dimanche 6 septembre 2009

Héritage!

Les manifestants gabonais n’y sont pas allés par quatre chemins: «Le Gabon n’est pas une monarchie!», clamaient-ils après l’annonce de la victoire au scrutin présidentiel de Ali Ben Bongo, fils du défunt président Omar Bongo Odimba, contestant ainsi un succès annoncé. La deuxième ville du pays, Port Gentil, était hier sous couvre-feu après la mort de deux personnes jeudi. La situation restait hier tendue alors que l’UPG, le parti de Pierre Mamboubdou, principal challenger de l’ancien ministre de la Défense, appelait à la «résistance». Après la disparition du charismatique Hadj Omar Bongo, le Gabon semble ainsi, à son tour, entrer dans une ère d’instabilité.

De fait, la question de la passation de pouvoir en Afrique est devenue un problème récurrent dès lors que nous assistons à l’émergence de dynasties familiales que l’élection de Ali Ben Bongo à la magistrature du Gabon suprême de son pays ne fait que confirmer. En fait, M.Ben Bongo est le troisième dirigeant africain à succéder à son père après le Togolais, Faure Gnassingbé, qui prit la relève de son père Eyadema Gnassingbé et le Congolais (Kinshasa) Joseph Kabila qui remplaça son père assassiné, Laurent Désiré Kabila. Cette tendance à l’avènement de la «République des Fils», après celle des pères, tend à se confirmer si l’on tient compte qu’au moins trois autres fils de leurs pères - Gamel Moubarak, Seif El Islam El Gueddafi, Karim Wadé pour ne citer que ceux-là - piaffent sur leurs starting-blocks dans l’attente de la relève de leurs glorieux géniteurs.

Nonobstant les conditions (normales ou non) dans lesquelles une telle passation ait pu, ou va se faire, ce qui est préoccupant en fait, pour un continent en butte à un déficit flagrant de démocratie, est que le pouvoir en Afrique, au regard de la longévité politique de ses dirigeants, tend de plus en plus à s’établir en dynastie familiale. Tendance qui se confirme au fur et à mesure de la disparition des vieux routiers de la politique africaine. Or, ce qui pouvait passer à son avènement pour une exception, l’arrivée impromptue de Joseph Kabila à la tête de l’Etat du Congo démocratique, semble de plus en plus devenir un objectif programmé. Si certains fils ne cachent pas leur ambition de succéder à leurs pères, d’autres, moins ostentatoires, n’en pensent pas moins au fauteuil qu’un jour le paternel laissera vacant.

De fait, la République en «héritage» est bel est bien la tendance lourde dans une Afrique qui a totalement perdu ses repères engluée qu’elle est dans des guerres civiles et conflits tribaux d’un autre temps alors que le pouvoir devient de plus en plus une affaire de famille. L’élection de Ali Ben Bongo au Gabon ne fait que confirmer cette présomption qui n’augure rien de bon pour le continent africain dont les pays se transforment en «Républiques monarchiques» peu propices à l’émergence de nouvelles têtes politiques aptes à sortir l’Afrique de son sous-développement.

La personnalité des jeunes présidents africains n’est en rien mise en cause, mais il faut bien relever que l’accaparement du pouvoir par des dynasties familiales n’est pas fait pour encourager l’alternance politique, la bonne gouvernance et la démocratie, induisant la stagnation, voire la régression de pays africains déjà mal partis et qui achoppent sur maintes difficultés qui obèrent leur développement. Les événements qui ont secoué ces derniers jours le Gabon attestent combien le peuple n’est pas dupe ni prêt à renoncer à son arbitrage.

Karim MOHSEN

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