Le président Bouteflika est revenu hier dans son allocution prononcée à l’occasion de l’ouverture de l’année judiciaire sur la réforme de la justice dont il a loué les « avancées » dans le sens du rapprochement de la justice des justiciables par l’ouverture de nouvelles structures à travers le pays, le renforcement des effectifs du corps de la magistrature, la modernisation des structures de l’appareil judiciaire.
Comme il a loué les vertus de l’indépendance de la justice qu’il considère comme le socle du développement du pays et la garantie de la paix et de la cohésion sociale. Au chapitre des nouveaux chantiers, Bouteflika a énoncé devant les magistrats quelques postes de travail qui devraient focaliser l’attention des responsables du secteur dont notamment la recherche d’une plus grande efficience dans le fonctionnement de certaines structures de l’appareil judiciaire telles que la Cour suprême et le Conseil d’Etat qui constituent la superstructure du système judiciaire et l’ultime recours du citoyen pour faire valoir ses droits.
Auparavant, dans une intervention, le ministre de la Justice, Tayeb Belaïz, a emprunté le même ton lénifiant dressant un tableau tellement surréaliste du secteur que beaucoup en étaient à se demander si le ministre parlait de l’Algérie ou d’un autre pays. Lorsqu’il avoue que le niveau d’application des décisions de justice dépasse celui de beaucoup de pays démocratiques, on veut bien le croire si la réalité du terrain incitait réellement à un tel optimisme.
Des décisions de justice non appliquées : chaque Algérien a sa petite anecdote sur le sujet. Plus grave parfois, c’est l’Etat et la puissance publique qui n’appliquent pas les décisions de justice comme on l’a vu dans le dossier des créances des imprimeries. Alors de quelle justice et de quelle réforme parle-t-on ? La réforme des statistiques qui subordonne la qualité et la performance du système judiciaire au nombre de cours ouvertes et aux effectifs recrutés, aux nouveaux centres pénitenciers réceptionnés, gage, nous dit-on, de l’amélioration des conditions carcérales, aux dotations en matériel informatique…, cette entreprise-là n’a pas d’avenir.
Car elle passe sous silence l’essentiel, ce pourquoi la réforme a été engagée : l’émergence d’un système judiciaire indépendant, fort de la loi et du droit et qui veille rigoureusement au respect du principe constitutionnel de l’égalité des citoyens devant la justice, afin qu’il n’y ait pas de superjusticiables ou d’intouchables comme c’est malheureusement le cas. Alors qu’ailleurs, les scandales qui éclaboussent de hautes personnalités de l’Etat alimentent régulièrement la chronique politique et que des Premiers ministres, des chefs d’Etat sont convoqués devant la justice pour être entendus, chez nous la notion d’immunité s’est toujours confondue avec l’impunité.
C’est ce qui explique sans doute cette propension maladive de nos responsables à se maintenir à leur poste à n’importe quel prix. Et puis, qu’est-ce que c’est que cette réforme qui n’en finit pas ! Au rythme où vont les réformes du secteur de la justice initiées déjà voilà près d’une décennie et dont on ne perçoit pas encore les résultats attendus, il faudra sans doute s’armer de patience, comme pour le métro d’Alger, pour voir notre justice coller au plus de la devise républicaine de « la justice par le peuple et pour le peuple » au nom duquel est rendu le droit.
Par Omar Berbiche
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