasse perd sa place».

Les Marseillais à qui nous souhaitons bonne chance ne sont pas les seuls à penser à se rendre à Alger. Ils y ont été précédés par l’américain Paul Burkhead, venu lui aussi en ces temps de crise plaider la cause des opérateurs de son pays. Les faux pas français en Algérie, prémédités ou non, font saliver bon nombre de capitales occidentales.

Ainsi, d’ici à la fin de l’année en cours, Alger accueillera, entre autres, deux ministres – Défense et Intérieur – de la Grande-Bretagne avec la perspective d’un contrat d’armement de 5 milliards de dollars, plus d’une demi-douzaine de délégations économiques allemandes avec un intérêt particulier pour le secteur financier et, bien entendu, Silvio Berlusconi, le président de l’entreprenante Italie. Un «bienfaiteur» de perdu, dix de retrouvés, pourrait-on dire !

Par Mohamed Zaâf

Réagir, et vite…

Les alertes n’ont pas cessé de fuser ces dernières années pour tenter de mettre fin à cette terrible tragédie routière. L’hécatombe de la chaussée nous hisse à la peu enviable position des premiers classés au monde, et la révision à la hausse des contraventions, retraits de permis et autres, infligées aux chauffards, s’est révélée une suite de coups d’épée dans l’eau.

Les criminels de la route poursuivent leur macabre œuvre de confortement des deuils, et les pouvoirs publics ne peuvent rester les bras croisés devant une telle calamité, un tel désastre, une telle catastrophe. Certes, les autorités ont fait ce qu’elles ont pu, mais les résultats signifient que les mesures édictées ont été soit insuffisantes, soit «à côté de la plaque».

L’Algérie peut et se doit de faire l’économie de ce fléau dramatique et la tolérance zéro ne devrait pas être un mot d’ordre vidé de son sens ou remisé aux oubliettes sitôt finie la «campagne» de sensibilisation. Copier ce qui se fait sous d’autres cieux, pour peu qu’on aboutisse aux mêmes résultats, c’est-à-dire diminuer le nombre de morts et de blessés, est un acte à ne soumettre à aucune gêne, mais au contraire à assumer avec fierté.

C’est la fin qui justifie l’inspiration, voire le plagiat, lorsqu’il y va de la vie des nos concitoyens. Il faut être imaginatif, à commencer par considérer comme un véritable criminel et un assassin, celui qui, par sa négligence et sa conduite, conduit à un massacre. Ces chauffards sont sans pitié. Alors, tout simplement, il faut sévir con-tre eux et les condamner… sans pitié. Il y a péril en la demeure.

N.S.