samedi 29 août 2009

Où va l’Afrique?

Le questionnement est sans doute récurrent mais on ne peut que s’interroger sur les errements qui ont été ceux du continent noir, aggravés par des conflits sans fin dont l’issue demeure problématique. C’est légitimement de ces conflits que les dirigeants africains vont parler demain lors d’un sommet impromptu d’une journée de l’Union africaine, à l’initiative du Guide libyen, Mouamar El Gueddafi - président en exercice de l’UA - à la veille du 40e anniversaire de sa prise de pouvoir à Tripoli.

Si l’Afrique «est mal partie» c’est singulièrement du fait que le continent n’a pas su gérer son avenir post-indépendance, se piégeant dans des conflits ouverts ou larvés et surtout dans des guerres sanglantes (la guerre civile au Soudan a duré 21 ans, celle en Somalie est sur le point de boucler sa deuxième décennie) qui ont rendu le continent exsangue reléguant à des jours plus sereins son décollage économique et son développement global.

Selon l’Atlas stratégique 2008, sur 35 conflits graves répertoriés dans le monde, 13 sont situés en Afrique, où 15 pays (sur 53) sont concernés par une «crise d’intensité moyenne à haute». En 2009, loin de se calmer, la situation d’ensemble s’est a contrario aggravée. Selon les statistiques disponibles en 2008, il y avait plus de soldats étrangers en Afrique qu’il n’y en a jamais eu sur le continent noir lors de l’occupation coloniale.

Ainsi, sur 88.000 Casques bleus de l’ONU déployés dans le monde, 61.000 sont engagés sur le continent africain dans au moins huit conflits. Quand ce ne sont pas les conflits qui mettent en stand-by le développement des pays africains, ce sont les dictatures, avec tout ce que cela implique comme corruption et détournement de deniers publics, qui obèrent l’avenir de l’Afrique. De fait, près d’un demi-siècle après les indépendances, le continent africain a peu évolué stagnant dangereusement, cela malgré les immenses richesses de son sol et son sous-sol qui ont seulement profité à une minorité de prédateurs alors que la majorité des peuples africains demeure marginalisée et compte parmi les plus démunis de la planète. Or, sans paix il ne peut y avoir de développement.

D’ailleurs, les composantes des droits humains restent la paix et la stabilité. En leur absence rien ne peut se concevoir au plan du développement humain, social, économique, politique. Depuis plusieurs décennies, minée et marquée par les crises politiques et les conflits, l’Afrique n’a jamais connu la paix, ni cette stabilité qui lui aurait permis de se concentrer sur le développement durable et la bonne gouvernance.

Or, il n’existe nulle part d’exemple de développement en l’absence de paix civile, la seule qui permette à des pays de réaliser leurs programmes et objectifs sur le long terme. Peu de pays africains ont en fait eu cette chance. Plus, les instances économiques internationales n’accordent qu’à un seul pays africain (le Botswana), sur 53, la note «A2» et a trois autres (Afrique du Sud, Maurice et Namibie) le «A3» en termes de risques-pays. C’est dire combien l’instabilité et les conflits font fuir les investisseurs. D’autres paramètres, comme les libertés individuelles et collectives, interviennent qui expliquent les retards accumulés par le continent noir.

L’Union africaine, malgré l’évolution qualitative qu’elle a connue, ces dernières années, n’a pas, n’a jamais eu, néanmoins les moyens de sa politique. De fait, les bonnes intentions de l’UA en matière de gouvernance et de droits humains se heurtent frontalement, outre aux politiques contraires pratiquées par la majorité de ses Etats membres, à la persistance des conflits de pouvoir et des guerres civiles qui ajournent indéfiniment le véritable décollage de l’Afrique. Dès lors, consacrer une (seule) journée à des problèmes aussi ardus qui pénalisent le continent, ce n’est certes pas la bonne méthode.

Karim MOHSEN

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