Alors qu’au Pakistan, le pouvoir s’est enfin résigné à une guerre offensive contre la forteresse inexpugnable des talibans, l’Iran subit, pour la deuxième fois en une année, un attentat de grande envergure. Par la qualité politique des victimes, c’est l’une des attaques terroristes les plus meurtrières que la République islamique a essuyées depuis son avènement.
Plus au nord, une guerre fait rage entre l’armée régulière et les tribus chiites affiliées au régime de Téhéran dans la région de Saada. L’Arabie Saoudite doit régulièrement endurer des attentats d’Al-Qaïda, dont l’un a visé, le 27 août dernier, son ministre adjoint de l’Intérieur.
Tous ces pays ont la responsabilité d’avoir initié le terrorisme islamiste avant de l’entretenir, idéologiquement, financièrement et militairement. En inondant le monde musulman de noyaux wahhabites, l’Arabie Saoudite croyait étendre, grâce à ce réseau, une ambiance doctrinale qui légitimerait sur une base panislamique son régime despotique et archaïque. L’Iran, depuis la révolution islamique, s’est employé à exporter son modèle en terre d’Islam pour élargir son influence aux dépens des régimes et idéologies wahhabite et baathiste.
Mais en gros, tous les régimes arabes, excepté peut-être la Tunisie, ont tenté d’intégrer l’islamisme dans la formulation de leur identité politique. Ainsi, tous les despotes croyaient avoir suffisamment donné de gages de religiosité pour être à l’abri de la révolution islamique. Mais en cas de besoin, ils étaient toujours disposés à en rajouter une couche. La manière dont le FLN, certes historiquement opposé à la laïcité et détourné d’un djihad anticolonial à des fins de pouvoir local, s’est transformé en barbéfélène aux premiers signes d’hégémonie et aux premières manifestations de brutalité du FIS, illustre la disponibilité du régime algérien, par exemple, à embrasser la nouvelle religion politique.
C’est dire l’accueil quasi triomphal et l’effet d’amplification dont l’intégrisme a bénéficié de la part des pouvoirs en place au Maghreb et au Moyen-Orient. L’Algérie, politiquement dépourvue de toute base doctrinale, et dont les dirigeants n’étaient animés que par le souci de pouvoir, constituait le maillon faible du système géopolitique du monde musulman : elle fut naturellement choisie pour y tester la première révolution islamique armée. Elle continue à payer l’acharnement du projet obscurantiste, largement soutenu de l’intérieur, mais tout aussi efficacement combattu par la résistance républicaine.
Malgré ses divisions, ses contradictions et ses alliances malheureuses, l’islamisme a frappé presque partout dans le monde. Aujourd’hui, il revient militairement à ses points de départ. Ses bases — les confins irano-pakistanais, la frontière pakistano-afghane et les montagnes du Yémen — sont devenues, comme par un effet boomerang, ses champs de bataille.
Après deux décennies de terrorisme islamiste, on peut énoncer cette vérité : n’importe qui peut le susciter, le soutenir, l’orienter mais personne ne peut prétendre s’en prémunir. Y compris justement celui qui le suscite, le soutient ou l’oriente.
Par : Mustapha Hammouche
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