mercredi 23 septembre 2009

ÉCONOMIE ALGÉRIENNE : Check-up

Le Forum économique de Davos vient de rendre public son rapport 2009/2010 sur la compétitivité. L’économie algérienne y est toujours mal classée globalement mais nous avons préféré regarder de plus près «ce qui va mal» parmi les facteurs de compétitivité et nous avons surtout résitué l’économie algérienne dans son contexte régional pour mieux apprécier les faiblesses qu'il y a lieu de corriger. Dans le rapport du forum économique, la compétitivité est appréhendée à travers 12 piliers classés en 3 catégories :

1/ Les exigences de base :
Elles sont au nombre de quatre :
a/ les institutions
b/ les infrastructures de base
c/ la stabilité macro-éco
d/ la santé et l’éducation primaire
a) Par institutions, on entend les règles, le droit, les comportements
b) Les infrastructures de base comprennent la qualité des réseaux routier, ferroviaire, portuaire, aéroportuaire, l’électrification, le réseau téléphonique.
c) La stabilité macro-éco est mesurée par le déficit ou l’excédent budgétaire, le taux d’épargne national, le taux d’inflation, la dette publique.
d) La santé et l’éducation primaire comprennent l’état épidémiologique du pays (grandes maladies), la qualité de l’enseignement primaire, le taux de scolarisation dans le primaire, les dépenses d’éducation.

Classement par rapport aux exigences de base de la compétitivité

Pays Institutions Infrastructures Stabilité macro-éco Santé Education
Algérie 115e 99e 2e 77e
Maroc 64e 70e 32e 87e
Tunisie 23e 37e 55e 30e
Egypte 56e 55e 120e 84e
Turquie 96e 62e 64e 74e
Libye 67e 105e 4e 104e

L’Algérie a les plus mauvaises institutions, c’est-à-dire un droit pas toujours cohérent et surtout inappliqué, une bureaucratie procédurière lourde et corrompue, une justice inéquitable, des comportements d’agents économiques pénalisants. Dans le domaine des infrastructures, il est incontestable que l’Algérie avec ses ambitieux programmes d’équipement va améliorer considérablement son classement. Même son classement actuel semble peu crédible comparé à celui du Maroc ou de la Tunisie, moins dotés en infrastructures. La stabilité macroéconomique est le point fort de l’Algérie. La santé et l’éducation doivent être améliorées : les financements existent, la gestion est peu efficace, les programmes de formation sont à réformer.

Les atouts de l’efficacité :

Le classement
PAYS / INDICATEURS Algérie Tunisie Maroc Libye Egypte Turquie
1. Enseignement sup 102e 32e 99e 75e 88e 73e
2. Efficacité du marché des biens 126e 39e 68e 119e 87e 56e
3. Efficacité du marché du travail 127e 98e 129e 132e 126e 120e
4. Dév. du marché financier 132e 87e 96e 122e 84e 80e
5. Technologie 123e 55e 76e 98e 82e 54e
6. Taille du marché 51e 66e 56e 73e 26e 15e

Définition des indicateurs :
1/ On y trouve les indicateurs relatifs au taux de scolarisation dans le secondaire, dans le supérieur, la qualité de l’enseignement, la place des maths et des sciences de l’enseignement, les TIC dans l'enseignement, les capacités de recherche scientifique.
2/ L’Etat de la concurrence, impôts et taxes, délai de démarrage d’une activité, barrières tarifaires, importance des IDE, procédures douanières.
3/ Modalités de détermination des salaires, rigidité de l’emploi, productivité et salaire, pratiques syndicales, recrutement et licenciement.
4/ Degré de développement du marché financier, facilité d’accès au crédit, degré de disponibilité des flux de capitaux, degré de protection des investisseurs...
5/ Etat des TIC, utilisation Internet, disponibilité ordinateurs, taux de pénétration du téléphone, capacité d’absorption des technologies par les entreprises.
6/ Taille du marché intérieur, part de marché extérieur conquis.
Mis à part l’indicateur de la taille du marché, l’économie algérienne est mal classée dans les piliers relatifs aux atouts de l’efficacité. Les marchés fonctionnent mal : le marché des biens, celui du travail ainsi que le marché financier sont désorganisés, non régis par des lois claires, largement parasités par les activités informelles. Ainsi le marché des biens n’obéit à aucun principe de la concurrence non faussée et reste soumis à des pratiques illicites (maquillages, surprix, fraude fiscale), le marché du travail est rigide avec de grands difficultés de recruter mais aussi de licencier, le marché du financièrement de l’économie est, quant à lui, inexistant dans sa partie finance directe (Bourse) et inefficace dans sa partie banques. S’agissant de la disponibilité des technologies, de la culture technologique, du contenu technologique des productions locales, l’Algérie est très mal classée et le retard dans ces domaines est considérable même par rapport aux pays de la région. Enfin, le marché algérien pour sa part reste attractif par sa taille et par l’importance des dépenses publiques d’équipement.

Innovation et degré de développement du monde des affaires :
On y trouve des indicateurs sur :
• le nombre et la qualité des offreurs locaux
• la nature des avantages compétitifs
• la sophistication des processus de production
• l’état de la pratique du marketing
S’agissant de l’innovation, sont mesurées
• la capacité d’innovation du pays
• la qualité des institutions de recherche
• les dépenses en R/D des entreprises
• les relations universités-entreprises en matière de R/D
PAYS / INDICATEURS Algérie Tunisie Maroc Libye Egypte Turquie
Dévelop du marché des affaires 128e 54 78 111 72 52
Innovation 114e 38 96 106 74 69

Les performances de l’Algérie dans ces deux domaines sont bien médiocres. L’offre nationale de biens et services est bien insuffisante face à un marché intérieur qui ne cesse de se développer. Et plus inquiétant encore, rien n’est fait pour améliorer le climat des affaires, stimuler les incitations à investir, construire l’attractivité. Dans le domaine de l’innovation, le classement en queue de peloton attribué à notre pays se justifie amplement tant notre faiblesse est grande en matière de recherche-développement et d’innovation. On peut terminer ce «bulletin de santé» de l’économie algérienne en rappelant ce que les investisseurs et les entrepreneurs opérant en Algérie considèrent comme les cinq obstacles les plus contraignants : qui brident l’économie :

1/ l’accès au financement est un véritable problème et ni le système bancaire inefficace, ni le marché financier (bourse) inexistant n’offrent pour l’instant de perspectives prometteuses.
2/ La bureaucratie procédurière : les administrations économiques sont en Algérie d’une inefficacité qui découragent les plus tenaces investisseurs.
3/ La corruption : c’est bien cette bureaucratie lourde et pénalisante qui constitue le terreau de la corruption et les deux se soutiennent et s’alimentent mutuellement.
4/ La main-d’œuvre peu qualifiée. Le marché du travail en Algérie n’offre que peu de possibilités en matière d’offre de main-d’œuvre qualifiée. Le système d’éducation-formation est une machine qui «tourne pour elle même» en déconnection totale des préoccupations du monde de l'entreprise. Enfin, et en liaison avec la main-d’œuvre, le marché du travail algérien est rigide et ne permet aucune flexibilité ni dans le recrutement ni dans la mise de fin de fonction d’ouvriers au rendement insuffisant.

Par Abdelmadjid Bouzidi

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