Ramadhan pourrait donc servir de prétextes et d'aubaines à plein de choses, y compris les plus inimaginables. La spéculation, la boulimie, le terrorisme, la fausse dévotion, les bagarres, les affaires, la politique et l'oisiveté, on le sait, font depuis longtemps partie du paysage de ce mois. Mais on en découvre d'autres.
Tenez, dans son édition d'hier, un confrère arabophone nous apprend que les gardes-côtes ont mis un dispositif de surveillance spécial pour les harraga qui pourraient profiter de la baisse de vigilance ou de la réduction des troupes pour se faire la belle sans gros risques de se faire prendre avant même de prendre le large.
C'est connu, dans les entreprises d'une telle témérité, il n'y a pas plus bête que d'être arrêté sans avoir essayé. Psychologiquement, la harga est d'abord un défi que les jeunes candidats se lancent à eux-mêmes, avec, au bout, la fierté d'avoir réussi l'impossible pari ou la consolation morale d'avoir tout tenté, y compris en mettant leur vie en péril.
La perspective de se faire ramasser donc sur une plage ou à quelques centaines de mètres de là doit être le pire des cauchemars de ces jeunes qui, on le sait, ont aussi l'ego à fleur de peau. Aller peut-être en prison après un bide aussi monumental ou pire, revenir dans le quartier avec si peu de choses à raconter, une aventure qui a tourné court et une fin de parcours si peu glorieuse doit hanter plus que tout les nuits des brûleurs d'écume.
Ils doivent ainsi redoubler d'ingéniosité, mettre tous les atouts de leur côté et saisir la moindre aubaine qui puisse multiplier leurs chances de «réussite». Parmi ces aubaines, il y a bien sûr la léthargie générale qui prend confortablement ses quartiers dans le pays du premier au dernier jour du Ramadhan.
Ils sont plutôt bien placés, les harraga pour savoir que la vigilance est souvent à son degré zéro aux heures où on jeûne et surtout lorsqu'on… mange.
Parmi eux, il y a ceux qui ont «travaillé» tranquillement dans les parkings de voitures appartenant à des hommes assommés par le manque de nicotine ou en train de s'empiffrer le soir venu. D'autres ont eu tout le loisir de constater combien il était facile de s'esquiver du boulot à l'occasion de furtifs passages dans quelque entreprise. Il y a enfin ceux qui connaissent par cœur les opérations harga qui se sont terminées avant de commencer : jamais pendant le Ramadhan.
Mais maintenant que les gardes-côtes s'y mettent avec des dispositifs spéciaux et des instructions fermes, ça va être drôlement difficile. Ils ne désespèrent pas pour autant. Le jour de l'Aïd peut-être.
Slimane Laouari
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