jeudi 24 septembre 2009

Les dons de la mer

Il y a toujours quelque chose à tirer de la mer, surtout quand on la raconte avec autant de profondeur, d'authenticité et pour tout dire, de tendresse.

De ses histoires les plus tragiques, l'écrit et l'image ont pu tirer des œuvres tellement belles et émouvantes qu'elles ont intégré l'éternité. La mer invite aux miracles les plus invraisemblables et réhabilite la grandeur des choses simples et naturelles.

Elle est la nature dans toute sa nudité tout en couvant la vie dans ses mouvements les plus palpitants.
Dans son ventre increvable de fertilité, sommeillent les monstres les plus hideux et les agneaux les plus attachants de tendresse.

Elle a son blé qu'elle fait pousser sur de généreuses étendues, ses fruits rares qu'elle cache dans les recoins les plus inaccessibles et ses bêtes les plus indomptables.

La mer est un gouffre insondable sous un champ agaçant de platitude. Ses colères sont muettes. Ne les entendent que ceux qui s'y prennent et subissent ses foudres impitoyables. Elle détermine les caprices des vents et rit au nez des pluies torrentielles.

Ce ne sont jamais les orages que craignent les pêcheurs, mais ce que la mer veut bien en faire. Elle a ses routes, factices, parce que le ressac suffit à guider les pas les plus incertains et joindre les horizons les plus lointains.
Au-dessus d'elle, le ciel est toujours bleu parce qu'elle en est l'indétrônable reflet. La mer tue sans avoir à s'en expliquer et fait vivre sans demander sa dîme.

Elle ne parle pas, elle gronde. Elle ne rit pas, mais sourit à des moments furtifs quand les premiers rayons la chatouillent. Et puis les vagues reprennent possession de ses mouvements, souveraines dans leurs élans, maîtresses du son et du ton, ignorant les bruits de clairon venus des bastingages et les confidences qui se perdent sur les ondes.

La mer ne rejette pas les corps étrangers parce qu'ils sont trop petits pour l'immensité de ses tripes. Les bateaux fondent ses sillons sans qu'elle en redoute la moindre éraflure, des usines géantes habitent ses entrailles sans réussir à provoquer la nausée.

La mer est imperturbable, il n'y a que les hommes pour croire qu'elle est capable des mêmes jérémiades que celles de leurs cauchemars. Pour avoir abrité le premier déluge, elle ne peut promettre l'ultime colère. Les effluves de la mort ne peuvent rien contre l'odeur du sel et des algues.

La mort n'étant qu'un moment de la vie, la mer ne sait pas comment lui tendre les bras si jamais elle a l'idée saugrenue de venir toute seule.

Slimane Laouari

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