mardi 27 octobre 2009

Les nouvelles propriétés

Ils occupent les trottoirs parce qu'ils considèrent qu'ils sont «logiquement» le prolongement de leurs maisons ou de leurs commerces, ils érigent d'abominables poteaux en béton qu'ils relient avec des chaînes métalliques cadenassées, ils «renforcent» leurs devantures

par le fer et l'acier de façon à ce que tous ceux qui viendraient s'y frotter se fassent mal et en sortent avec le maximum de dégâts, ils déposent sur des dizaines de mètres des caisses vides pour «réserver» des places de stationnement et les voilà maintenant qui passent à un autre stade d'accaparement de l'espace public.

Il y a quelques jours, un quidam qui habite une maison située à l'intérieur du bois des Cars s'est même cru en droit de chasser des lycéennes venues se reposer sous un arbre entre deux cours sous prétexte qu'elles dérangeaient la quiétude de son domicile tout proche.

Aux jeunes filles qui lui répondaient courtoisement en quoi leur présence sur les lieux pouvait le gêner, le bonhomme ne s'est pas cru obligé de leur parler sur le même ton aimable.

Vociférant, grossier et menaçant, il les somme de quitter les lieux sans autre forme de procès. Il ne manquait plus que ça, semblait-il crier à tue-tête, en prenant les rares passants à témoin : me demander à moi, propriétaire des lieux et dépositaire de la morale, d'expliquer en quoi la présence d'«étrangers» à proximité de ma demeure !

Dans un autre quartier de la capitale, on est carrément prié d'aller voir ce qui se passe ailleurs si d'aventure on est obligé d'attendre quelqu'un sur la chaussée ou on a simplement égaré son chemin.

Quant à garer sa voiture dans ces contrées-là, il ne faut même pas y penser, puisque d'intransigeants vigiles vous signifient sans ménagement qu'il faut déguerpir avant que ça ne tourne au vinaigre.

Et ça marche, la solidarité des squatters de l'espace public. Surtout quand le risque est quasiment nul. Ils ne partagent rien qui puisse rendre la vie plus agréable, ils ne s'associent dans aucune œuvre utile, mais ils sont systématiquement là à traquer l'homme venu d'ailleurs, en prenant soin bien sûr soin de s'assurer de son apparence inoffensive et joviale.

Il faut bien bomber le torse pour préserver la quiétude et la morale des lieux quand elles ne sont en aucune manière menacées.

Le reste du temps, il faut «composer» avec les petits caïds de quartiers ou laisser faire la police, rarement sollicitée quand un paisible citoyen se fait agresser pour délit de passage ou une lycéenne veut prendre de l'air entre deux cours.

Slimane Laouari

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