mardi 27 octobre 2009

A géométrie variable

Le nucléaire iranien continue à faire des vagues et à focaliser efforts et attentions de la «communauté internationale» laquelle, toutes affaires cessantes, estime que l’urgence de l’heure reste encore et toujours cette suspicion qui pèse sur Téhéran accusée de chercher à se doter de l’arme atomique, sous couvert de programme nucléaire civil. Mobilisé autour de ce dossier, l’Occident n’arrive pourtant pas à faire entendre «sa» raison à un Iran têtu - qui s’en tient aux règles du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP, auquel ce pays adhère) - et le faire renoncer à son droit à l’enrichissement de l’uranium.

Or, le TNP admet pour tous les pays la recherche expérimentale nucléaire, y compris l’enrichissement de l’uranium, sous réserve de contrôle par l’agence onusienne de sûreté nucléaire (Aiea). L’Iran a reçu, dans ce contexte, ces dernières années, plusieurs visites d’inspection de l’agence de l’ONU sans que celle-ci puisse corroborer les soupçons occidentaux.

Donc, jusqu’à preuve du contraire, l’ancienne Perse est de bonne foi quant au pacifisme de son nucléaire. Est-ce suffisant? Indubitablement non, assurent les censeurs de Téhéran qui ne s’estimeront satisfaits que lorsque les sites nucléaires iraniens seront scellés et mis sous leur contrôle, que l’Iran renonce à son droit à l’enrichissement. De fait, c’est cet «enrichissement» qui est au centre de la controverse sur le nucléaire iranien et l’acharnement avec lequel l’Occident tient, coûte que coûte, à arrêter le programme nucléaire mené par ce pays.

A tel point qu’il y a eu cette bizarre demande américaine faite à l’Algérie - formulée récemment par le secrétaire d’Etat adjoint chargé du Moyen-Orient, Jeffrey Feltman, - d’intercession auprès du régime de la République islamique pour que cette dernière abandonne l’enrichissement de son uranium. On peut même se demander si Washington, en l’occurrence, a frappé à la bonne porte en venant solliciter Alger, alors que l’Algérie est elle-même, cycliquement, accusée, au même titre que l’Iran, de vouloir se doter de la bombe atomique.

Certes, il n’est plus de saison de démentir de telles affabulations, mais, last but not least, relevons toutefois cette politique à géométrie variable qui juge les pays selon qu’ils entrent ou non dans le profil et carcan imaginés pour eux par l’Occident. Ainsi, Israël peut avoir autant de bombes atomiques qu’il le désire - ce dont il ne se prive pas - perfectionner sa technologie des ADM à sa guise, refuser d’a-dhérer au TNP - passage obligé pour tous les autres pays du monde -, exclure toute inspection de l’Aiea de ses réacteurs nucléaires - inspection incontournable pour des pays comme l’Iran ou l’Algérie - cela n’inquiète pas l’Occident.

Ce «petit» pays a le droit de se défendre, n’est-ce pas? Mais que des pays ciblés puissent aussi avoir l’ambition d’accéder au savoir-faire nucléaire, voilà qui est assurément dangereux et doit être prévenu par tous les moyens. Ce que l’Occident fait depuis une décennie pour ce qui est de l’Iran. L ’un de ces moyens est de faire enrichir cet uranium par des pays tiers, occidentaux de préférence. Ainsi, le «projet d’accord» proposé par l’Aiea à Téhéran ferait que l’Iran transfère son uranium à la Russie qui l’enrichira à 19,75% avant de transiter par la France qui en fera des «coeurs nucléaires» utilisables par le réacteur de recherche de Téhéran, sous le strict contrôle de l’Occident.

La Russie joue en fait, le rôle de frein en enrayant l’hystérie des capitales occidentales qu’effraie la possibilité par l’Iran de maîtriser, à terme, l’ensemble des phases de la fission nucléaire, fût-elle pacifique et à dessein strictement civile. En fait, ce qu’il faut retenir, est que l’Occident a, une fois pour toutes, mis son veto à l’accès de certains pays - dont l’Algérie et l’Iran - à des vecteurs de la connaissance scientifique et technologique. Ce qui est inacceptable pour n’en pas dire plus.

Karim MOHSEN

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