samedi 29 août 2009

La chasse gardée ou le débrayage

Les transporteurs privés de la capitale menacent de débrayer pour protester, entre autres, contre l'arrivée d'un autre… transporteur privé qui va prendre une part du marché de ce service ! C’est certainement la première fois dans l'histoire que des prestataires de services, arrivés dans l'activité grâce à une décision politique d'ouverture du marché aux particuliers, contestent l'entrée en lice d'un concurrent.

Et que lui reprochent-ils pour pousser ainsi l'audace jusqu'à «exiger» son exclusion ? Une fois évacuées les rumeurs sur l'origine de sa prospérité et l'identité d'un associé de l'ombre, on se rend compte que ce transporteur tant décrié et redouté par ses «confrères» dérange par sa… performance !

Réelles ou supposées, les capacités de cette entreprise à s'imposer de manière hégémonique dans le transport privé de l'Algérois, au lieu de susciter le redéploiement des autres transporteurs en améliorant leur qualité de service et, pourquoi pas, agir sur les prix, est sommé de rester loin du gâteau par une décision politique qu'ils revendiquent à cor et à cri auprès des pouvoirs publics sous peine de bloquer la capitale pour de longs jours.

En dépit d'une impopularité qu'ils n'ont sûrement pas volée, beaucoup auraient compris leur colère si elle était motivée par un argumentaire plus sérieux, parce que l'opinion publique ne peut quand même pas rester sourde et insensible à des gens qui assurent un service si important dans leur vie quotidienne.

Mais déjà que les grèves dans le secteur ne sont jamais accueillies avec le sourire quand ces services sont hautement efficaces et performants, qu'en sera-t-il lorsque débrayeront des transporteurs avec des bus bringuebalants, sans confort et sans horaires, avec un personnel de petits roublards, des itinéraires changeants et des prix incontrôlables ?

On aurait compris si les transporteurs en colère s'étaient soulevés contre un des leurs qui n'aurait pas respecté le cahier des charges. Mais en l'occurrence, tout porte à croire qu'il s'agit du contraire. Ou on nivelle par le bas ou on investit la rue, c'est quand même un drôle de chantage. Il ne faut pas qu'une entreprise capable d'assurer un transport décent arrive sur le marché. Et les mécanismes qui ont fait que des centaines de personnes sans savoir-faire et sans investissement deviennent transporteurs urbains ne doivent plus fonctionner.

C'est quand même curieux qu'on ne s'en soit pas encore pris à l'ETUSA, avec ses véhicules propres et son réel souci de service public. Pas si curieux que ça, quand même : elle s'occupe du centre-ville, c'est-à-dire du plus difficile. Le plus facile et le plus juteux, il a ses «élus» qui ne veulent pas être dérangés dans leur confort. Celui des citoyens peut attendre.  

Slimane Laouari

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