Une star mondiale de la chanson croupit dans une prison française, une autre star du cinéma hollywoodien vient d’être arrêtée en Suisse. Pour l’un, c’est le silence, pour l’autre c’est un vrai tsunami...
C’est que les mots ont leur importance et qu’ils peuvent faire et défaire une situation. Prenons l’affaire qui a déclenché un vrai tsunami médiatico-politique cette semaine. Il s’agit de l’arrestation en Suisse de ce réalisateur de renommée mondiale qu’est Roman Polanski, poursuivi par la justice américaine pour pédophilie (les médias occidentaux disent «penchant sexuel» dans son cas). Cela s’est passé il y a trente années. Cela fait trente ans aussi que l’accusé a fui les Etats-Unis et leur justice. Il n’y a plus remis les pieds, vivant principalement à Paris dont il a pris la nationalité. Son arrestation a créé un tollé indescriptible dans certains médias occidentaux.
Des Etats aussi se sont élevés contre l’exécution du mandat d’arrêt américain. L’affaire a fait grand bruit en début de semaine pour se tasser et se voir carrément retirée du menu des rédactions en fin de semaine. Pour ne pas gêner les tractations qui ont commencé entre les «amis» du réalisateur et l’administration américaine. Mais qui est Polanski et qu’a-t-il commis? L’homme est né à Paris en 1933 d’un père juif polonais et d’une mère russe. Il a connu une enfance malheureuse de vagabond, gagnant sa subsistance dans le marché noir.
Ce qui ne lui laisse guère le temps d’aller à l’école. Mais la chance va lui sourire grâce au cinéma. Qu’il découvre à l’âge de 13 ans. Deux ans après, il décroche le rôle principal dans une pièce intitulée Le fils du régiment mis en scène par Joseph Karbowski. En 1962, à l’âge de 29 ans, il réalise son premier long métrage auquel il donne le titre Le couteau dans l’eau. Cela suffit pour sa consécration en obtenant l’Oscar du meilleur film à New York. En 1968, il épouse la célèbre comédienne américaine Sharon Tate qui se fera assassiner avec quatre de ses amis en Californie par des membres d’une secte dont le tristement célèbre gourou était Charles Manson. En 1977, au summum de sa gloire, Polanski est poursuivi par la justice américaine pour «viol sur une mineure de 13 ans». Libéré sous caution après 47 jours passés en détention, il en profite pour fuir et rejoindre la France dont il possède la nationalité.
Il ne nie pas les faits mais refuse l’accusation de «viol» car selon lui, la victime «était consentante» (rappel non inutile que la fillette en question n’avait que 13 ans). Il accepte à la place, le chef d’accusation de «détournement de mineure». Une reconnaissance du crime ineffaçable. Depuis sa fuite, Polanski vivait librement. Voyageait en Europe le plus normalement du monde malgré le mandat d’arrêt lancé contre lui. Jusqu’à cette semaine où il s’est fait arrêter par les policiers suisses à sa descente d’avion. Voilà l’affaire brièvement exposée. Mais qu’avons-nous entendu dire les ténors des médias et de la politique de certaines capitales européennes? Pas une seule fois le mot «pédophile» n’a été utilisé. L’enfant victime est devenue «une jeune femme consentante».
De plus, elle lui aurait «pardonné». On a entendu parler de «prescriptibilité» pour des faits remontant à 30 ans alors que cela n’existe pas aux Etats-Unis. On a presque entendu que les Etats-Unis n’étaient plus un Etat de droit puisque «la peine de mort» y a été toujours appliquée. On a entendu la Suisse se faire traiter de tous les noms d’oiseaux pour avoir exécuté le mandat d’arrêt. Le nouveau ministre français de la Culture, Frédéric Mitterrand, n’a pas hésité à joindre sa voix à celles des «offusqués» qui défendent la culture en général et les artistes en particulier. Personne n’a dû dire à Mitterrand que, dans une prison française, croupit depuis un certain temps une autre star mondiale de la culture. Cette star s’appelle Mami. Ce n’est pas un pédophile. Certes, il a fui un moment la justice française mais il s’est ressaisi et est revenu se présenter de lui-même à son procès. Il n’a eu droit à aucune solidarité des hommes et femmes de culture.
Peut-être que vous, M.Mitterrand, qui venez à peine d’arriver, allez-vous montrer la même solidarité pour Cheb Mami que pour Polanski et vous dresser contre ces attitudes de deux poids, deux mesures? Osons y croire!
Zouhir MEBARKI
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