jeudi 25 août 2011

Ces terres à problème

A Bir Ghbalou, les paysans se disputent l'occupation des terres d'une surface ahurissante...

Deux grandes familles de la région de Bir Ghbalou (wilaya de Bouira) se disputent un miniterritoire agricole de excusez du peu-cent quatre-vingt-cinq hectares. Une véritable fortune qui reste un énorme souci pour la justice locale.


Trois inculpés et trois victimes sont debout face à Mohammed Bezhoud, le président de la section correctionnelle du tribunal de Tablat qui a, à sa droite, bien assis sur -et dans - le siège du ministère public, le jeune et attentif Abdelhamid Yettou qui devait se morfondre depuis le temps où les adversaires dans ce dossier s'affrontent. Une tonne de documents -arrêts-jugements-procès verbaux-convocations-attestations-correspondances émanant des ministères de l'Agriculture, de l'Intérieur, de l'Urbanisme, de la Justice sans compter les policiers, les gendarmes, les huissiers, les notaires et même des coupures de canards sur ce problème qui remonte au moins à 1999 et c'est peu dire.


Etant au parfum de la guéguerre que se livrent ces voisins, cousins, inculpés, victimes et même témoins, le président avance lentement grâce au précieux concours de trois conseils: Maître Hassan Brahimi, Maître Touati et Maître Rachid Brahimi. Les trois défenseurs poseront beaucoup de questions aux antagonistes qui dominent leur sujet, sauf peut-être les jeunes héritiers qui ont pris place juste après le décès du papa. Et ce mercredi, il s'agit d'atteinte à la propriété. D'emblée, l'un après l'autre, les trois inculpés nient le délit.


«Nous sommes chez nous, sur nos terres» a affirmé le premier alors que le deuxième, le plus âgé, a déclaré que les pseudo-victimes n'ont rien à gratter: «Ils ont été depuis longtemps, délogés, renvoyés, car ils n'avaient rien à voir avec ces cent-quatre vingt-cinq hectares»


Le troisième et dernier inculpé, chevaleresque et avec beaucoup de sang-froid, va longtemps s'accrocher au procès-verbal d'installation évoqué durant l'interrogatoire par leur avocat Maître Touati, qui semble, tout comme les Brahimi, avoir appris par coeur le contentieux depuis le début des hostilités.


Saâd F., Lakhdar F., et Mohamed.L, les trois victimes vont déclarer exactement les mêmes propos mais à l'envers. Elles s'expriment en victimes spoliées mais pas en victimes expiratoires. Et comme pour effectuer une pause, ce bon ancien juge du siège va profiter d'une feinte que la loi a prévue, va faire un peu d'humour, histoire de dégeler des débats qui montaient, montaient, montaient...


Par la suite, nous aurons un autre festival de questions-réponses, bien orchestré par le juge, nullement pressé d'en finir car il devait être fixé sur le sort de ce dossier qui a connu le civil, le référé et le pénal et ce, à plusieurs reprises. C'est donc dire que la vigilance est de rigueur, on demande à prendre acte. Côté Maître Touati autour de la réponse de Lakhdar.F, à propos du fameux procès-verbal d'installation. Et Maître Touati poussera la coquetterie jusqu'à aider Bezhoud lors de la dictée de la prise d'acte. Le juge joue le fair-play. Il laisse faire tant que ces paysans restent respectueux des us et coutumes, car avec ces trois renards d'avocats, comment donc cela ne marcherait pas comme sur des roulettes? Et là, nous aurions aimé voir une autre Brahimi, Fatiha, la présidente de chambre correctionnelle de Blida, présider ces débats où son propre paternel, Maître Hassan Brahimi, tient la vedette avec le bonus de défendre des victimes d'atteinte à la propriété et tout le chapelet d'articles de loi...


D'ailleurs, les deux défenseurs des victimes décideront de ne pas trop agacer le tribunal qui connaît ce dossier sur le bout des doigts et même des orteils. Les deux conseils sortiront de leurs gibecières toutes les cartouches en vue de descendre l'oiseau en plein champ en ce début mai 2011.Quant à Maître Touati, il a plaidé comme s'il n'avait pas retenu le «son et lumière» de ses deux aînés qui avaient, rappelons-le, réclamé 100 millions de centimes à tire de dommages et intérêts. En face, on gonfle ses joues...


L'avocat des inculpés brandit avec le verbe fort, l'article 386 et ses termes secs affirmant «qu'on n'est pas devant un délit proportionnel car dans ce cas d'espèce, il n'y a pas de délit du tout».
Puis entrant dans le jargon du «civil», Maître Touati ne manque pas de rendre hommage au président qui a su conduire des débats et donc a laissé au «piquet» du procès-verbal d'installations cette pièce-maîtresse de l'affaire, les trois pseudo-victimes qui croient encore que la partie est jouée et gagnée:«Dans cette affaire, cessez de rêver», conclut-il avant que Maître Rachid Brahimi ne réplique sportivement autour de la jurisprudence évoquée par son confrère. «Nous ne sommes pas dans le cas de gens expulsés qui reviennent se réinstaller sur les terres. Non!», articule le vieil avocat dont le sourire illuminera toute la face marquée par la chaleur de cet après-midi...estival! Le dossier est mis en examen sous huitaine. Suspense...

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