lundi 16 novembre 2009

Système, performance et mérite

L’équipe nationale de football ayant décidé de prolonger le suspense, c’est dans le noir que les enseignants devront continuer leur mouvement de protestation. Avec juste la lueur du discours du président à Sétif promettant une réhabilitation de l’enseignement universitaire et de la recherche. Une réhabilitation strictement salariale, en attendant la réhabilitation politique.

La bonne nouvelle est quelque peu altérée par ceci : le Président trouve que l’Université algérienne va bien et ne mérite pas son mauvais classement international. La preuve en serait que des universités américaines recrutent des étudiants nationaux. L’envol de quelques hirondelles serait une preuve de la qualité de notre production universitaire, pas la production elle-même, mesurable à la contribution de l’université au développement scientifique, économique, technique, culturel et humain de la société.

Le Président s’étant engagé à aligner les salaires des chercheurs sur ceux de leurs homologues étrangers, l’université, ainsi déclarée performante, n’a plus qu’à attendre la récompense sociale qu’elle mérite. Si l’effort et le mérite venaient à s’imposer comme valeurs nationales, ils inaugureraient une véritable révolution philosophique dans le système algérien. Car pourquoi son application s’arrêterait en si bon chemin, là où elle va commencer, à l’université ? On ne pourra plus acheter un siège de sénateur, par exemple ; il faudrait le gagner.

Car, enfin, d’où vient le mal national si ce n’est de la primauté de l’allégeance sur le mérite ?

C’est là que le piège se referme sur la volonté politique, même quand elle serait sincère : un système politique basé sur le pouvoir de cooptation peut-il mettre en pratique une gouvernance qui privilégie l’aptitude et la vertu ?

Non, car cela reviendrait à se faire hara-kiri. Car la promotion de la compétence et de l’engagement implique la mise en place de conditions de libre compétition des aptitudes nationales. Autrement, pourquoi un ministre ou un député qui n’a pas de dispositions particulières à faire valoir se transformerait en défenseur du mérite dans son secteur ou sa circonscription ? On ne connaît pas encore de meilleur mode de sélection que de mettre les protagonistes en compétition, selon des critères objectifs et dans des conditions de transparence.

Or, il n’en est pas encore question. Sauf à vouloir transformer une élite universitaire en une espèce d’équipe nationale de la recherche, bien payée pour représenter le pays dans le système universel d’émulation scientifique ou culturel. Une équipe nationale de chirurgiens, une autre de physiciens, etc. qui animerait les occasions solennelles, comme le feraient de bon chanteurs à l’occasion des festivals institutionnels, et comme le feraient de bons écrivains de salon.

Le mérite, ce serait la fin des monopoles du pouvoir : celui du contrôle des élections qui décident des dirigeants à élire, celui de communication qui décide de qui doit parler, celui de l’allocation des ressources qui décide de celui et de ce qui doit être financé, de celui de la publicité qui décide des journaux qui doivent survivre. Le problème est là : l’autoritarisme est nécessairement promoteur de médiocrité ; au mieux, il peut monter des troupes d’élite gavées pour la représentation. La liberté seule est productrice de performance.

Par : Mustapha Hammouche

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