A l'heure où le comité le distinguait parmi deux cent candidats, le président Obama dormait encore. Après dix mois passés à la White House, difficile de croire qu'il a pu rêver du prix Nobel de la paix.
Pourtant, le jury suédois a jugé suffisante sa vision d'un monde multilatéral, autre que celle qu'imposait son prédécesseur, pour le récompenser.
Suffit-il d'avoir de bonnes intentions, en l'occurrence éloigner le spectre du choc des civilisations par un discours d'une heure au Caire, pour pouvoir mériter un tel trophée ?
Dans les faits, Barack Obama n'a pas encore fait de miracles. 47 millions d'Américains attendent toujours la couverture sociale que les Républicains s'obstinent à tirer sous leurs pieds.
Mais ce qui a permis au comité Nobel de trancher en faveur du président Obama, c'est l'internationalisation de la politique étrangère US que la candidate Hillary Clinton avait défendue avant d'être appelée à la mener en tant que patronne du département d'Etat.
Ce malgré les impopulaires guerres d'Irak et d'Afghanistan et le bagne de Guantanamo qui tarde à fermer les portes de son enfer.
Plus que regardant, le comité Nobel a vu maintes fois la main du lauréat se tendre aux ennemis de l'Amérique et de tels gestes compteraient plus que tout.
Dialogue à un haut niveau avec le régime castriste, la disponibilité du gouvernement de Washington à s'asseoir à la même table avec les autorités nord-coréennes…, autant d'attitudes courageuses qui valent au premier président noir des Etats-Unis (assez de le rappeler) la plus haute distinction en matière de paix mondiale.
Sans oublier ce vœu de dénucléarisation que l'administration démocrate a pris à bras-le-corps suite à son renoncement à déployer son bouclier antimissiles en Europe, en attendant de savoir ce qu'il adviendra exactement du traité Start.
Mais Barack Obama peut-il exiger de l'Iran et de la Corée du Nord d'enterrer leurs ambitions nucléaires alors que son plus fidèle allié au Proche-Orient détient en toute impunité quelque chose comme 200 ogives nucléaires ?
A moins d'une dénucléarisation à deux vitesses, le prix Nobel de la paix 2009 choisira de bombarder la Lune à la recherche d'eau potable que de porter atteinte à l'indestructible alliance américano-israélienne. Au point de ménager les susceptibilités de l'extrême droite israélienne qui se veut réaliste quant à l'impossibilité d'un règlement global du conflit palestino-israélien.
L'émissaire George Mitchell peut parvenir à une solution en ce qui concerne le gel de la colonisation sauf que le conflit d'il y a cinquante ans ne se résume pas à cinq cents logements que l'Etat hébreu veut construire.
En déclarant que même d'ici 2025 la paix demeurera irréalisable, Avigdor Lieberman, le vigile qui est devenu chef de la diplomatie israélienne, aurait-il mis fin à la bonne intention de Barack Obama à rétablir ne serait-ce que la confiance entre les deux parties ?
Il est plus raisonnable de songer à un Nobel de la paix auquel on ne s'y attendait pas qu'à la paix en elle-même. Croire pouvoir l'atteindre à la fin d'un processus de démocratisation, qui passe par la guerre contre les durs et le dialogue avec les modérés, risque de s'avérer chaotique. Le président Obama mériterait réellement son Nobel le jour où la notion de la paix d'abord, la sécurité après, aura enfin un sens.
Par Anis Djaad
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