dimanche 4 octobre 2009

On est vacciné!

La première qualité d’un homme politique n’est-elle pas de s’adapter aux circonstances et aux contingences du temps? C’est ce qu’on appelle communément pragmatisme. On a vu beaucoup d’éminents hommes politiques, qui, pour durer (ou pour rester au gouvernail), ont brûlé ce qu’ils ont adoré la veille (ou vice versa). On en a vu qui, après avoir financé, entretenu des groupes terroristes, sont devenus un beau jour des pacifistes bêlants, des militants de l’antiterrorisme. Tout cela parce que leur fauteuil était menacé. Alors, que penser d’un homme politique qui s’entête dans ses convictions?

C’est la réflexion provoquée par les dernières déclarations du ministre des Affaires religieuses et des Wakfs, qui a tenu à marquer la rentrée politique par un surprenant discours: «Le hadj aura lieu, même sans vaccin!» Cela n’est pas sans rappeler la célèbre boutade de Kaïd Ahmed, qui avait dit non sans humour: «Le plan quadriennal sera réalisé, même en dix ans!» Tout cela dit, pour marquer le fossé qui se creusait entre le commandant Slimane et le colonel Boumediène.

Mais, en 2009, entendre un ministre exprimer son obstination en ce qui concerne le cinquième pilier de l’Islam, est ahurissant. D’abord, il faut rappeler que les voies officielles ont tenu des propos rassurants quand des cas de grippe due au virus H1N1, ont été signalés de par le monde: l’Algérie est une île bien protégée. Puis quand les premiers cas importés se sont déclarés ici et là, même son de cloche: toutes les mesures sont prises pour éviter une propagation du virus, alors que dans beaucoup d’autres pays, des cas se sont avérés mortels, en Arabie Saoudite comme ailleurs.

Le pèlerinage étant le lieu de rencontre par excellence d’individus venant de tous les coins du monde, il apparaît comme inévitable que c’est le lieu de brassage, d’association et de mutation de toutes les bactéries, tous les bacilles et tous les virus de la planète: seul un discours obscurantiste peut essayer de voiler la réalité du danger et ce n’est pas en versant dans le fatalisme qu’on pourra rassurer toutes les bonnes volontés soucieuses d’effectuer un rite précieux attendu depuis longtemps.

Il est à noter que les autorités éclairées saoudiennes, qui ont demandé aux pèlerins de se faire vacciner contre la grippe saisonnière et contre la grippe porcine, sont contredites par le mutisme des services algériens concernés par les mesures sanitaires à prendre en ce qui concerne le pèlerinage. Quand on pense que l’importation du vaccin contre la grippe saisonnière connaît un inexplicable retard (est-ce dû au crédit documentaire?), on ne peut qu’être inquiet quant à la réception éventuel de vaccins contre la grippe porcine, d’autant plus que les spécialistes internationaux déconseillent les vaccins habituels contre le virus responsable de la pandémie.

Si, habituellement, l’organisation du Hadj est confrontée à des problèmes de logistique, (transport, prise en charge des pèlerins), cette année, c’est un problème de taille auquel sont exposés les candidats au pèlerinage. Et ce ne sont pas les déclarations tonitruantes ou intempestives qui règleront le problème. A moins de prendre une attitude toute philosophique à laquelle l’Algérien est habitué, grâce à cinq décennies d’improvisations et de se dire: «On ne risque rien, on est vacciné!»

Selim M’SILI

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