jeudi 3 septembre 2009

La lame de fond japonaise

Deuxième puissance économique mondiale jusqu'à un passé récent, le Japon n'occupe paradoxalement sur la scène politique internationale qu'une place discrète pour ne pas dire effacée. Ce pays ne fait pas parler de lui non plus quand il s'agit des questions de politique internationale.

Les médias du monde semblaient d'ailleurs l'avoir compris en détachant son attention de cet empire sereinement attelé à son destin de faiseur de miracles économiques, avec le travail comme religion et la performance comme seconde nature. Comme dans un accord tacite, l'opinion internationale la plus large ne donnait pas la moindre impression de vouloir savoir ce qui se passe dans ce pays.

Un géant de cette envergure aurait sûrement mérité plus d'attention quant à son mode de gestion et de fonctionnement, les courants d'opinion qui le traversent et le régime institutionnel qui préside à ses destinées. Sans doute que le fait d'être cité comme un exemple de réussite en matière de développement a éclipsé tout le reste au point que ce pays flirte avec la légende.

Pourtant, le Japon n'est pas un pays fermé, sinon il n'aurait pas réussi, autant parce qu'un Etat retranché sur lui-même est incapable de tels miracles, que parce que parce que ça fait longtemps que le progrès a déserté les contrées de la glaciation.

Pourtant, le Japon n'a pas arrêté de donner l'impression d'un pays trop confortablement installé dans ses certitudes pour être un espace vivant qui bouge à la vitesse de son temps et même un peu plus. Et si le Japon avait oublié qu'il n'y a pas que le travail dans la vie ?

Avec le «séisme» politique qui vient de le traverser par la victoire écrasante de l'opposition aux législatives, le Japon est peut-être en train de nous livrer une autre (ultime ?) performance : mettre le pied dans les palpitations que vivent régulièrement ses concurrents et, accessoirement, les plus puissants de ce monde.

On ne le sait pas encore, mais les prochaines années nous le diront, si le Japon a perdu ou gagné quelque chose en découvrant l'alternance.

Le paradoxe continue cependant, y compris chez les analystes avertis. Certains d'entre eux estiment que le changement peut être source de déséquilibre – ou de ralentissement – du développement et d'autres pensent au contraire qu'une nouvelle dynamique peut fructifier encore plus les capacités accumulées et le savoir-faire qui est toujours là, surtout que les signes d'essoufflement de l'économie sont largement antérieurs à l'arrivée toute fraîche de l'opposition aux affaires.

Le japon a peut être changé, mais il continuera d'étonner le monde. Avec cette fois un peu plus d'attention pour la lame de fond qui le traverse.

Slimane Laouari

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