mardi 1 septembre 2009

Afrique : de la dictature inamovible à la “démocratie” dynastique

Au moment où Kadhafi fête le quarantième anniversaire de coup d’État et sa quarantième année de dictature, au Gabon, trois candidats se déclarent vainqueurs de l’élection présidentielle.

L’Afrique, dont les régimes rejettent parfois la démocratie au nom de ses spécificités culturelles et comme corps étranger imposé par l’Occident, semble n’avoir retenu de la colonisation que les attributs du fascisme : techniques de fraude, torture, répression de libertés, refus de l’alternance au pouvoir… À l’occasion, ils rappelleront les responsabilités du colonialisme dans notre condition actuelle, comme si l’Histoire s’était arrêtée aux années soixante et que, depuis, plus rien n’a été fait pour, et surtout contre, le développement des économies et des sociétés du continent.

En Libye, le continent est invité à célébrer et, subséquemment, à légitimer quarante ans de pouvoir personnel. L’Union africaine est opportunément convoquée à l’effet de convoquer à son tour une réunion pour tenter une fois de plus une action visant à épargner un procès pour génocide au maître de Khartoum. Le “Guide” fait ainsi tenir à l’Organisation continentale un sommet spécial sur le Darfour et sur les conflits interafricains, histoire d’avoir sous la main le maximum de chefs d’État de l’Union pour s’offrir l’aréopage d’invités que mérite la célébration d’une longévité politique surnaturelle.

Qui de l’Union africaine et de la Libye sert l’autre ? Le nombre de sommets africains organisés à Syrte et à Tripoli pour convenance aux besoins exhibitionnistes du leader libyen ne se compte plus. Ordonnateur incontesté du trésor pétrolier de son pays, il a l’argent et l’influence pour s’offrir des festivités impériales et la présence de la plupart de ses pairs.

Pendant que ses dirigeants organisent leurs jubilés d’autocongratulations et autres cérémonies “d’évaluation par les pairs”, selon la formule du “mécanisme” créé à cet effet, l’Afrique compte ses morts, ses malades et ses pauvres… indéfiniment. Ce qui n’empêchera pas leurs “représentants” de fêter un des symboles de leur désastreuse longévité sous le plus grand chapiteau du monde — au sens propre ici — conçu par le concepteur de la cérémonie d’ouverture du Mondial 1998 et de l’Euro 2008 !

Concomitamment, à Libreville, le dispositif de répression postélectorale se met en place. Il faudrait que la seconde expérience de succession filiale dans une “démocratie” africaine réussisse : les fils de Président qui attendent leur tour d’être élu à la tête du pays de papa sont nombreux : Gamal Moubarek en Égypte, Karim Wade au Sénégal et… Seif El-Islam Kadhafi en Libye, pour ne citer que les ambitions déclarées.

Mais, ailleurs aussi se laissent deviner des signes d’une ambition d’héritage parental du pouvoir. Chez nous, l’hypothèse d’une succession familiale programmée ne fait rien pour se démentir.

La pratique prolongée de la dictature dérive presque toujours vers une conception patrimoniale de la nation. Son maître n’est plus à son service ; il la possède. Et la transmet. Après l’épidémie des troisièmes mandats, le continent entame l’ère des successions familiales. Et la boucle sera bouclée : les anciennes “possessions” coloniales seront devenues des possessions personnelles. Transmissibles.

Mustapha Hammouche

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