lundi 7 septembre 2009

Un jeune et un autre jeune

Un vendeur de «chirbat», mélange toujours douteux d'eau, de sirop et de zeste de citron, vient d'être condamné à un an de prison pour avoir frappé un policier qui lui demandait d'arrêter sa vente et de quitter les lieux. Le jeune homme n'est sûrement pas à accabler.

Il va payer pour sa faute et peut-être un peu plus. Un an de prison ferme pour avoir agressé un agent de police dans l'exercice de ses fonctions.

On ne peut pas non plus reprocher au tout aussi jeune agent de l'ordre de faire son travail et d'attendre qu'il soit respecté en tant que représentant de la force publique. Si le jeune vendeur de «jus» ne s'était pas senti dans son «droit», il n'aurait sûrement pas poussé sa résistance à l'autorité jusqu'au geste malheureux qui lui coûtera une année de sa vie et peut-être des prolongements encore plus fâcheux, puisqu'il est connu que la prison n'a pas la réputation de former des enfants de chœur.

Selon le confrère qui a rapporté l'information dans son édition d'hier, c'est d'ailleurs en toute bonne foi que le jeune homme a déclaré au juge pour sa défense que le policier voulait «l'empêcher de travailler».

De l'illégalité de ce travail, de l'occupation toute aussi illégale d'un espace public, de l'absence de contrôle sur la qualité de son produit et des conditions d'hygiène de sa fabrication, il n'en a donc à aucun moment été question.

Et ce n'est pas d'être particulièrement arrogant ou véhément que le jeune homme devait se défendre de manière si étonnante et après tout si maladroite. C'est qu'habitué à «travailler» dans la quiétude et parfois sous des regards bienveillants, il n'a dû imaginer qu'on viendrait un jour l'en empêcher avec autant de détermination.

De manière générale, il ne peut pas comprendre qu'une activité soit défendue quand elle se pratique au nez et la barbe de la police quatorze jours sur quinze et d'être combattue selon l'humeur d'un mauvais après-midi et parfois avec des dépassements particulièrement zélés.

Le policier non plus ne devait pas comprendre comment on pouvait lui demander d'intervenir tous les trente-deux du mois avec autant de fermeté pour déloger des vendeurs chez qui il arrive qu'il s'approvisionne le reste du temps. Cela fait tellement longtemps qu'on ressasse que plus aucune activité commerciale illégale ne sera tolérée que tout le monde a fini par l'oublier.

Et d'avoir oublié, un jeune de vingt-deux ans va passer une année en prison, un policier sensiblement du même âge soignera ses blessures, rongé par le remord, et des citoyens continueront à consommer des produits périlleux pour leur santé.

Slimane Laouari

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