Il y a des nouvelles qui tombent comme cela, tous les jours et qui nous laissent baba! On arrivera à ne plus pouvoir nous étonner tellement l’actualité, pourtant sans relief, monotone, morose, devient tout d’un coup ahurissante. On vous dira que des Martiens (ou marsiens s’il s’agit des gens du 19 du même mois) ont débarqué à Chelghoum Laïd, qu’on trouverait cela tout naturel.
Peut-être qu’ils sont venus à la dernière adresse connue de Gaston Ghenassia pour lui rembourser les 20 millions de dollars disparus dans le vent de sable qui a soufflé sur Wall Street, juste après le 11 septembre... enfin en 2008! Mais la nouvelle, qui m’a laissé comme un rond de flan sur une assiette de terrain non viabilisé, ne vient pas de Châteaudun-du-Rhummel, mais d’à côté, du boulevard Zighoud-Youcef qui se trouve à quelques pas de celui de Che Guevara!
Il paraît que nos vaillants députés auraient demandé (j’emploie ici le conditionnel car on n’est jamais assez prudent par les temps qui courent: il y a des plaintes qui n’aboutissent pas certes, mais il y en a d’autres qui arrivent avant que l’arbitre n’ait sifflé le départ, et ces plaintes au galop, sont jugées et expédiées bien avant les délais prévus, comme les chantiers tenus par les Chinois par exemple), je disais donc que «nos élus» (enfin, certains d’entre eux) dans la discrétion la plus totale, auraient (toujours ce sacré conditionnel qui me colle à la peau comme un gilet pare-balles) demandé des armes: rien que ça!
Moi qui croyais que nos députés n’étaient que des gens bassement matérialistes, qui ne pensaient qu’à arrondir un peu plus leur fin de mandat (mandat est un vocable bien justifié pour quelqu’un qui s’envoie 300.000 dinars, je dis bien trois cent mille dinars, comme à la poste), allaient revendiquer, à l’occasion de la rentrée et à la veille d’une hypothétique tripartite qui risque de s’avérer décevante pour les smicards, une augmentation de salaire vu le mois catastrophique sur le plan financier que nous venons de vivre. C’est légitime une augmentation de salaire tous les ans au regard de l’inflation résiduelle qui terrorise le pauvre consommateur. Du fric, oui! Mais des armes, pour quoi faire, bon sang de bon sang?
Le premier moment de stupéfaction passé, je me suis alors dit que la demande n’était pas aussi saugrenue que cela. Avec la violence inouïe qui a déferlé sur le pays tout entier, il est bien normal que le boulevard Zighoud-Youcef ou le club Med prennent un peu leur part! Et puis il y en a marre de voir les députés lever la main un jour pour brader les gisements pétroliers, le lendemain pour les préserver. Non! Il faudrait un peu d’animation dans cette assemblée de gens repus qui digèrent difficilement la chorba-fric.
Un peu de mouvement, bon sang! Au lieu des salamalecs courtois ou des noms d’oiseaux qu’on prête à l’opposition, un peu d’odeur de poudre ne ferait pas de mal! Ainsi, le boulevard Zighoud-Youcef deviendrait O.K. Corral! Tous les règlements de comptes se feront à la loyale avec un arbitre et des témoins assermentés. Et chaque fois que le président de l’Assemblée voudra demander le silence, il tirera sa pétoire et abattra le bavard qui chahute dans son coin.
Au bout de quelques jours, l’Etat aura économisé quelques salaires, vu la température du sang de nos députés. Il y en a déjà qui se sont distingués extra-muros sur des pauvres citoyens désarmés. Mais à la longue, pour être sérieux, j’ai pensé que ceux qui ont demandé des armes, n’ont peut-être pas la conscience tranquille et que le salaire qu’ils touchent n’est que le salaire de la peur.
Selim M’SILI
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