mardi 29 septembre 2009

Merzak Allouache et le baiser algérien

«Un baiser légal ne vaut jamais un baiser volé»
Guy de Maupassant
Extrait de Confessions d’une femme


C’est connu dans le milieu du cinéma algérien, Merzak Allouache est un cinéaste expectant, qui saute sur toutes les occasions et les sujets chauds de l’actualité algérienne. Mis à part son premier long métrage Omar Gatlato, qui fut son éclat et sa carte de visite professionnelle en France et ailleurs, toutes ses autres productions sont une succession de sujets qui collent à l’actualité chaude de l’Algérie. Bab El Oued city sur la montée de l’intégrisme, l’autre monde sur le terrorisme en Algérie, Beb El Web, pour capitaliser la montée en puissance de deux vedettes algériennes en France, Naceri et Faudel ou encore Chouchou pour adapter au cinéma un spectacle à succès de Gad El Maleh. Même sa tentative audiovisuelle de Babor Dzaïr a échoué sur la rive du public, en raison de son manque de créativité et de direction d’acteurs. Le nouveau thème auquel s’attaque Merzak Allouache c’est les harraga, considérant que le film aura un succès aussi bien cinématographique que critique. Présenté en avant-première mondiale aux Journées des auteurs - Venice Days - la section indépendante, consacrée aux films d’auteurs de la Mostra de Venise.

Il faut dire que Merzak Allouache sait vendre sa mayonnaise. En acceptant de recevoir une équipe de France 3 sur son plateau de tournage, il sait que cela sera une bonne publicité pour son film à l’avenir. L’oeuvre d’Allouache aborde la question de l’immigration clandestine et de ces «damnés de la mer» qui, sur une barque de fortune, tentent de rejoindre l’autre rive du rêve français ou espagnol. Tourné à Mostaganem et en France, notamment au port de Sète, Allouache a choisi de nouveaux visages, pour son casting de jeunes acteurs prometteurs à l’image de Lamia Boussekine, une jeune comédienne diplômée de l’Ismas, qui a l’habitude de jouer les seconds rôles dans les feuilletons et qui a décroché, à son grand bonheur, son premier rôle dans le dernier film du réalisateur de Omar Gatlato. Avec Seddik Benyakoub, elle forme ce couple algérien qui slalome de nos jours entre frustration et amour.

Lors d’une scène du film, il est demandé à nos deux comédiens de se rouler une pelle pour la scène d’adieu. Une scène que refusaient de jouer les deux comédiens, estimant que c’est contraire à leur principes et à leur religion. Et cela devant la stupéfaction du réalisateur qui pose la question en regardant avec malice la caméra: «Vous êtes comédiens, vous devez tout faire.» L’assistance en rit et on a déjà trouvé un surnom pour le Seddik: comédien halal qui n’embrasse pas une fille à l’écran. Finalement, Merzak Allouache a obtenu un baiser pudique sur la joue, qui a fait rire Luc Besson sur le plateau de Thalassa. Il faut dire aussi que les baisers dans le cinéma algérien se comptent sur les doigts d’une seule main. Le premier à avoir filmé un baiser algérien, c’est, bien sûr, Merzak Allaouche dans Bab el Oued city, avec Nadia Kaci en hidjeb dans un cimetière chrétien. Nadia Kaci qui vit en France, n’hésite pas d’ailleurs à jouer des rôles hots dans Viva l’Aldjerie. L’autre baiser algérien filmé au cinéma a été celui de Sid Ali Alalou dans le film de Mohamed Chouikh La légende du 7e dormant et cela en prison, avec une jeune comédienne, qui a disparu d’ailleurs de la circulation cinématographique. Aujourd’hui, avec le poids des traditions, la menace intégriste et surtout la censure, il est presque impossible de trouver une comédienne capable d’accepter tout d’un réalisateur algérien. Un cinéma où même une fille qui fume à l’écran n’est pas accepté.

Amira SOLTANE

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