jeudi 10 septembre 2009

Ding, deng, pan!

D’une grosse plainte devant la police, le papa met la robe noire pour intercéder...en faveur de son fils, coupable de coups.

L’agresseur du papa s’était approché de la barre face à la juge du mercredi du tribunal de Hussein Dey (Alger) Bahia Tabi. Il s’était approché, mais tenu à l’oeil par Saïd, le policier, faisant office de huissier d’audience, car la victime, en l’occurrence le père, n’était qu’à quelques centimètres du prévenu qui risque très gros car coupable de coups sur ascendant, fait prévu et puni par l’article 267 du Code pénal qui prévoit, dans son alinéa une peine d’emprisonnement à temps de cinq à dix ans pour quiconque volontairement fait des blessures ou porte des coups à ses père ou mère légitimes ou autres ascendants légitimes...

Le représentant du ministère public, Halim Boudra, était prêt à effectuer les demandes devant ce rejeton qui n’était pas à sa première «bêtise», selon le paternel, abattu, confus et malheureux. Le détenu, par contre, n’était pas du tout dans son élément. Mais alors pas du tout. Y a qu’à voir sa tronche!

«Alors, on a encore fait des siennes à la maison?» dit, le front lisse, la présidente qui va être désarçonnée par une intervention de la victime qui, en voyant l’état de l’énergumène de fils, a vite fait d’avaler sa plainte. Du coup l’inculpé est un charmant enfant, coléreux certes, mais au fond, ayant bon coeur. «Je suis sûr qu’il n’avait pas l’intention de me frapper. C’est que, après réflexion, j’ai dû glisser sur un objet jeté dans la cuisine et chuter. Non, je n’ai jamais été tapé par le gamin. Regardez derrière, El Hadja, sa maman, toute effondrée...», lâche en sanglotant le pauvre papa qui ne s’attendait certainement pas à cette descente aux enfers et aux...fers du garnement, coupable d’agression.

Et pourtant, il avait été averti par le procureur: «Si vous déposez plainte là, la machine s’ébranle!»
D’ailleurs, la présidente avait montré, d’un petit tic qui lui est propre, qu’elle était agacée de cette tournure qui a mené la victime à prendre un virage qui n’était tout de même pas salvateur, mais un père reste un père et la juge le savait.

«Cheikh, est-ce vraiment ce que vous aviez déclaré devant la police et le procureur? A vous entendre, votre fils est ici pour rien. Or, s’il est ici pour être jugé, c’est que quelqu’un s’en ai plaint. Et il se trouve que ce quelqu’un c’est vous!», articule lentement Bahia Tabi, la juge, comme pour «réveiller» le pauvre vieillard qui voulait se cacher quelque part dans la salle d’audience, après avoir évalué le désastre né à la suite du dépôt de plainte.

En guise de réponse, ce sont les larmes et une grosse voix brisée par l’émotion et la douleur après les émotions vécues at-home à la suite de l’agression, les émotions nées au matin du procès lorsqu’une avocate questionnée autour du verdict, lui avait confié que le rejeton risquait cinq à dix ans d’emprisonnement car - le comble - les coups n’ont occasionné aucune blessure ni une incapacité de travail totale, une incapacité de l’espèce mentionnée dans l’article 264 (loi n°82-04 du 13 février 1982).

Ce qui avait dû déjà ébranler la victime qui ne connaissait rien à la démarche de l’appareil judiciaire: lourd l’appareil mais ravageur pour les confondus. Entre-temps, la présidente avait lancé un oeil sur le détenu dont les yeux brillaient pas nécessairement de remords, mais sûrement d’un éventuel verdict lourd, assommant et une incarcération pénible car et cela aussi, M.S. a dû le constater: c’est qu’en taule, certains détenus qui purgent de longues peines n’aiment pas les co-détenus qui s’en prennent aux ascendants, aux enfants et aux femmes.
Et rien que pour cela, le détenu va perdre quelques millimètres de sueurs et donc de graisse et donc de poids avant même l’énoncé du verdict: un an d’emprisonnement ferme, la moitié des demandes de Boudra, le procureur qui n’avait pas envie du tout de sourire.

Abdellatif TOUALBIA

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