mercredi 23 septembre 2009

Cache-misère biométrique et électronique !



Par Hakim Laâlam
Email : laalamh@yahoo.fr
Devinette. Parmi tous les animaux, il en est deux que Benbouzid affectionne par-dessus tout. Lesquels ?

Le flamant rose et la baleine bleue !

Je suis heureux ! Tu ne peux pas t’imaginer comme je suis heureux ! Dans quelques jours, je vais avoir un passeport biométrique. Je ne sais pas exactement ce que recouvre ce mot scientifique, mais je suis heureux quand même. Je ne sais pas si je pourrais, l’été prochain, me payer un billet d’avion pour l’étranger à près de 100 000 DA, un visa à près de 10 000 DA, un change lui aussi situé dans ces eaux-là, mais je suis heureux à l’idée d’avoir mon passeport biométrique dans la poche. Je suis d’autant plus heureux qu’après mon passeport biométrique, les autorités m’ont promis que j’aurais aussi une toute nouvelle carte d’identité nationale, elle aussi biométrique et électronique. Bababababa ! C’est pas la classe, ça ? Une carte d’identité bourrée d’électronique à l’heure où pour se faire délivrer un certificat de résidence, il faut présenter ses dernières quittances Sonelgaz ? Moi, déjà, le premier truc que je fais, dès que l’on me remettra mon passeport et ma carte d’identité biométriques et électroniques, c’est de m’acheter un nouveau portefeuille. Et ben oui, quand même ! Je ne vais pas héberger les deux beaux documents tous neufs et remplis de puces dans mon vieux «toz'dam» ! Je vais y mettre le prix ! Rien n’est trop beau pour un passeport et une carte d’identité biométriques. Il leur faudra du cuir. Un cuir en même temps souple et solide. Du chevreau. Oui ! Oui ! Du chevreau ! Excellent ! Bon, l’idéal, bien sûr, ça aurait été de trouver sur le marché des portefeuilles biométriques et électroniques. Là, ça aurait fait la panoplie. Imaginez un peu la scène lors d’une marche pacifique de protestation contre la hogra, le mal logement et la corruption généralisée. Après m’être fait embarquer par les brigades antiémeutes – parce que je me ferais embarquer, c’est obligé — et lorsque j’atterrirais au commissariat et qu’on me demandera mes papiers, avec quelle lenteur et quelle fierté non dissimulée j’extirperais de la poche de mon pantalon souillé par la boue – parce qu’on m’aura matraqué à terre, c’est obligé là aussi — mon magnifique portefeuille biométrique et électronique, et avec quelle théâtralité voulue et assumée j’en tirerai mes documents intelligents. Malmené, lessivé par les questions, tabassé, spolié de mon droit à l’expression citoyenne, mais avec tout de même dans la poche un passeport et une carte d’identité biométriques et électroniques. Ça en jette ! Je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue.

H. L.

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