mercredi 9 septembre 2009

Voir Cap Town et y mourir

Un énième jeune Algérien vient d'être assassiné en Afrique du Sud. On n'en entend pas parler mais la mort de nos ressortissants dans ce pays commence à devenir un peu trop fréquente pour être classée dans la rubrique des faits divers et expliquée par la fatalité du destin.

Quand un petit village de Kabylie en arrive à compter son troisième mort en moins de deux ans dans un pays où on n'a aucune raison de soupçonner quelque hostilité particulière, il faudrait peut-être poser d'autres questions. D'abord celle-ci : qu'est-ce qui peut bien attirer dans ce pays en convalescence politique qui se remet doucement de l'un des plus horribles cauchemars de l'humanité ?

Bien sûr l'Afrique du Sud a le mérite d'en finir avec l'apartheid et de tourner une page sombre de son histoire. Bien sûr qu'elle a une assise économique et un savoir-faire technologique qui la place logiquement à la première place du développement en Afrique. Pour autant, elle n'est pas vraiment un exemple de prospérité qui puisse faire rêver des jeunes Algériens en mal de perspective.

On y va donc pour d'autres raisons, dont la plus évidente est la relative facilité d'entrée dans ce pays. Selon l'un de ces jeunes installé là-bas depuis une dizaine d'années, il y a trois façons de se rendre en Afrique du Sud : la première, bien évidemment, consiste à demander normalement un visa. C'est hypothétique mais ça peut marcher. La deuxième est d'«acheter» un visa.

«Jamais trafic n'a été aussi facile et efficace», il suffit d'y mettre le prix. A partir de trois cent mille dinars. La troisième enfin est un long et périlleux périple dont le point de départ est la capitale égyptienne Le Caire. Une fois en Afrique du Sud les papiers de résidence sont faciles à obtenir à partir du moment où l’on a trouvé du travail.

Ce serait le réseau de passeurs égyptien qui est derrière le malheur et parfois le drame de nombre de jeunes Algériens parce que son activité ne s'arrête pas à l'acheminement.

C'est un véritable gang qui prend en otage ses «clients», les exploite dans leurs commerces ou les place ailleurs en les rackettant. Tous les jeunes Algériens morts en Afrique du Sud, et ils commencent à devenir décidément trop nombreux, seraient assassinés parce qu'ils se sont révoltés et ont tenté de reprendre leur liberté.

Et à chaque drame, la petite communauté algérienne de Johannesburg, de Cap Town ou de Pretoria, saisit les autorités du pays, souvent dans un langage sibyllin qui cache une profonde inquiétude. Déjà que l'Afrique du Sud ne fait pas vraiment rêver, alors y aller pour se faire racketter ou mourir…

Slimane Laouari

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