samedi 31 octobre 2009

Réponse et bouches cousues

La semaine la plus longue pour les Occidentaux s'est achevée. L'Iran a mis fin au suspense, le docteur El Baradei a finalement eu réponse à l'offre faite aux mollahs. Succès ou échec ? Déception.

Le groupe des «Six» s'attendait à mieux, une réponse assortie d'une batterie de réserves n'en est pas vraiment une. Du moins, elle ne peut être considérée comme formelle. Préliminaire, tout au plus.

Les Occidentaux y voient déjà derrière le désir de la République islamique d'Iran de faire traîner la négociation. Son refus à transférer dans un premier temps et en bloc ses stocks d'uranium vers la Russie constitue à lui seul un obstacle quasi-insurmontable.

Ajoutant à cette condition le souhait du régime de Téhéran d'un «échange simultané» qui lui permettrait de recevoir le combustible nucléaire aussitôt la première portion d'uranium livrée à l'étranger.

A ce propos, un diplomate en poste à Vienne a bien résumé l'opinion qui prévaut aux Etats-Unis et chez ses alliés : «L'Iran veut le beurre et l'argent du beurre.» Ce qui est évidemment inadmissible aux yeux des Occidentaux malgré l'apaisant et coopératif discours de Mahmoud Ahmadinejad.

Ses dires auraient-ils été moins sincères qu'ils ont en eu l'air ? Surtout dans leur dernière partie, le président iranien rappelant le droit indéniable de la République islamique à devenir une puissance nucléaire… civile ? Son rappel ne serait destiné qu'à la consommation interne, les ultraconservateurs craignent de perdre la face face à des réformateurs qui prendraient pour argent comptant les concessions de leurs rivaux. Si, bien sûr, ceux-là venaient à «trahir» un jour les aspirations de toute une nation.

Soit renoncer à l'enrichissement de l'uranium au nom de l'interaction que le président iranien a décelé chez les Occidentaux. Après l'assommante réponse de l'Iran, qui parmi eux se relèvera et retrouvera l'usage de la parole en premier puisque tous semblent avoir été réduits à un silence collectif, gouvernement de Tel-Aviv inclus ?

Les Etats-Unis, qui par la voix d'Hillary Clinton, doutent en la volonté ou en la capacité des autorités pakistanaises à faire la peau aux chefs d'Al Qaïda ?

Ce qui devrait «pourrir» un peu plus les relations tendues entre Washington et Islamabad malgré l'offensive militaire antitalibans au Sud-Wazaristan.

Ou les «grands» de l'Europe, en l'occurrence l'Allemagne et la France, que le président tchèque a fait plier avec les vingt-quatre autres membres de l'Union européenne ? Ce qui permettrait à ses institutions de mieux fonctionner, mais faudrait-il d'abord qu'un accord puisse être trouvé sur le climat et qu'un président qui mérite le job puisse être désigné sans qu'il y est de casse.

Passé ce silence, les Occidentaux accorderont-ils un second délai à l'Iran au bout duquel son régime doit fournir une réponse officielle qui dépasserait largement les aspects techniques de la proposition de l'AIEA ?

Soit une réponse politique claire qui prouverait la bonne foi des Iraniens à aller de l'avant à défaut de déposer un texte contraignant devant le Conseil de sécurité de l'Onu, quitte à subir le veto de la Russie. Mais force est de reconnaître que le manque de confiance est en train de changer de camp.

A présent, ce sont les Iraniens qui cultivent de la méfiance à l'égard des Occidentaux. Parce que mener des pourparlers à «découvert», sans uranium faiblement enrichi en leur possession, reviendrait à apprendre à un aveugle à marcher dans le noir… à la merci de n'importe quelle frappe.

Par Anis Djaad

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