jeudi 17 septembre 2009

Le logement avant la tombe

Ils ont bien placés pour savoir ce qu'ils disent, les banquiers et les promoteurs immobiliers qui ont conclu que «le logement restera inaccessible à la majorité des salariés, même avec un crédit bonifié». 

Habitués à ce que ceux qui sont censés dire les choses telles qu'elles sont tournent autour du pot, gavés de formules savantes quand la situation n'exige rien d'autre que d'appeler un chat un chat, les algériens, du moins ceux qui théoriquement sont en mesure d'acquérir un logement pour peu que les moyens de paiement modernes soient possibles, savent pourtant leur douleur.

Et ils en parlent entre eux ou à d'autres. De toute façon, ils peuvent en parler à tout le monde, sauf à ceux qui sont susceptibles de localiser leur mal et éventuellement y apporter quelque soulagement. Avec des mots plus simples, il faudra bien aller plus loin que ce constat qui, pourtant, ne manque pas de pertinence : le crédit immobilier, quelle que soit sa bonification, ne servira pas à grand-chose pour des millions d'Algériens exclus du logement social et incapables d'acquérir autrement un toit pour leur famille.

D'abord pour cette raison qu'on entend rarement, mais qui n'en est pas moins évidente : les postulants au logement ont plus besoin qu'on réduise leur apport de départ plutôt qu'on baisse les taux d'intérêt à des niveaux qui, quelle que soit leur insignifiance, ne règlent pas le problème dans l'urgence.

Eh oui, les concepteurs qui font miroiter des formules à des prix théoriques plus accessibles grâce au recentrage des crédits bancaires oublient cette autre évidence : le logement est une question d'urgence pour l'écrasante majorité des prétendants. Puisqu'il faut continuer à appeler un chat un chat et que les algériens veulent des appartements tout de suite parce qu'ils n'en ont pas.

Parce qu'ils n'en ont pas, ils ne peuvent pas se permettre le «luxe» de l'épargne qui, de toute façon, est une opération impossible, parce que la plupart d'entre eux sont promis à attendre les clés du bonheur dans leur tombe.

En raison des prix excessifs, de la faiblesse des salaires moyens et du niveau du pouvoir d'achat, on ne voit pas comment économiser un minimum d'un million de dinars dans un délai que l'urgence rapproche chaque jour un peu plus.

Avec des coûts de réalisation démentiels dus au manque de performance des entreprises du secteur, la spéculation sur les matériaux de construction, l'éternel problème d'accès au foncier qui réduisent considérablement le niveau de l'offre et des méthodes de paiement archaïque, le logement n'est toujours pas loin du rêve chimérique. Les banquiers, les promoteurs et les demandeurs un peu plus sont bien placés pour le savoir.

La différence est que ces derniers n'ont pas ou et à qui le dire. Alors, ils vont continuer à en parler entre eux. Sans «risque» d'être entendus.

Slimane Laouari

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