dimanche 18 octobre 2009

Il gèle sur le Bosphore

Il ne s'y attendait pas. Accusé de crimes de guerre, perpétrés lors de l'invasion de Ghaza, Ehud Barack s'est laissé épingler au sujet d'une tout autre affaire.

Alors que le procès pour corruption dans lequel est impliqué Ehud Olmert se poursuit à Tel-Aviv, il est reproché au transfuge du parti des travaillistes d'avoir dépensé sans compter lors de son dernier séjour à Paris. Quatre jours et quatre nuits à 180 000 euros !

La facture était trop salée pour tromper la vigilance du contrôleur de l'Etat. Parce qu'il a obtenu dernièrement une hausse de son budget, au détriment de l'Education et des affaires sociales qu'Ehud Barak peut se permettre une telle addition ? Le contribuable israélien n'est pas prêt à effacer cette ardoise, surtout, en ce temps de vaches maigres. Cependant, il ne devrait pas être inquiété.

D'ailleurs, il n'est pas le premier responsable politique israélien à avoir pioché dans les caisses de l'Etat. D'autant que ce n'est pas le moment d'acculer le ministre de la Défense, le Conseil des droits de l'homme de l'Onu a approuvé avec réserve le rapport Goldstone qui devrait être transféré au Conseil de sécurité.

L'heure est à la solidarité gouvernementale, aussi bien du côté de Tel-Aviv que du côté de Ghaza où le Hamas palestinien s'est déclaré autorité légale après son rejet de la plate-forme de réconciliation proposée par le Fatah de Mahmoud Abbas.

En attendant que les deux parties puissent parvenir un jour à une entente nationale, la Turquie d'Erdogan n'est pas disposée à reprendre langue avec son allié israélien tant qu'il n'a pas été mis fin à la tragédie humanitaire à Ghaza. Ehud Barak est prévenu, il n'assistera plus à des manœuvres militaires conjointes sauf si le «plomb durci» se met à fondre.

Mieux encore, les autorités d'Ankara lient le retour à de bonnes relations bilatérales avec l'Etat hébreu à la reprise des négociations de paix avec les Palestiniens et avec la Syrie. Sans cela, la Turquie ne procédera à aucun dégel. Même si sa ténacité va forcément déplaire à ses alliés occidentaux en général et à l'Union européenne en particulier ?

Le gouvernement d'Ankara aurait-il pu se permettre de claquer la porte au nez des Israéliens si la Turquie n'était pas cette «autoroute énergétique» dont l'Occident dépend ? Elle avait bien adressé une fin de non-recevoir à Washington quand W. Bush lui demandait de participer à la coalition étrangère en Irak.

Six ans plus tard, elle ne se prive pas d'avoir une même attitude, via sa décision de tourner provisoirement le dos à l'Etat hébreu.

Surtout que les autorités d'Ankara ont perdu un peu plus espoir quant à une prochaine adhésion de la Turquie à l'Union européenne dont le traité constitutionnel tient encore au stylo du Tchèque Vaclav Klaus. Alors que la Croatie pourrait achever ses négociations d'adhésion à l'UE d'ici à 2010, les Vingt-sept ont exigé d'Ankara plus d'efforts en matière de respect de la liberté d'expression, des libertés individuelles et collectives et une normalisation de ses relations avec Chypre…

Si la réconciliation par le football avec l'Arménie est déjà un bon score, il faudra une nette victoire face à certains dirigeants européens qui refusent la perspective d'une adhésion à part entière de la Turquie, préférant parler d'un partenariat privilégié.

Priée de poursuivre sur la voie des réformes, l'ancienne République yougoslave de Macédoine mettra-t-elle le pied en premier dans l'Union, avant la Turquie ? Chose sûre, ce n'est pas la dernière fois qu'il gèlera sur le Bosphore et l'Etat hébreu n'est pas le dernier à en payer les frais.

Par Anis Djaad

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